Je me suis toujours promis que je bâtirais une grande carrière, indépendante et fière. Élevée dans une famille aux allures paradoxales, entre bourgeoisie et mentalité ouvrière, je me répétais cette promesse chaque fois qu'on me réduisait au simple fait d'être "une fille" et non un homme, comme mon grand frère.
Aujourd'hui, c'est mon premier jour dans cette entreprise. Ce n'est pas vraiment le job de mes rêves, mais après des mois de recherches infructueuses et des finances en chute libre, je ne suis pas en position de faire la difficile. En me réveillant ce matin, la boule au ventre est bien présente, mais je me remémore mon week-end à Lyon avec Lucie, ma meilleure amie. Un rêve éveillé : nous sommes allées pour la deuxième fois au concert de Taylor Swift ! Deux adolescentes en extase... j'en ai même perdu la voix.
Travailler à Paris, c'est aussi accepter de s'entasser dans les transports en commun, entourée de milliers d'autres âmes, chaque matin et chaque soir. Et c'est accepter aussi les odeurs corporelles de ceux qui ont visiblement zappé la douche ou la brosse à dents. En plein mois de juin, avec cette chaleur étouffante, c'est encore pire.
Je dois être au bureau à 9 h. Bien sûr, je suis déjà en retard... Lorsque j'arrive, je rencontre enfin les membres de mon équipe. Ils ont l'air sympa, mais ce que je remarque surtout, ce sont ces yeux bleus perçants, auxquels je ne reste pas insensible.
La journée se passe plutôt bien. À peine arrivée, on m'a déjà cataloguée comme une "swiftie". J'imagine que ça ne surprend personne, avec mon tote bag The Eras Tour en guise de sac à main pour mon premier jour ! Pour l'instant, je n'ai pas de bureau; je me contente des bureaux vacants de l'open space en attendant le mien. J'ai hâte de le décorer, de l'aménager à mon goût, pour me créer un espace où je me sentirai chez moi.
Ces derniers mois n'ont pas été faciles. Burn-out, fin d'études, recherche d'emploi, rupture... En toute honnêteté, je commence à me dire que les hommes ne sont tout simplement pas faits pour moi. Pourtant, à mon grand malheur, ils continuent de m'attirer... Après trois ans de thérapie, j'avais enfin décidé de refaire confiance à quelqu'un, et il a fini par me décevoir comme les autres. Anna, à quel moment comprendras-tu que tu ne peux pas offrir aussi vite ta confiance, et surtout ton cœur, à un homme ?
Je rêve de vivre une relation passionnée, une histoire où je pourrais aussi tirer les ficelles. Une relation brûlante, intense, comme celles qu'on ne rencontre que dans les romans ou les films. Mais dans la vraie vie, ça semble plus compliqué...
Ses premiers mots à mon égard ont été : « Oh non, t'es une Swiftie toi aussi... » Je ne vais pas vous mentir, je n'ai pas compris tout de suite sa remarque, ayant oublié mon tote bag et mes bracelets d'amitié au poignet. C'est en me désignant mes poignets qu'il m'a précisé :
« Tes bracelets et ton tote bag. Ce serait étrange de porter tout ça si t'étais pas fan. »
Je reste interloquée. Pour quelqu'un qui parle avec autant de dédain, il connaît pourtant bien les accessoires de notre fandom. Étais-je encore trop dans l'euphorie du week-end pour avoir affiché si ouvertement mon côté Swiftie ? Devant cette équipe, majoritairement masculine et plus âgée que moi, je voulais inspirer maturité et professionnalisme. Mais voilà que tout semblait s'écrouler après cette première impression.
Il est beau, en effet, mais qu'est-ce qu'il est insupportable de me faire ça dès mon premier jour. Pourquoi est-ce si honteux pour certains d'aimer Taylor Swift ? Un simple « Ah, tu étais au concert ce week-end, c'était bien ? » aurait suffi.
Alors, comment vous décrire Léo ? Des yeux bleu intense, un bleu à s'y perdre. Environ 1,85 mètre, cheveux bruns très foncés, parsemés de quelques fils d'argent qui forment de légères boucles. Il est ni maigre ni trop musclé. Une cicatrice marque son front (s'est-il battu ? Est-il tombé enfant ?), il a un grain de beauté sur le nez et une belle barbe sombre. Il me rappelle un acteur sur lequel je crushais adolescente. Est-ce que je suis en train de craquer sur le mec qui vient de me mettre mal à l'aise devant tout le monde ? Oui, il est canon, mais tellement prétentieux. On m'a toujours dit de me méfier des hommes beaux qui savent qu'ils le sont ; il coche les deux cases. Alors, prudence...
La semaine est passée vite. Le vendredi soir, quelques collègues décident d'aller boire un verre après le travail. Essayant de bien respecter mes horaires, je reste en silence devant mon PC, à me trouver de quoi m'occuper.
« Tu veux venir boire un verre avec nous ? » me demande Léo en me regardant fixement, ses yeux...
« Oui, peut-être... mais je n'ai pas encore fait toutes mes heures, alors je dois rester un peu. »
Avec un sourire et un regard pétillant, il me répond : « Tu sais, Anna, tu n'es pas obligée de respecter tes horaires à la lettre. T'es cadre. Tes heures, tu les gères sur la semaine. Allez, viens ! »
Encore une fois, je me suis comportée comme une junior qui suit le règlement au pied de la lettre... Je ne suis plus stagiaire. La honte.
La soirée se passe bien. Il me plaît physiquement, mais je le trouve d'un condescendant ! Il me rappelle notre écart d'âge, comme quoi nous avons sept ans de différence, qu'il a plus d'expérience pro que moi, et que j'ai surtout eu beaucoup de chance d'obtenir ce poste. Pourtant, il semble aussi apprécier mon répondant et ma détermination, mes avis tranchés et mon caractère bien affirmé. La discussion prend un tour plus léger, et on commence à échanger sur nos vies et nos opinions. Parfois, il est insupportable de prétention, mais étrangement, ce trait-là aussi semble bien aller avec son physique.
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When rivalry fades
RomanceÀ 27 ans, Anna débute sa carrière comme cheffe de projet dans une équipe dominée par des hommes. Déterminée à s'imposer, elle se heurte rapidement à Léo, un collègue aussi brillant qu'insupportablement condescendant. Ses remarques et son attitude ar...