Chapitre 4

13 2 0
                                    


Je reprends le chemin en sens inverse, incapable de résister à l'envie de m'arrêter pour humer le doux parfum des fleurs que j'aime tant. Cela me fait perdre un temps considérable, mais je savoure chaque instant.

En avançant, je me rappelle les punitions de nos parents lorsqu'on ignorait volontairement le son de la cloche : nous étions de corvée de vaisselle. Et, croyez-moi, faire la vaisselle pour une famille de sept personnes, c'était un sacré moment passé les mains dans l'eau.

En arrivant dans la cuisine, je croise les regards malicieux des jumeaux. Ils vivent tous deux à quelques rues de mon appartement à Paris. Nos écoles étaient dans le même quartier. Eux ont intégré de grandes écoles de commerce, tandis que moi, je suis devenue sommelière, diplômée d'une des meilleures écoles du domaine.

Mon père espérait que je reviendrais travailler sur le domaine familial après mes études, mais j'ai préféré tracer ma propre voie. Revenir ici m'était trop difficile.

Je suis resté proche d'Hugo et Sam, les jumeaux, que je surnomme "Peine et Panique" en hommage à notre dessin animé préféré, Hercule .

Je n'oublierai jamais cette conversation où j'ai fini par leur révéler un secret qui devenait lourd à porter. Ils m'avaient "cuisinée" pendant des semaines, jusqu'à me faire craquer et tout avouer.

Leur réaction m'avait beaucoup inquiétée, et j'appréhendais ce qu'ils allaient en penser. Mais, contre toute attente, ils furent soulagés ! Ils avaient même peur, un moment, que je finisse vieille fille sur le domaine, ce qui m'avait fait beaucoup rire.

Perdue dans mes pensées, j'en sors lorsque Sam passe un bras autour de mes épaules et me murmure de me détendre. Avec un sourire complice, il me pousse gentiment vers la salle à manger, où la table est déjà élégamment dressée pour ce soir. Je m'arrête un instant, repensant à ce que j'ai soigneusement apporté dans mes bagages pour cette occasion spéciale.

- Attendez ! Je dois aller chercher quelque chose dans mes bagages.

Tous les regards se tournent vers moi tandis que je monte l'escalier à toute vitesse. J'ouvre l'armoire et en sors une magnifique bouteille.

Un Romanée-Conti de Bourgogne. Un pinot noir, l'un des vins les plus emblématiques et rares au monde. Sa complexité est unique, avec des arômes subtils de fruits rouges et d'épices. Sa renommée repose sur la qualité exceptionnelle de son terroir et une production extrêmement limitée. Plus la bouteille est ancienne, plus sa rareté et sa valeur augmentent. Celle que je tiens entre mes mains est un millésime 2000, une année d'exception pour ce vin.

Je l'ai acquis lors d'une vente aux enchères il y a quelques années, un véritable trésor qui m'a coûté mes économies, soit dix milles euros, une partie de l'héritage de ma mère. Je l'ai précieusement conservé en attendant l'occasion parfaite pour l'ouverture, entourée de proches. Joshua aurait voulu qu'on la déguste ensemble, mais aujourd'hui, je préfère la partager avec mon père et mes frères.

Je descends lentement les escaliers, la bouteille en main, perdue dans mes pensées. Je relève la tête, soudain frappé par un silence surprenant : tous les regards sont tournés vers moi. Je jette un coup d'œil à la table et remarque qu'une place est restée vacante, à la droite de mon père, en face d'Alexandre. Instinctivement, mes mains se resserrent autour de la bouteille, mais le regard bienveillant de Sam et Hugo m'encourage à avancer.

Je pose la bouteille devant mon père, attendant sa réaction. Il la prend entre ses mains et ouvre la bouche, mais aucun mot n'en sort. C'est Alexandre qui brise le silence, l'air stupéfait.

- Léna ! Mais... c'est un Romanée-Conti ! Tu te rends compte de la valeur de cette bouteille, n'est-ce pas ? Oui, évidemment que tu le sais... Mais comment as-tu pu te la procurer ?

Arôme InterditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant