Chapitre 18 - Tête à tête

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Il est 19h52 et j'attends Luccini devant la porte de la salle 424

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Il est 19h52 et j'attends Luccini devant la porte de la salle 424. Mon cœur bat à mille à l'heure. Même maintenant, à quelques minutes du début de mon cours particulier, je peine toujours à croire ce que j'ai entendu dans les toilettes des femmes vendredi soir.

La soirée a été tellement riche en émotions que j'ai eu l'impression de l'avoir rêvée — ou cauchemardée, selon les moments... Alors, j'ai passé tout le week-end à repasser les événements en boucle, et à me faire à l'idée que, peut-être, Luccini n'est pas le connard que je le pensais être. Et croyez-moi, cette perspective m'a bien plus troublée que je ne l'aurais imaginé...

Après tout, comment tout a pu changer si rapidement ? Comment a-t-on pu passer de ces remarques froides et acerbes à ces paroles bienveillantes, presque... admiratives ? Est-ce que c'est moi qui ai tout mal interprété depuis le début ? Est-ce que j'ai été aveugle à ses véritables intentions, prisonnière de mes propres préjugés ?

"Je pense que tu as un potentiel incroyable, Gemma. Et j'aimerais t'aider à l'exprimer pleinement."

Ces mots... ils semblaient tellement irréels sortis de sa bouche. Je m'attendais à tout, sauf à ça. Lui, si intransigeant, presque cynique, qui m'avait jusqu'ici toujours regardée comme si ma présence était gênante, venait de me dire que j'avais de la valeur ? Qu'il voulait m'accompagner dans la création de ma collection ? Comme ça, sans prévenir ? Quelques minutes à peine après m'avoir une nouvelle fois humiliée ?

Cela n'avait pas de sens, et pourtant, je devais me rendre à l'évidence : c'était bel et bien la réalité. J'en avais eu la confirmation tout à l'heure, lorsque Luccini m'avait désignée comme la gagnante du concours devant toute la classe. Les regards s'étaient tournés vers moi dans un silence étouffant qui criait "Gemma, la gagnante ? Comment c'est possible ?"

Personne n'avait osé poser la question à voix haute, mais je l'avais sentie dans chaque œil posé sur moi. Il n'avait échappé à personne que j'étais dans le collimateur de Luccini depuis le début de l'année, alors forcément, ma victoire avait laissé tout le monde sous le choc. Et moi aussi, à vrai dire.

Je jette un coup d'œil à l'heure : 19h55. Le cours particulier est sur le point de commencer. Je me balance nerveusement sur mes pieds, une main cramponnée à l'anse de mon sac, l'autre serrée autour de la veste que Luccini m'a prêtée l'autre soir. Je peux encore sentir l'odeur légère de son parfum imprégnée dans le tissu, ce qui me trouble davantage.

J'appréhende. J'appréhende ce nouveau moment passé seule avec lui. J'ai encore du mal à croire que l'épisode de vendredi soir n'était pas un accident, un moment de faiblesse. Et je redoute que le Luccini froid et tranchant que je connais si bien fasse son retour. Je l'imagine déjà, le regard dur, la voix sèche, démolissant chaque couture de ma création.

Je me prépare à recevoir des commentaires désagréables dessus, même si je sais — ou plutôt j'essaie de me convaincre — que c'est pour me pousser à exprimer mon plein potentiel.

Room 424Où les histoires vivent. Découvrez maintenant