Le lendemain est une longue journée. Je suis assise dans la rangée du milieu de la petite salle de classe et j'écris quatre lignes dans la marge de ma feuille de maths, ce qui n'a absolument aucun rapport avec ce que je suis sensée faire. Mon stylo s'écrase sur ma feuille, créant des mots à la place des nombres, malgré ma tentative de concentration sur ce que Monsieur Gummer dit. J'essaye de l'écouter. J'essaye vraiment. Mais c'est dur quand mon esprit est concentré sur le papier en face de moi. Sur les lignes, on peut y lire la pluie, l'ouragan, la perte, l'engagement...
En toute honnêteté, je n'ai aucune idée d'où viennent ces mots, sachant que je n'ai pas de petit-ami. J'ai eu des petits-amis durant mes années lycée, mais aucun d'entre eux n'a été inspirant. Tate Sanders était l'un d'eux. On est sorti ensemble environs deux semaines durant notre première année. Notre premier rendez-vous était le genre de rencard typique entre deux adolescents timides. On parlait de temps en temps, on s'est donné la main une fois et on a failli s'embrasser deux fois. Ma mère aimait me taquiner sur ma relation avec lui, ce qui m'a traumatisé. On s'est séparé d'un commun accord : nous nous sommes simplement passés une note pour se quitter en bon terme, si je me souviens bien.
Le deuxième était un garçon qui s'appelait Julio. Il a été ma plus longue relation, on est resté ensemble environs six mois. Mes parents l'aimaient beaucoup, et moi aussi. J'étais bouleversée quand il m'a quitté mais la raison pour laquelle je l'étais le plus était que je voulais être celle qui quitte l'autre. On ne se connaissait pas beaucoup quand on a commencé à sortir ensemble, mais je pense que c'est ce que tous les gens de mon âge font : ils veulent quelqu'un car ils voient leurs amis se mettre en couple et parce que dans les séries TV, les jeunes sont tous en couples et font des trucs cool. Mais les problèmes qu'engrangent une relation ne valent pas le coup. Reese, son ancienne petite-amie (qui est l'une des filles les plus méchantes de ma promo), ne le lâchait pas. Je n'aimais pas assez Julio pour supporter ça. La plupart du temps, je ne m'implique pas beaucoup : je préfère passer du temps sur les réseaux sociaux ou à écrire que de me chamailler avec d'autres filles qui cherche l'attention d'un mec.
Je continue de penser à tout ça jusqu'à ce que la sonnerie retentisse. Je pars rejoindre Crane devant son casier. Quand Crane a eu son premier petit-ami, elle n'arrêtait pas de me dire que c'était génial d'être en couple. Avoir quelqu'un d'autre que sa meilleure amie pour s'éclater ou encore avoir quelqu'un qui te prête ses vêtements qui t'arrive aux genoux ? Ça ne sonnait pas si mal que ça. Il me dirait que mes cheveux ont une belle teinte de marron alors qu'en réalité, je les ai teint qu'une seule fois, dans mon propre salon, et la couleur est partie quelques mois après. Encore une fois : ça paraît cool. C'est les problèmes que je veux à tout prix éviter. Mais c'est le souci, quand on a un petit-ami : on ne peut pas éviter les problèmes.
Crane n'a pas l'air d'avoir souffert de ces moments difficiles. J'aime le fait qu'elle ait confiance en elle et qu'elle soit si ouverte. Elle porte de longues bottes noires au-dessus de son jean et une veste au-dessus de son-t-shirt. Son petit-ami marche à ses côtés, la regardant comme s'il regardait une émission de télévision ringarde, mais je m'en fiche parce qu'elle est heureuse et parce que c'est ma meilleure amie.
« Jesse dit qu'il connaît quelqu'un qui peut nous amener au quartier ce soir. », dit Crane quand ils arrivent à son casier, d'une voix toute excitée. Jesse me souris et me chuchote un petit « bonjour ». C'est un garçon gentil. Il fixe toujours les gens, et j'aime ça, quel qu'en soit la raison.
« Qui ? » je lui demande. Je me laisse tomber contre son casier et regarde mon téléphone en attendant la réponse.
J'adore aller traîner dans le quartier Français, mais mes parents ne me laissent pas conduire là-bas, ils ne sont pas rassurés par les 40km. En général, ils sont d'accord pour me laisser y aller avec quelqu'un, tant qu'ils connaissent la personne qui conduit.
« Mon frère peut nous conduire, il va à un concert là-bas. Il ne peut pas nous faire rentrer pour assister au concert mais il peut nous déposer dans le quartier. » Me dit Jesse. Il lâche la main de Crane et l'aide à retirer son sac de ses épaules.
« Quand ? » je demande, oubliant de suite ce qu'elle vient de dire. Elle lève les yeux au ciel et répète « ce soir. ». Elle ouvre son casier et dépose ses livres les uns sur les autres. Son livre de biologie, ses dossiers et des feuilles déchirées commencent à glisser. Elle les repousse rapidement et ferme violemment son casier. Je rigole, et elle fait la révérence, attendant nos applaudissements. Jesse lui fait plaisir, tape des mains pendant que Crane savoure son moment. Les gens nous fixent quand ils passent à côté de nous, mais nous sommes dans notre bulle.
« Mais pense à ça, l'année prochaine, on sera si proche du centre-ville. » me rappelle Crane.
Notre campus universitaire est beaucoup plus proche, seulement cinq kilomètres de notre endroit préféré de la Nouvelle Orléans. On aime marcher à côté des briques anciennes du quartier, imaginant la vie dans les années 20.
Incroyable mais vrai : on tombe d'accord. Crane dit qu'elle aurait sa propre boutique. Elle vendrait des potions d'amours aux adolescents amoureux, et je serai propriétaire d'un café, place Jackson. Je suis tellement impatiente de vivre à quelques kilomètres du centre-ville. Nos années à l'université vont être géniales.
« Oh, je ne peux pas ce soir, » je me souviens, « mes parents vont à Willow et ils ont déjà réservé nos tickets pour une lecture. La femme s'appelle Maya Crawford et elle est géniale. Je l'ai regardé lire sur internet, et je ne veux pas rater ça. » Leur dis-je.
« Ils ont combien de tickets ? » me demande Crane, intriguée par l'idée. Mes parents adorent passer du temps avec Crane, et je sais que Crane adore passer du temps avec mes parents. Mes parents lui donne ce que ses parents ne peuvent pas lui donner, et ils l'accueillent toujours avec plaisir à la maison. Ses parents travaillent trop.
Voir qu'elle ne les voit que très rarement me rend encore plus gratifiante auprès des miens : ils travaillent très près de la maison, dans la boutique qu'ils tiennent. Ils sont toujours à la maison quand je rentre de l'école, et quand ils ne sont pas là, je me rend à la boutique, et fais mes devoirs là-bas. La propriétaire de la librairie d'à côté a les meilleurs thés du monde.
« Je suis certaine qu'ils en ont quatre. » Lui dis-je. Ils en prennent toujours un de plus.
« Désolée Jesse », elle le regarde avec son plus beau sourire. Il opine du chef, en riant.
« C'est bon, j'ai compris. » il lève ses bras en l'air et elle pose son bras autour de mon épaule.
Je dis au revoir au couple et dis à Crane de venir chez moi à cinq heures, pour qu'on puisse partir à l'heure. Si je ne lui donne pas une demi-heure de plus, elle sera en retard. Quand je rentre chez moi, mes parents sont dans la cuisine. Ma mère est assise, tressant un bracelet avec du fil. Je regarde ses doigts habiles accrocher une breloque qui a la forme d'un livre. Elle a l'air si concentré, elle ne réagit pas quand une mèche de cheveux tombe devant ses yeux. Je la remets en place. Elle rigole et me remercie.
« Comment était ta journée ? » mon père demande de l'autre côté de la pièce. Il lève un pichet de jus en l'air et me demande si je veux un verre.
J'opine du chef et lui répond, « C'était cool en fait, long, comme d'habitude, mais pas mal, » je tire le cordon de mon sac et sort mon livre de maths. « Crane veut venir avec nous ce soir, c'est ok ? » je leur demande.
Ils disent oui tous les deux en même temps et je me rends compte que je suis entourée de couple niais.
Voilà le chapitre 2. J'espère que la traduction vous plait. On se retrouve rapidement pour le chapitre 3 ! :)
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Weeping Willow - Version Française
Short StoryChaucer Peets est en terminale au lycée River Ridge, juste à côté de la Nouvelle-Orléans. Poète en herbe, elle prépare la fac avec sa meilleure amie. Une seule décision va changer sa vie à jamais, en vaudra-t-elle la peine ?