À ma Lune qui m'emplit d'allégresse,

Mademoiselle, me voilà à vous écrire deux jours après votre dernière lettre et mon retard est impardonnable, à vous qui partagez mon impatience de lire nos lettres, vous tous les soirs et moi tous les après-midi. Je suis navré ! Je reviens à vous avec une nouvelle, une grande nouvelle, qui me servira d'ailleurs d'excuse pour implorer votre pardon après vous avoir fait attendre.

Cependant, la nouvelle peut attendre, puisque je préfère d'abord répondre à votre lettre si charmante et si réjouissante. Oh, Mademoiselle, je suis rassuré, en effet, et je vois, oui, je vois votre bonheur, je le lis entre vos lignes, je le respire à la mélodie de vos mots. Vous faites bien de vous confier à moi, et cela pour plusieurs raisons. La première étant que je me sentais mal et tout penaud de tout vous avouer, de vous appesantir de mes propres fardeaux, sans que ceci ne soit réciproque. Et puis, parce que je me vante d'être un excellent confident et que je garderais vos secrets et vos histoires jusque dans la tombe ; pour le moment, vous ne m'admettez que les bons côtés ou vous me laissez tout juste deviner les mauvais, mais, un jour, j'espère obtenir suffisamment de votre confiance pour que vous puissiez vous décharger de la pression des épreuves de votre vie et vous libérer des boulets que vous traînez. Enfin, vous avez bien fait, car votre satisfaction et votre enthousiasme à me raconter quelques pans de votre quotidien me touchent en plein cœur, en y diminuant la crainte que vous ne soyez accablée de maux ineffables et odieux. Je me console à présent en sachant que toutes vos petites peines passagères, toutes vos pensées lourdes et lasses, tous vos sous-entendus que vous avez glissés dans vos lettres et ceux qui m'apparaîtront dans les suivantes, tout cela ne vaincra jamais l'heureux sentiment de posséder une famille aimante, d'être adorée et choyée, et d'adorer et choyer en retour vos animaux, votre entourage, votre maison, et de disposer d'un endroit sûr où vous retirez quand tout semble morose et instable. Non point que je vous imaginais sans amies, et je dois dire que votre description de celles-ci ne m'étonne pas et ressemble à ce que j'aurais pu me figurer, mais je suis ravi de découvrir un nouvel aspect de vous. La Mademoiselle Lune seule envers et contre tous, avec ses opinions tranchées sur tout et son franc-parler, cette Mademoiselle Lune croule sous l'amour tendre de ses proches. Qu'est-ce que je ne donnerais pas pour vous voir en vrai, pour découvrir votre visage, et entendre le moindre de vos avis en détails et en longueurs, car je ne me fatiguerais jamais de vous lire ! Pourtant, hélas ! je suis conscient des risques, que tout ne soit plus comme avant, comme maintenant, et que notre bulle privilégiée ne s'éclate à notre rencontre, que nous n'osions plus parler l'un en face de l'autre, et que l'embarras ait raison de la jolie amitié qui se construit au fil des jours. Lorsque l'envie de vous retrouver se fait trop forte, je me réconforte en me rappelant que votre apparence ne m'importe que peu, après tout, et que ce sont vos paroles, vos réflexions, nos débats et notre complicité naissante qui comptent. 

À vrai dire...je conclurais sur ce point pour ne pas vous faire patienter trop longtemps à propos de cette fameuse nouvelle...à vrai dire, je pense que vous m'êtes déjà devenue indispensable. Je me lève avec l'empressement d'un animal en cage qui, tous les après-midi à la même heure, serait en mesure de sortir de sa prison confortable pour faire tant de choses. Eh bien ! grâce à vous, je peux m'amuser et me divertir, surtout à la mention de votre traitement tout particulier des hommes gênants, je peux me plonger hors de mon existence l'espace de quelques minutes pour me dédier tout entier à la vôtre, je peux me plaindre et me lamenter avec vous, et je peux rêvasser avec vous. Mademoiselle, vous me fascinez autant que je vous comprends et, tout en m'échappant complètement, j'ai l'impression de me rapprocher de vous, assez pour me considérer votre ami et confident. Je vous le répète, par pitié, ne vous retenez pas, ne redoutez rien avec moi ; vos secrets n'appartiennent qu'à vous et je me tiens prêt pour l'instant précis où vous accepterez de vous en délivrer.

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 23 ⏰

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