La nuit était tombée, vingt-quatre heures après la mort d'Adara.
Tout le groupe s'était rassemblé au bord du désert, prêt à le quitter à jamais.
DUMUZI : Êtes-vous tous prêts ?
LUGAL : Il le faut, mon fils.
DUMUZI : Shamash, tu restes derrière, moi je prends la tête ! Les enfants, vous vous placez au centre !
ENKI : Père, s'il te plaît, je veux être à tes côtés !
DUMUZI : Fiston, fais ce que je te dis, tout ceci n'est pas un jeu.
Dumuzi ferma les yeux un instant tandis que la colonne humaine se formait.
DUMUZI (en fermant les yeux) : Que les dieux soient avec nous... Cette épreuve est de loin la plus difficile que nous ayons à affronter...
Il expira profondément, relâchant la tension accumulée.
DUMUZI : Allons-y !
Au crépuscule, ils commencèrent leur marche, les ombres des dunes s'étirant derrière eux comme des spectres du passé. Le sable, encore frais sous leurs pieds, offrait un bref répit avant que la chaleur du jour ne se dissipe entièrement. Chaque pas semblait lourd, chargé du poids des souvenirs, des espoirs, et des craintes.
Ninsun tenait la main d'Ur-Nammu, tandis que Shamash, le visage marqué par la colère et le deuil, marchait en silence, son regard dur fixé sur l'horizon. L'étoile Inanna brillait dans le ciel, les guidant dans l'obscurité, une lumière protectrice envoyée par la déesse de l'amour et de la guerre.
À mesure que la nuit avançait, le ciel s'illuminait de milliers d'étoiles, une toile divine. La brise nocturne leur apportait un peu de réconfort, et ils accélérèrent leur marche, enveloppés par la tranquillité de l'obscurité. Leurs pas dans le sable formaient une sorte de chant, un murmure ancestral.
Après des heures de marche, ils firent une halte. Dumuzi rassembla les siens autour d'un petit feu, et ils échangèrent des récits de courage, d'amour et de foi pour se réconforter. Les rires de Tammuz, Enki et Inanna, bien qu'emprunts de tristesse, ravivaient l'espoir. En entendant les récits de la création par Enki, la tribu retrouvait un semblant de force.
Au matin, la lumière du soleil Shamash les tira du sommeil. Bien que le soleil soit encore supportable, ils savaient que chaque heure sous ses rayons serait plus dure que la précédente. Leurs pensées étaient tournées vers l'Euphrate, ce fleuve sacré béni par Enlil, un espoir d'atteindre la vie nouvelle.
Le deuxième jour s'étira, et le désert devint une mer de sable écrasante. Dumuzi exhortait son peuple à persévérer, leur rappelant que chaque pas les rapprochait de leur but. Lugal marchait à ses côtés, prodiguant des conseils et veillant à maintenir l'unité du groupe.
Alors que la chaleur atteignait son paroxysme, leurs réserves d'eau diminuèrent dangereusement, mais ils restèrent déterminés. Le soleil s'inclina enfin vers l'horizon, et une silhouette apparut à l'horizon – une oasis. Leurs cœurs se gonflèrent d'espoir et ils accoururent pour remplir leurs gourdes. Ils se reposèrent à l'ombre des palmiers, remerciant les dieux, Shamash et Enki, pour cette bénédiction.
Après leur pause, ils reprirent leur route, convaincus que l'Euphrate n'était plus très loin. Trois jours plus tard, ils arrivèrent enfin à la lisière d'une forêt luxuriante de palmiers, de figuiers et de roseaux bordant le fleuve. Mais Dumuzi restait préoccupé. C'était ici, sur ces rives, qu'il avait croisé Enkimur, l'homme responsable de la destruction de leur village.
DUMUZI : Dépêchez vous ! Nous allons remonter le fleuve pour trouver un endroit plus sûr.
ENKI : Pourquoi, père ?
DUMUZI : Nous devons nous abriter loin des regards de nos ennemis.
LUGAL : Nous sommes épuisés... Nous devrions nous installer ici pour la nuit.
DUMUZI : Je suis d'accord. Mais dès le lever de Shamash demain, nous partirons vers l'amont.
SHAMASH : Moi et Tammuz allons chercher de la nourriture pendant que vous préparez le camp.
DUMUZI : Merci, mon frère.
Shamash et Tammuz s'enfoncèrent dans la forêt. Après avoir récolté des figues et des baies, ils s'arrêtèrent.
SHAMASH : C'était bien ici, pas vrai ?
TAMMUZ : Oui, c'était ici, aussi loin que mes souvenirs me reviennent.
SHAMASH : Alors ils doivent être tout près, peut-être de l'autre côté du fleuve... S'ils ont pu nous traquer jusqu'à notre village, nous les trouverons aussi. Cette fois, ils ne reverront pas la lumière du jour.
De retour au camp, la tribu s'était installée autour du feu. Le crépitement des flammes et le murmure lointain du vent semblaient accentuer le poids du silence. Ce fut Ur-Nammu qui, le premier, rompit le calme pesant.
UR-NAMMU : Père... Adara est-elle partie rejoindre Enlil, auprès des dieux ?
Shamash, touché par cette question, détourna les yeux, une lueur de tristesse traversant son regard. Son cœur se serra à l'évocation de sa bien-aimée.
DUMUZI (après un silence) : J'en suis sûr, mon fils. Adara était une âme pure, bénie par les dieux. Si quelqu'un mérite de marcher dans les jardins d'Enlil, c'est bien elle.
Ninsun, assise à côté de Shamash, releva doucement la tête, un sourire nostalgique aux lèvres.
NINSUN : Je me souviens encore de la première fois où elle t'a embrassé, Shamash... C'était devant toute la tribu. Elle n'avait pas peur du regard des autres.
Shamash esquissa un sourire triste, les yeux brillants de larmes retenues.
SHAMASH : Oui... Elle avait ce courage, ce feu en elle... Elle était différente.
NINSUN : Le père de Lugal en était même resté sans voix. Il disait que seuls les plus audacieux osent ainsi défier les conventions... Et puis, deux ans plus tard, Tammuz est arrivé, comme un cadeau des dieux.
Tammuz, qui écoutait en silence, releva la tête.
TAMMUZ : Dis-moi, père... Ne regrettes tu rien ?
Shamash prit un instant pour le regarder, les traits adoucis par l'émotion. Ses yeux rencontrèrent ceux de son fils.
SHAMASH (avec douceur) : Je ne regrette rien, Tammuz. Tu es la plus belle des preuves que l'amour d'Adara vit encore en toi. Elle serait fière de l'homme que tu es devenu, tout comme moi.
Soudain, des bruits dans les buissons coupèrent leur conversation. Trois hommes émergèrent de l'ombre, Enkimur et ses acolytes.
ENKIMUR : Bonsoir, Dumuzi... Désolé de gâcher votre petite fête, mais il va falloir l'écourter.
Shamash se leva d'un bond, mais fut rapidement immobilisé par une lance pointée sur lui.
ENKIMUR : Ne bougez pas... Vous êtes déjà suffisamment accablés, inutile d'en rajouter.
DUMUZI : Que veux-tu ?
ENKIMUR (avec un sourire sarcastique) : Ce que je veux ? Tout. Votre campement, votre nourriture.
DUMUZI :- Vous n'en avez donc pas assez autour de vous.
ENKIMUR (avec un sourire narquois) :- Si mais..... on veut pas vraiment se salir les mains voyez vous, messieurs... passons à l'action...
Sortie le 20 novembre 2024
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Dumu (Saison 1)
Historical FictionEn 3400 av. J.-C., Dumuzi, chef d'une tribu nomade et père de famille, mène les siens à travers un désert aride, luttant contre la désertification qui ravage leurs terres. Face à la famine et aux conditions de vie de plus en plus précaires, il n'a d...