Trois heures, trois heures que ce sale chien aboie. Trois heures que Fred essaie de me convaincre d'aller à l'hosto. Trois heures, dans ce bruit perpétuel, avec un méli-mélo de douleur, de sang, de colère et de voix.
Le paternel, ne pouvant pas supporter le bruit du cleps, avait décidé d'aller faire un tour au bar dès notre retour de l'église. Je clopinais tellement que Fred avait dû se chargé tout seul de rentrer la caisse dans le garage et de nettoyer mon sang à l'entrée et sur le goudron. Le camion n'avait pas loupé le pare-choc de la bagnole.
Mais voilà que maintenant Fred me sort -du cul de mes oies- tout un serment sur mon attitude face au paternel, il tourne en rond depuis près de trois heures.
Je n'en peux plus, au diable sa réaction ! Il faut que je lui dise ! Je me racle la gorge et crache un mollard dans le seau d'eau -qui a servi au nettoyage- avant de lui dire :
- Une...
Fred s'arrête de hurler et se rapproche paniquer de moi, en tendant l'oreille. J'ai enfin toute son attention.
- Q-Quoi ?! Qu'est-ce que t'as frangin ?!
J'ai du mal à respirer, et mes côtes me font encore plus mal que mon visage ou mon bras. Mais je dois lui dire, je n'arriverai pas à tenir sans !
- F-Fred... Une...
- Quoi ?! Bon sang ! Dis-moi !!
Je prends une grande inspiration, de la salive, du sang, et un arrière goût de viande cru dans la bouche, je dois m'en débarrasser.
- Une cigarette...
Fred se redresse, les sourcils froncés, si bien que son regard est presque noir, il serre les poings, souffle, et me chuchote, mais très, très en colère :
- Dis-moi que t'es pas sérieux.
J'inspire encore, et je cri :
- Il me faut une cigarette !
- C'est hors de question !! Il te faut un hôpital ! Qu'il me rétorque sur le même ton.
Quel crétin. Que se soit lui, le chien ou le voisin de palier, ils ne m'écoutent jamais.
- Bon ! Je vais devoir m'en acheté moi-même...
- Tu restes coucher !
Et il me repousse sur le sofa en prenant garde à ne pas toucher mon côté, il prend le téléphone et commence à taper le numéro des urgences. Quel crétin.
- Tu perds ton temps. Je dis.
Et il me lance un regard de grand-mère aigrie avant de poser le téléphone fixe contre son oreille. Il veut me prouver que j'ai tort ? Une, deux, trois secondes, puis il se met à causer au combiné :
- Allô ! Mon frère a besoin d'être soigné..! Comment je m'appelle ?
Je me redresse doucement du sofa. Je crois qu'il me reste encore quelques billets dans ma chambre, assez pour deux paquets. Je pousse sur mes jambes et je manque de tomber la tête la première sur le sol sale du salon, les doigts agrippés aux fentes du mur et le cul en l'air, je sens mes bras qui se mettent à trembler.
- Heu, j-je suis Freddy Yverdon...
Une fois le vertige passé, je me redresse puis je vais directement dans ma chambre sans me retourner, quitte à monter les escaliers comme un blessé de guerre.

VOUS LISEZ
Feeling ( En Pause )
Fiction générale"Une ville." "Deux frères." "Une cigarette." "Et un flingue." "Il n'en faut pas plus pour atteindre le plus beau des rêves." Suivez les mésaventures d'Yverdon , un bachelier paumé qui jongle entre son père abusif, son frère tout aussi paumé que lui...