Fragments d'Enfance

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Assise sur ma chaise de cuisine, je me laisse emporter par la voix envoûtante de Naïma D'Ziria, cette chanteuse algérienne que j'ai découverte par hasard, grâce à lui. Avant, je ne connaissais rien à ce monde musical. Avec lui, j'ai appris à aimer la chanson algérienne, à connaître des artistes comme El Anka, Dahmane El Harrachi. Des musiques qui ne m'avaient jamais vraiment touchée quand j'étais jeune, moi qui écoutais plutôt Britney Spears, les Spice Girls, 2Be3 — des sons qui faisaient vibrer mon cœur d'enfant des années 90. C'était une époque où la musique m'offrait une évasion simple et douce, loin de ce qui se fait aujourd'hui, où tant de morceaux me semblent dépourvus de sens et de sincérité.

Quand j'écoute maintenant Naïma D'Ziria, sa chanson « Maknine Ezzine » réveille des souvenirs de mon père, dansant au rythme du chaâbi, de la variété française ou de Barry White. Je le revois, quand j'avais sept ans, prendre ma mère dans ses bras sur « Let the Music Play ». Cette scène me rappelle celle du film Attrape-moi si tu peux, où les parents de Leonardo DiCaprio dansent ensemble, insouciants et légers. C'était, pour moi, un rare moment de bonheur partagé, la seule fois où j'ai vu ma mère radieuse et mon père sincèrement proche d'elle. Toutes les autres fois, la danse n'existait que dans les cris et le chagrin.

Je me revois, allongée à plat ventre sur un matelas, mes mains sous mon menton, les pieds dans le vide, bercée par cet instant. J'étais une enfant, si heureuse dans cet instant figé, si insouciante. Pourtant, même à six ans, je connaissais déjà trop bien la souffrance ; aucun enfant ne devrait connaître cela. J'avais entendu, vu, et supporté tant de choses que je n'aurais jamais dû porter. Mon Dieu, si j'avais su ce qui m'attendait.. Je me demande souvent ce qu'aurait été ma vie si j'étais restée là-bas, dans ce pays où je suis née et qui m'a tant marqué.

Pourtant, même au milieu de ce chaos, il y avait des instants de paix. Parfois, je m'asseyais seule sur les marches de la cour familiale, le regard perdu dans un ciel étoilé. Dans mon innocence, je murmurais des mots au ciel , sans comprendre que c'étaient des invocations, des appels sincères, des vœux d'enfant pour quitter ce pays, pour rejoindre cette autre vie que j'imaginais en Europe, avec ma famille.

Il y avait des souvenirs tendres malgré tout, mais mon esprit restait tourmenté par l'inquiétude pour ma mère. À cet âge-là, mon cœur ne connaissait jamais la tranquillité. J'espérais qu'elle dorme bien, qu'elle soit en sécurité, qu'elle ait une couverture, un oreiller. Je me demandais si quelqu'un s'occupait d'elle, ou si, comme toujours, elle étouffait ses sanglots dans la nuit...

Écrire tout cela me serre le cœur, me replonge dans ce passé douloureux. Mais je ressens le besoin de laisser une trace, de raconter cette histoire, pour ne pas l'oublier. Alors, repartons depuis le début, car je crois qu'il est temps de me présenter.

« Tu grandiras, tu oublieras. »Where stories live. Discover now