Chapitre 3

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Andrew se réveilla, le visage enfoncé dans l'oreiller de soie, le goût amer du vin encore présent sur ses lèvres. La lumière du matin perçait à peine à travers les lourds rideaux de velours, éclairant les vestiges de la nuit passée. Autour de lui, le lit était en désordre, les draps éparpillés, et trois corps nus s'étiraient paresseusement sous les couvertures, deux femmes et un homme, tous endormis, ivres de plaisirs nocturnes.

Le sol de la chambre était jonché de bouteilles de vin vides, de vêtements éparpillés, et d'autres souvenirs de leurs excès. Andrew, nu, s'assit sur le bord du lit, sa tête tambourinant légèrement sous l'effet de l'alcool. La fête de la veille avait été un délice. Un instant, il sourit, satisfait de lui-même, avant qu'un bruit ne vienne troubler sa tranquillité.

On frappa à la porte. Trois coups secs. Une voix tremblante s'éleva derrière l'épaisse porte en bois.

-Monseigneur... Monseigneur Harrington !

Andrew tourna sa tête en direction de l'entrée, le visage fermé. Il se leva de son lit, si brutalement qu'un mal de tête le lança. Il enfila un peignoir de soi pour couvrir son corps sculpté avant d'ouvrir la porte.

Un vassal, raide comme un piquet, se tenait à l'entrée. Le visage de l'homme se figea de stupeur à la vue de la scène obscène qui se tenait derrière le Marquis.

Andrew le fixa froidement, agacé par ses regards indiscrets.

-Qu'est-ce que tu veux ? grogna-t-il, sa voix rauque trahissant les restes de sa nuit agitée.

Le domestique se ressaisit rapidement et se concentra à nouveau sur Andrew. Il hésita, son visage rougissant alors qu'il s'efforçait de regarder ailleurs que sur le lit.

-Votre mère, Monseigneur, la duchesse Marguaret Harrington, est arrivée. Elle vous attend dans le salon des invités.

Andrew pesta intérieurement. La seule personne au monde capable de ruiner une matinée déjà pénible. Il se passa une main dans les cheveux, irrité.

-Dis-lui d'attendre. J'ai mieux à faire que de m'occuper de ses états d'âme.

Le vassal tressaillit devant la brusquerie du noble envers la duchesse, mais n'eut guerre d'autres choix que d'acquiescer, prenant cela pour un ordre.

Il fit demi-tour, s'empressant de sortir de la pièce. Andrew se leva, attrapant un pantalon qui traînait au sol. Il n'avait aucune envie de voir sa mère ce matin, mais il savait qu'il ne pourrait pas l'éviter éternellement.

Il se vêtit sommairement, passant une chemise froissée avant de se diriger vers la porte. Ses compagnons d'une nuit n'étaient même pas encore réveillés.

Andrew descendit les escaliers de marbre du manoir, traversant le vaste hall aux murs décorés de portraits d'ancêtres austères. Son père, William Harrington, le regardait depuis l'un de ces tableaux avec une sévérité froide, rappelant à Andrew l'héritage qu'il portait, un poids qui l'étouffait chaque jour un peu plus.

Il poussa la porte du salon des invités, où l'attendait la duchesse Margaret Harrington. Elle se tenait droite dans une élégante robe sombre, son visage aussi impassible que la dernière fois qu'il l'avait vue. Andrew ne se souvenait pas du jour où il avait pu voir une quelconque expression sur ce visage glacial. Ses cheveux, encore d'un blond cendré bien que les années aient laissé quelques traces de gris, étaient tirés en arrière avec une précision militaire. Ses yeux, perçants et calculateurs, fixèrent Andrew dès son entrée dans la pièce.

-Vous voilà enfin, dit-elle sans même un sourire. Comment osez-vous vous présentez à moi dans cet accoutrement ?

Andrew ignora la remarque de sa mère, presque satisfait de la choquer encore un peu plus. Il s'avança, prit une chaise, et s'assit en face d'elle, l'air indifférent.

-Que me vaut ce plaisir, mère ? lança-t-il d'un ton sec.

Sa mère le dévisagea un moment, avec une pointe de mépris, avant de répondre.

-Je reviens tout juste de Londres, Andrew. Vous ne réalisez pas les efforts que je déploies pour maintenir le nom de cette famille dans la grâce auprès des aristocrates. Pendant que vous continuez à vous adonner à toutes ces perversités innommables. Je suis soulagée que votre père ne fasse plus partie de ce monde, il n'a plus à assister à ce spectacle pathétique.

Andrew soupira, se laissant tomber contre le dossier de la chaise. Le regard de sa mère le perçait, mais il n'en montrait rien. Les mots cinglants de la duchesse ne l'atteignaient plus depuis déjà de nombreuses années, sa mère n'avait jamais caché le mépris qu'elle ressentait pour son débauché de fils qu'elle ne voyait que comme une forme de nuisance et de honte pour la famille depuis son adolescence.

-Et bien mère, n'était-ce pas pour cette raison que père et vous, m'avaient envoyé en Crimée ? Faire de moi cet illustre héros de guerre ? N'ai-je donc pas participer à la grâce de cette famille ?

La duchesse pinça les lèvres, visiblement irritée par le manque de respect de son fils.

-Nous vous y avions envoyé pour que vous puissiez enfin faire preuve de discipline, que vous deveniez l'homme à la hauteur de votre statut, mais vous n'en êtes revenu que pire. Votre père, cinquième Duc d'AshFord n'est plu. Et les rumeurs vous concernant n'ont jamais autant fragilisé notre famille. Aujourd'hui, vous n'avez plus d'autres choix que d'enfin prendre vos responsabilités. Nous devons organiser au plus vite votre investiture et faire de vous, un Duc, digne de ce nom.

Andrew la fixa sans dire un mot, une vague de dégoût montant en lui. Chaque seconde passée en sa présence lui rappelait pourquoi il fuyait ce manoir et cette vie depuis des années.

-Et bien face à tous ces ragots, je me vois le devoir de les honorer, dit-il en se levant brusquement. Veuillez m'excusez Mère, mais je dois m'adonner à ma vie d'hédoniste. 

Il quitta la pièce sans un regard en arrière, laissant la duchesse seule, désabusée. Il sentait la colère monter en lui, cette même rage qui l'habitait depuis des années, un feu qu'il ne parvenait jamais à éteindre.

Andrew, comme à chaque fois qu'il souhaitait s'échapper, se dirigea en direction des écuries. 

L'amant du Marquis [EN RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant