Chapitre 19

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Andrew traversa les jardins à cheval, exhorté par deux sentinelles, en direction de la tour de garde.

A peine descendu de son étalon, le marquis s'adressa à un homme d'arme qui l'attendait devant la porte de la tour à l'entrée du domaine.

-Où est-il ? Somma le marquis.

-A l'intérieur Maître, nous l'avons attaché en attendant votre retour.

Le noble ouvrit brutalement la porte de la tour. La pièce lugubre, froide et étroite était éclairée par une lampe de fortune. Son regard se porta immédiatement sur le garçon agenouillée au sol, encadré par deux gardes. Le palefrenier avait les mains attachées dans le dos et ses yeux étaient couverts par un bandeau. Le corps frêle du garçon tremblait de tout son long. Ses vêtements étaient couverts de boue et des branches d'arbre s'emmêlaient dans ses cheveux, les vestiges de sa tentative de fuite.  Le marquis ne pensait pas pouvoir le trouver plus pittoresque qu'il ne l'était déjà.

Andrew s'agenouilla pour se mettre à la hauteur du garçon. Lorsqu'il défit son bandeau et que leurs regards se croisèrent, les tremblements du palefrenier reprirent de plus belle. Le marquis qui d'ordinaire, prenait un malin plaisir à terroriser ceux qui lui avaient désobéi, se surpris à être agacé par la réaction du garçon.

-Quelle triste spectacle. Je t'avais pourtant bien dit que tu ne pouvais m'échapper.

Peter ne répondit pas au marquis, ulcéré d'avoir été attrapé par les gardes et d'être à nouveau à sa merci. Son regard était braqué sur le sol, il se mordait la lèvre jusqu'au sang pour ne pas fondre en sanglots, voulant s'épargner davantage humiliation. Le marquis leva sa main en direction du visage de Peter qui par instinct, ferma les yeux pour ne pas voir le coup venir. Mais le noble ne le frappa pas, il caressa délicatement la joue du palefrenier, ses doigts glissèrent jusqu'à ses lèvres. Peter était déconcerté par le geste d'une délicatesse insoupçonnée de la part du marquis.

Andrew exerça une pression sur la petite plaie à vif située à la comissure de la lèvre supérieure du garçon, lui arrachant une grimace de douleur.

-Vous l'avez abimé.

Le ton glacial du noble laissait entrevoir un agacement palpable. L'un des gardes balbutia des excuses, mal à l'aise.

-Oui je suis désolé, Maître, mais ce cul-terreux se débattait comme un diable.

Andrew ignora la réponse du garde, ses yeux  ne quittaient pas le jeune palefrenier qui se refusait à le regarder, le corps pris de soubresauts.

-Qui lui a ouvert la porte ?

-Une servante nous a rapporté avoir vu une domestique errer dans les alentours avant sa fuite. Mary Shelley.

Le marquis fit craquer sa nuque de chaque côté, sa colère boullionnant dangereusement, tel un volcan en éruption.

-Très bien. Amenez-moi cette catin que je lui fasse trancher la gorge.

Les mots du marquis résonnèrent au fond des entrailles du palefrenier. Peter releva pour la première fois la tête, ses yeux bleus exhorbités par la panique.

-Non ! Hurla-t-il, Non Monseigneur ! C'est un mensonge, Mademoiselle Shelley n'y est pour rien ! Je ne suis le seul et unique responsable de cet affront envers vous.

Andrew perdit le peu de sang-froid qu'il lui restait face à la réaction du du palefrenier. Il le saisit violemment par la machoire avant de planter son regard dans le sien.

-Regarde-toi, tu es pétrifié par la peur, tel un agneau sur le point d'être dévoré et tu as encore la force de me mentir pour protéger ton amie. Est-ce que ton Dieu a-t-il omis de te donner un instinct de survie ?

Andrew lacha brutalement le garçon qui s'écroula sur le sol glacial en pierres. Le marquis se redressa avant de s'adresser à nouveau aux gardes.

-Ramenez la fille, immédiatement.

Les larmes finirent par couler le long des joues du palefrenier. L'idée que son amie se fasse exécuter par sa faute, lui briser l'âme. Peter lui avait promis qu'il ne lui arrivait rien, il devait tout faire pour sauver la malheureuse. Le garçon savait pertinnement que supplier le noble était vain, il n'avait pas la moindre empathie ni estime pour les gens du bas-peuple, leur vie n'avait aucune valeur à ses yeux.

Il était inutile de faire appel à des émotions qu'il ne pouvait même ressentir. La seule chance que Peter avait de sauver son amie était de stimuler l'unique chose qui animait le marquis, sa perversion.  Peter prit une profonde inspiration, avant de se relever à son tour pour affronter le noble.

-Monseigneur, je vous en prie, laissez-lui la vie sauve. Je ferai ce que vous souhaiterez.

Andrew rapporta son attention sur le palefrenier, un sourcil haussé, l'air intrigué.

-N'as-tu toujours pas compris que je faisais déjà ce que je voulais de toi ?

Peter se sentit terriblement humilié par cette cruelle vérité. Il ne se laissa pas pour autant déstabilisé.

-Oui Monseigneur, mais n'était-ce pas ma vertue que vous vouliez ? Le libre-arbitre Monseigneur, vous ne pourrez jamais l'obtenir par la force.

Le marquis observa le garçon longuement, il n'était plus en colère mais semblait plutôt amusé par la détermination du va-nu-pied. Andrew devait reconnaître qu'il était curieux de voir  à quoi ressemblera le visage du puritain pendant que ce dernier prendra plaisir à leur batifolage. Le voir pleurer et trembler à chaque fois qu'il était en sa présence, ne l'amusait pas autant qu'il l'aurait voulu. 

Le noble hésita un instant avant de finalement trancher.

-Très bien, puisque tu insites tant pour te faire besogner, je vais te donner ce que tu souhaites.

Les joues du palefrenier virent au carmin devant les paroles outrageuses du marquis. Sa honte s'intensifia lorsqu'il entendit les ricanements des gardes. Le marquis jetta un regard noir aux hommes qui se reprirent à la seconde.

-Livrez-le à Madame Vickrige, qu'il se fasse laver par des femmes et amenez-le dans ma chambre. Je le rejoindrai lorsque j'aurai salué mes derniers invités.

L'amant du Marquis Où les histoires vivent. Découvrez maintenant