La première choses que j'ai appris dans la vie, c'est à me taire.
On n'a pas le droit de crier quand on souffre, ni quand on a mal. On n'a jamais le droit de parler, de manifester, de se révolter. Chez moi, c'était un règne silencieux de peur et de soumission. Mon beau-père, un tyran silencieux, et ma mère, une ombre, perdue dans son silence. Elle m'a oubliée depuis longtemps. Elle n'a jamais vu les traces sur ma peau, ni l'angoisse dans mes yeux. Mon père, je ne l'ai jamais connu. Il n'a jamais été là pour moi. Je ne sais même pas pourquoi j'attendais quelque chose de lui, pourquoi je m'accrochais encore à l'idée qu'un jour il pourrait venir me chercher, m'arracher de ce cauchemar. Mais non. Il ne viendra pas. Personne ne viendra.Le collège n'a pas été une délivrance. C'était à peine plus qu'un autre type de guerre. Les rires des autres, leurs regards fuyants, leur indifférence glacée. C'était ma réalité pendant des années. Chaque jour, j'essayais juste de me fondre dans la masse, de devenir invisible. Parce que dans ce monde, si on se montrait, on souffrait. J'avais appris à me cacher, à me faire oublier, à étouffer ce qui bouillonnait en moi. J'avais appris à survivre.
Mais tout a changé le jour où Zane est arrivé.
Je l'ai remarqué dès la première minute où il est entré dans la salle. Il ne correspond à aucun autre professeur. Il avait quelque chose d'indescriptible, une truc qui flottait autour de lui, comme une aura, une présence qui vous oblige à lever les yeux. Il n'avait même pas besoin de parler pour imposer le silence. Il me déstabilisait. Et je le sentais... il me regardait. Pas de la manière qu'un professeur regarde ses élèves, non. Lui, il avait l'air de chercher quelque chose en moi. De chercher à voir au-delà de ce que j'étais prêt à montrer.Je me suis vite rendu compte qu'il n'était pas là par hasard. Que tout ce qu'il faisait, tout ce qu'il disait, était calculé. Il ne voulait pas juste m'enseigner l'histoire ; il voulait que je me déstabilise. C'était presque palpable, cette tension entre nous, comme une corde tendue prête à casser. Je ne savais pas ce qu'il cherchait, mais je le sentais. Et il m'effrayait. Parce que, contrairement à tout ce que j'avais appris, il n'y avait rien de prévisible chez lui.
J'ai essayé de l'ignorer. Mais il n'était pas du genre à se laisser ignorer.
Il m'a prise au piège, sans que je m'en rende compte. Je n'étais même plus capable de distinguer où se trouvait la réalité et où commençait le piège. Ses regards furtifs, ses questions étranges, ses silences chargés de sous-entendus... tout cela m'a attirée, comme un insecte vers la lumière. Je savais qu'il cachait quelque chose, quelque chose de sombre, mais ça ne m'a pas empêchée de m'en approcher.Et un jour, il m'a posé cette question.
Une question lourde de sens, un poids sur ma poitrine.
"Si je pars, tu me suis, Amore ?"J'ai voulu lui répondre, mais les mots se sont coincés dans ma gorge. C'était comme si cette question était le début d'un piège dont je ne pourrais jamais sortir. Parce qu'au fond, je savais que la réponse n'était pas aussi simple. Si je le suivais, je ne serais plus jamais la même. Et pourtant, une partie de moi, la plus sombre, la plus perdue, se sentait attirée. J'avais toujours cru qu'il y avait quelque chose de plus pour moi, quelque chose au-delà de ce que j'avais vécu jusque-là. Et Zane... il était cette promesse d'autre chose.
Mais qui était-il réellement ? Et pourquoi moi ?
Je devais savoir. Je devais comprendre. Même si ça signifiait plonger dans l'inconnu, m'enfoncer dans ce vide qui m'attirait autant qu'il me terrifiait.Alors, j'ai fait un choix.
Je ne pouvais pas revenir en arrière. Et je savais que je n'étais pas prête pour ce qui allait suivre. Mais peu importe. À ce moment précis, j'avais déjà franchi la ligne.
Et il n'y avait plus de retour.
YOU ARE READING
MANO MORTA
RomanceMorta a grandi dans un environnement difficile. Son beau-père est violent, son père est inconnu, et sa mère est totalement soumise à son mari, négligeant totalement sa fille. Depuis ses années au collège, Morta vit un véritable cauchemar, où chaque...