Dakar, le 05 janvier, 2015
8h30Ce matin-là, le réveil avait décidé d'être particulièrement brutal. En me réveillant, je fus immédiatement confrontée au chaos dans lequel je vivais. Les vêtements traînaient partout, les livres étaient empilés de manière anarchique, des papiers ici et là, témoins de mes tentatives infructueuses de révision la veille. Mais surtout, il y avait ce désordre intérieur qui régnait en moi, celui qui me faisait me lever chaque matin avec une fatigue étrange, pas seulement physique. Mon lit, était à peine reconnaissable. Le réveil clignotait comme s'il se moquait de moi, et je le regardai avec une certaine hostilité.
La chambre que je partageais avec Youma, Sophie, et Oumou, bien que spacieuse selon les standards étudiants, donnait l'impression d'un lieu où l'ordre avait cessé d'exister. Les murs, autrefois blancs, étaient couverts de posters mal accrochés et de marques de vies précédentes, tandis que les quatre lits superposés faisaient office de frontière entre nos petites zones de chaos personnel.
Depuis quelques jours, mon sommeil avait pris des allures de péripétie nocturne. Chaque nuit, je m'endormais tardivement, hantée par des insomnies sans précédent. Il m'arrivait de rester éveillée des heures durant, le visage tourné vers le plafond, réfléchissant à des scénarios improbables. Youma était toujours en froid avec moi. Le soir, on rentrait souvent ensemble du travail, dans un silence déconcertant. Elle ne s'était visiblement pas réconciliée avec Cheikh non plus. Je ne la voyais pratiquement plus qu'en dehors des heures de cours, de travail et du coucher. J'ignorais ce qu'elle faisait du reste de son temps. Moi j'étais dernièrement très captivée par mon roman. Je suis passée à la bibliothèque prolonger mon emprunt.
Le manque de sommeil commençait à se faire sentir sérieusement. J'étais plus irritable, plus lente à réagir, et chaque matin ressemblait à une bataille pour sortir de ce brouillard épais que mon esprit refusait de percer. Je m'extirpai finalement du lit avec une urgence qui n'était pas très naturelle. J'étais déjà en retard à mon cours de toute façon. Tout le monde était déjà partie. Naturellement !
La douche commune, partagée par tout un étage de filles, était tout aussi chaotique que notre chambre. L'eau coulait par intermittence, alternant entre brûlante et glaciale, mais je me contentai de ce petit moment de répit. La douche était souvent mon seul moment de la journée où je pouvais vraiment me recentrer, même si c'était dans un environnement aussi peu accueillant que celui-ci. Le bruit de l'eau me calmait, même temporairement.
Après m'être séchée à la va-vite, j'enfilai un t-shirt froissé et un vieux jean, pressée de ne pas rater mon premier cours de la journée : psychopathologie. C'était l'un de ces cours où il fallait vraiment être alerte, et vu mon état de fatigue, c'était un défi en soi. Je quittai la chambre en trombe, traversant les couloirs bondés de l'université où les étudiants se précipitaient comme des fourmis, chacun absorbé par ses propres préoccupations.
L'amphithéâtre était déjà rempli lorsque j'arrivai. Comme d'habitude, j'étais en retard. La porte grinça légèrement lorsque je l'ouvris, attirant quelques regards furtifs. Pas de quoi interrompre le professeur, heureusement, mais suffisamment pour me faire sentir que je n'avais pas été aussi discrète que je l'aurais voulu. Il restait une seule option : m'installer sur les marches, encore une fois.
Je me faufilai entre les rangées de sièges, tentant de ne bousculer personne, et me laissai tomber sur une marche, juste à côté d'un groupe de filles qui semblaient discuter en chuchotant.
Youma était là, bien sûr, assise avec une posture parfaite, le regard fixé sur le tableau, indifférente à tout ce qui se passait autour. Elle ne m'avait même pas remarqué. À côté d'elle, une fille que je ne connaissais pas griffonnait des notes avec une précision obsessionnelle, ses lunettes glissant sans cesse sur son nez.
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Les fractures du cœur
RomanceCe roman plonge profondément dans les thèmes de la douleur, de la rédemption, et de la résilience, offrant une réflexion sur la force et la vulnérabilité du cœur humain face à l'adversité. Il a été écrit sur la base d'une expérience réelles.