I just wanna know if you gonna stay

Chapitre 7: Comment ne pas penser à lui?

J'entends au loin le réveil sonner. La nuit n'a pas été très longue. J'en ai passé une bonne partie au studio. J'ai dû prendre le taxi vers 5h30 du matin. J'ai dormi chez mes parents, ça fait d'ailleurs bien longtemps que je ne suis pas retournée dans mon petit appartement à Cannes. Quand je suis entrée au château, Élise partageait la coloc avec Camille qui a pris ma chambre pour leur dernière année. Et ça y est, elles sont maintenant diplômées. Je me surprends à moitié à être nostalgique en pensant que je n'y mettrai sûrement plus jamais les pieds. Je repense alors à toutes nos soirées, nos moments de folie et nos nombreuses discussions perdues dans le tourbillon des émotions de la vie. Je saisis alors mon carnet posé sur ma table de nuit. Je prends mon stylo, j'écris la date et l'heure à laquelle je m'apprête à poursuivre le récit de mes pensées et de mes états d'âme. Sur la page de gauche, quelques lignes complètent la dernière fois où j'ai écrit dans ce carnet.

Samedi 30 décembre 2023_1h15
Je suis encore nommée. Cette nouvelle nomination a une saveur différente, je n'ai plus la même appréhension que la première fois et moins d'espoir que la dernière. Cette fois-ci je suis face à Djebril. La nouvelle a été difficile à accepter. J'ai beaucoup pleuré. C'est soit lui soit moi et dans tous les cas j'aurai le cœur déchiré. J'écris ces quelques mots en revenant des répétitions sur le plateau. Dans quelques heures mon aventure à Dammaries-les-Lys risque de se terminer une nouvelle fois. Je vais tout donner pour remercier le public qui me soutient depuis tant de semaines maintenant, mais aussi pour mes proches et pour moi. Je ne veux pas avoir de regret, si je pars, je veux être fière de ma prestation. Le point positif de tout ça, c'est que je suis certaine de faire la tournée et en cela j'ai déjà atteint l'un des plus grands objectifs que je me suis fixés le 4 novembre dernier. J'écris en direct de la salle de bain, là où les lumières sont encore allumées. Ils et elles sont tous et toutes parti.es se coucher. Je me répète sûrement mais je suis aussi tellement heureuse de m'être fait ces ami.es. C'est souvent que je me questionne... Comment je faisais pour me sentir véritablement moi-même avant de les connaître? Je ne me vois plus faire ma vie sans qu'iels y prennent une place particulière. Même si je....

Ps: Candice sois fière de ton parcours et du chemin que tu as réussi à parcourir malgré les embûches et tu sais combien il y en a eu. Ce qui est sûr c'est que moi je suis fière de toi Caaanndice.
Ton duo préféré

J'ai les yeux humides. Je me souviens de ce que je ressentais à ce moment-là. J'étais bien loin de m'imaginer ce qui m'attendait dehors. Et puis, je me souviens que mon écriture au fil de la plume a été interrompue par le seul et l'unique gagnant de la saison. Il m'avait rejoint dans la salle de bain pour me réconforter. Comme à son habitude, il a trouvé les mots justes pour me rassurer et m'apaiser, le temps de m'endormir. Avant que nous retournions nous coucher, il avait tenu à écrire un petit mot dans mon carnet.
Depuis ce fameux jour qui a signé la fin de mon aventure dans les rangs de la promo 2023 du programme phare de TF1, je n'ai pas pris le temps de noter tout ce qui s'est passé. À vrai dire, je n'ai pas vraiment eu de moments de répit. Je n'ai pas pu me reposer tout de suite. Le soir même, j'ai dormi à l'hôtel à côté du studio 217. Puis, les trois jours qui ont suivi, j'ai enchaîné les interviews pour différents médias : le plateau de Quotidien, l'interview avec Alix, d'autres rencontres pour des médias papiers. Tout est allé à une vitesse folle. Puis, je suis rentrée chez mes parents où j'ai pu retrouver ma sœur et mes ami·es proches. Je laisse quelques pages vides en me promettant d'y revenir dans très peu de temps pour y noter comment j'ai vécu la sortie, les messages sur les réseaux et la soudaine visibilité que mon parcours m'a offerte.

Je suis en pleine écriture quand mon téléphone vibre sur mon bureau et me sort de mes souvenirs. Je vois s'afficher un message de Julien.

Mon frère
Cancan, tu arrives à quelle heure?
Je suis encore dans le train, j'en ai plus pour longtemps, je devrai arriver d'ici une heure le temps d'arriver et de prendre le taxi pour rejoindre le lieu de rendez-vous. Ah oui et en passant, il me tarde trop de revoir ta petite tête.

Au même moment, l'alarme de mon téléphone sonne. C'est l'heure de faire un dernier bisou à tout le monde avant de reprendre la route pour dix dates cette fois-ci. Ça promet d'être intense. Des doublettes nous attendent à Lille et à Bruxelles. C'est toujours compliqué d'enchaîner deux dates dans la même journée, mais souvent, le public nous le rend bien. Et puis, c'est une garantie de bien dormir le soir, même si on est dans le tour bus. Je jette mon carnet dans mon sac à main, ma valise m'attend déjà en bas des escaliers. Après avoir dit au revoir à tout le monde, je descends les quelques marches qui séparent la porte d'entrée de l'allée, je ferme le portillon derrière moi et je réponds au message de Ju.
J'attends la voiture dans ma petite rue avec impatience. Il me tarde tellement de tous·tes les retrouver et de continuer à réaliser mon rêve. Je grimpe à l'intérieur de la voiture en faisant un petit saut, je ne peux pas cacher mon enthousiasme. En arrivant au bout du lotissement, le chauffeur Uber me demande si je souhaite mettre ma playlist.

— Non merci, on peut laisser la vôtre.
— D'accord, ça marche.

J'aime bien découvrir la playlist d'inconnus, je me dis que c'est toujours une occasion de découvrir des chansons et des artistes que je ne connais pas forcément. Et puis, il faut dire que pendant deux mois, j'ai été coupée du monde, donc c'est une occasion en plus de rattraper mon retard. Je souris en croisant le regard du chauffeur dans le rétroviseur, j'aurais pu la faire moi-même, cette playlist. Je connais chacune des musiques qui passent depuis que nous avons commencé le trajet. L'application affiche 35 minutes de trajet restant. Nous nous retrouvons tous et toutes devant un hôtel parisien pour poursuivre la tournée. Nous avons eu seulement trois jours de pause. Nous enchaînons les dates. Le rythme est assez intense, mais nous sommes de plus en plus à l'aise sur scène et avec le public. Nous ne sommes qu'au début de la tournée, nous n'avons fait à peine qu'un quart des dates prévues. Je révise les paroles des chansons de la tournée quand tout à coup, j'entends ces quelques notes que je pourrais reconnaître même si elles étaient jouées dans le murmure d'une conversation à laquelle je ne suis pas conviée.

"You don't know babe,
When you hold me,
And kiss me slowly,
It's the sweetest thing..."

Cette chanson me transporte instantanément dans le salon, moi en tailleur sur le canapé vert et lui à la guitare. C'était le premier duo d'une longue série. La chanson se poursuit.
"No matter how far,
If life is a movie,
Then you're the best part, oh
You're the best part."

Après tout ce que nous avons partagé, comment ne pas penser à lui ?