Chapitre 4

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Quelle conne ! 

Je suis sortie de la voiture sans réfléchir, et je me retrouve seule dans la rue à la nuit tombée. C'est pour ça qu'ils m'ont laissée sortir sans rien dire. Parce qu'ils savaient que j'avais encore oublié l'heure. Je n'arrive pas à me faire à ce nouveau rythme : on dort jusque tard dans la journée et on se lève en fin d'après-midi pour profiter au maximum de la nuit. Benedict supporte la lumière du jour si les nuages masquent le soleil, s'il pleut par exemple. Mais autant que possible on évite de bouger en journée. Je suis constamment décalée, de mauvaise humeur parce que je ne vois pas assez la lumière du jour. J'ai commencé à comprendre que les humains ne sont pas faits pour vivre la nuit. J'ai déjà mauvais caractère à la base, mais là c'est pire. Tous les jours, j'ère dans la maison de Benedict à la recherche de quelqu'un à engueuler. Tout le monde m'évite. Sauf lui, quand il a faim. Il se nourrit tous les jours. Il sait exactement ce que je ressens, c'est la magie du sang. Et à chaque fois il ne manque pas de me faire une réflexion sur mon caractère. Je déteste ces moments. Cette intimité que je ne désire pas, la douleur, la dispute qui suit invariablement, sont pourtant les seuls instants qui troublent mon ennui. Parce que je n'écris plus, je ne compose plus. Je ne sors presque plus. Déprimée, et peut-être bien à deux doigts de la dépression, je ne ressemble plus qu'à l'ombre de moi-même. Cette situation ne peut pas durer. 

Il faut que je m'en aille. Que je m'échappe de son influence. En y réfléchissant, c'est pratiquement la première fois que je sors depuis le contrat. J'ai passé pratiquement deux semaines enfermées dans une maison que je déteste. Pas étonnant que mon moral soit au plus bas. Je presse le pas et réfléchis. Où est-ce que je pourrais aller ? Dans un hôtel ? Je dois tirer de l'argent au plus vite et abandonner ma carte bleue, comme dans les films ? Et mon téléphone portable ? 

Je ne suis pas faite pour ce genre de situation. Je vais d'abord boire un verre et réfléchir tranquillement à la meilleure façon de m'enfuir. Je regarde autours de moi. Il y a un troquet un peu miteux sur le trottoir d'en face. Je m'y engouffre et commande une bouteille de champagne en m'installant. Les clients, des vieux piliers de comptoirs pour la plupart, me regardent de travers. Certains, l'œil brillant, s'apprêtent à m'adresser la parole. Je les foudroie tous du regard. J'entends quelques rires, une ou deux insultes, mais je m'en fiche. 
Le serveur me rapporte la bouteille et me fait régler immédiatement. Visiblement, cet imbécile n'est pas capable de reconnaître des vêtements de marque. Il s'imagine quoi, que je vais partir sans payer ? Je balance la carte sur la table et descends ma coupe d'une traite le temps qu'il revienne avec la machine à CB. Les mecs rient, m'applaudissent. J'ai  mal choisi mon coin calme pour réfléchir. Je n'ai presque pas de liquide sur moi. Des vêtements pas vraiment discrets, un manteau trop léger pour la saison et aux pieds, des chaussures à talons aiguille. Je ne suis pas vraiment équipée pour partir à l'aventure. 

Deuxième coupe de champagne. Où est-ce que j'irai ? Je n'ai pas vu mes parents depuis des années. J'entretiens des relations superficielles avec les personnes que je croise. J'ai rompu avec mon petit copain du moment par texto, quand je me suis rendue compte que je ne pouvais pas justifier de l'abandonner toutes les nuits. Il était désespéré. Il avait vraiment besoin de moi pour booster sa carrière. Je soupire et me décide à l'appeler. "Julien ? C'est moi.
- Kimber ? ça va ? 
- Pas trop, non. Je peux passer chez toi ? 
- Euuuh, maintenant ? C'est pas vraiment le moment. 
- Ah.
- Bah c'est toi qui a voulu arrêter...
- Et quoi, je suis sensée te féliciter ? Elle te rapporte quoi, en terme d'image ? 
- Mais je l'aime ? 
- Ouai, toi tu l'aimes. Et tu sais combien de personnes m'aiment, moi ? 
- Quelle.... OK, je viens. T'es où ?
- Je t'envoie l'adresse par texto. Dépêche-toi."
Je raccroche sans lui laisser le temps de me raconter d'autres conneries. Je ne suis même pas certaine qu'il va venir. Un vrai gosse. Je n'arrive pas à me rappeler pourquoi je suis sortie avec lui. Etait-ce mon manager du moment qui me l'avait conseillé ? Je sais ce que lui avait à gagner dans cette histoire. Mais moi, c'est moins clair.
Je descends encore quelque verres de champagne, et la porte du bar s'ouvre finalement. Mais au lieu de voir Julien y entrer, c'est un homme d'une trentaine d'année que je découvre. Il cherche quelqu'un, m'aperçoit, et se dirige directement vers moi. Un peu pompette mais alerte, je cherche à me redresser pour ne pas lui montrer que j'ai peur. C'est un truc que j'ai appris avec Benedict : si je recule, il avance. Alors j'essaie d'occuper le maximum d'espace, seule, toute petite, sur cette banquette tachée. Je sais bien que je ne trompe personne. 

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 01, 2015 ⏰

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