𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 3

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✰ 𝐎𝐜𝐭𝐨𝐛𝐞𝐫 𝐒𝐤𝐲 - 𝐘𝐞𝐛𝐛𝐚 ✰

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✰ 𝐎𝐜𝐭𝐨𝐛𝐞𝐫 𝐒𝐤𝐲 - 𝐘𝐞𝐛𝐛𝐚 ✰

24 décembre,
Quelques années auparavant.

— Petite pute !

Une canette de bière m'éclate en plein visage avant que ma mère ne m'attrape brutalement par les cheveux.

— Maman ! s'écrie Judy depuis le fond de la pièce. Lâche-la !

Ma petite sœur, huit ans et demi, assiste une fois de plus à une scène de violence, impuissante face à notre mère ivre.

— LÂCHE-MOI ! hurle-je en me débattant.

Sa poigne est trop forte. La douleur m'arrache des larmes, mes cheveux sont tirés à m'en couper le souffle.

— Je t'avais demandé une seule chose, True ! crache-t-elle. Une seule ! Et t'es même pas foutue d'obéir !

Elle me relâche enfin. Je recule violemment, le regard brûlant de rage.

— Jeffrey n'en avait plus, maman ! tentai-je de me défendre.

— Jeffrey a toujours de la beuh. T'es qu'une petite menteuse.

Elle a toujours été une femme dure, dénuée de la moindre empathie, que ce soit pour ses filles ou pour quiconque, à vrai dire. La seule fois où elle s'intéressait à nous, c'était lorsqu'elle avait besoin de quelque chose. De nos services. Et je la haïssais pour ça. Pour cette façon qu'elle avait de nous traiter comme des outils, des choses interchangeables, sans la moindre valeur une fois qu'elle avait obtenu ce qu'elle voulait.
Quand elle me regardait, ce n'était jamais avec amour ou tendresse. Seulement avec attente. Exigence et mépris.
J'ai longtemps espéré qu'un jour, elle changerait. Qu'elle verrait en nous autre chose que des moyens d'arriver à ses fins. Mais ce jour n'est jamais venu.

Alors j'ai arrêté d'attendre.

Elle me toise avec dédain avant de s'affaler sur le canapé, attrapant une autre bière sur la table basse.
Judy, paniquée, court vers moi et se cache derrière mes jambes.

— Ma souris... Je chuchote en m'accourissant à côté d'elle. On va jouer à cache-cache, d'accord ? Comme d'habitude.

Ses yeux bleus, noyés de larmes, me fixent en tremblant. Je suis si désolée de ne pas être la grande sœur qu'elle mérite. De ne pas pouvoir la préserver de notre propre mère et de ses vices.

Je l'embrasse sur le front et lui murmure de courir, que je vais commencer à compter.
Elle s'éclipse dans le couloir.

— 1... 2... 3...

Ma mère me jette un regard en coin, un sourire tordu aux lèvres.

— Adam et un de ses collègues viennent ce soir. Tu mettras la tenue que je t'ai donnée et tu la boucleras. Pas comme la dernière fois, ajoute-t-elle en sirotant sa bière. Les voisins ont frappé plusieurs fois à la porte, crache-t-elle.

— 8... 9... 10...

— Assure-toi qu'ils t'entendent bien jouir, je veux mes pourboires.

Mon cœur cogne tandis que je m'approche lentement.

14... 15... 16...

Elle détourne les yeux et balance d'une voix glaciale :

— Passe-moi la télécommande et va te raser.

Je fixe la télé, mais mon regard capte un bougeoir en métal sur la table à manger. D'un pas discret, je le saisis et le cache derrière mon dos.

Je reprends mon compte d'une voix plus élevée cette fois-ci,  pour que Judy puisse m'entende.

17... 18... 19...

Ma mère ne fait même plus attention à moi.
Avant qu'elle ne réagisse, j'écrase de toutes mes forces le bougeoir sur son crâne. Sa réaction est immédiate et son cri transperce l'air.

Je frappe à nouveau. La seconde fois la fait vaciller.

20 ! hurle-je.

Les pas précipités de Judy résonnent vers la porte d'entrée.
Je baisse les yeux sur ma mère. Inconsciente. Un filet de sang coule de son arcade sourcilière.
Elle s'en remettra.

Les parasites ne meurent jamais.

Je lui crache dessus.

— T'as qu'à jouir pour eux toi-même, maman.

Je fouille son sac et prends son portefeuille avant de claquer la porte derrière moi.

Dehors, Judy m'attend, emmitouflée dans son manteau. Elle porte un bonnet en laine couvrant ses boucles rousses. Son petit nez est rougi par le froid de décembre.

Je frissonne. Je n'ai rien pour me réchauffer.

— Tiens, me dit-elle en tendant une écharpe. Je te l'ai prise avant de sortir !

Je la prends et embrasse sa joue.

— Merci, ma souris. On y va.

La neige crisse sous nos pas tandis que nous avançons, le froid mordant nos joues. Le silence de la nuit est seulement troublé par le grondement du bus qui nous emmène vers le centre-ville de Minneapolis.

Dans le bus, une jolie mélodie s'échappe des haut-parleurs, douce et apaisante. Judy, fatiguée, laisse échapper un soupir avant de poser sa tête contre mon épaule. Je sens son petit corps se détendre contre moi, et sans un mot, je serre doucement sa main dans la mienne. Ce moment me paraît durer une éternité, et pourtant, j'aimerais qu'il dure encore plus longtemps.

Devant une jolie maison, je dis à Judy de sonner.
La porte s'ouvre sur un homme d'âge mature, portant un gros pull de Noël. Une douce odeur s'échappe de la maison et je peux presque entendre le ventre de ma petite sœur gargouiller d'envie.

— Oh, voilà deux petits lutins ! sourit l'homme chaleureusement.

Il prend Judy dans ses bras, et elle s'y love aussitôt.

— Bonsoir, Mr Carter, répond-elle d'une voix douce et sucrée.

— Va te réchauffer, ma puce, je t'attendais pour finir le dessert !

Judy se retourne vers moi, demandant ma permission. Je hoche la tête. Elle s'essuie les pieds sur le paillasson et disparaît à l'intérieur.

Franck me fixe.

— Joyeux Noël, dis-je, tentant un sourire sincère.

Son regard s'adoucit. Il m'attire dans une étreinte inattendue.
Je reste figée, puis craque, enfouissant mon visage dans son pull moelleux.

— Désolée, Francky... On a oublié les cadeaux...

— C'est vous, notre cadeau, murmure-t-il en me serrant plus fort.

Il me relâche doucement, une main réconfortante posée sur ma joue.

— Allez, entre avant d'attraper froid. Lauren doit être dans le salon.

UNTRUTHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant