Prologue

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  - En dollars, versés sur un compte. Vingt mille avant, vingt mille après, cinq mille par extra.

Himchan gardait le silence, observant son interlocutrice. Le soleil levant irisait ses cheveux décolorés, seul signe distinctif qu'il pouvait apercevoir. Plutôt petite, elle portait un sweat à capuche gris trop grand et son visage était en partie dissimulé par une casquette de base-ball et un masque hygiénique. Elle paraissait vraiment jeune. Cependant, elle arborait une assurance calme et froide qui lui donnait un air inquiétant et s'il avait été dubitatif en la voyant, il avait changé d'avis dès qu'elle avait pris la parole.

- C'est d'accord, répondit-il simplement. Pas d'extras.

Il sortit une cigarette et l'alluma, en proposant une à la jeune femme qui refusa d'un geste de la main.

- Bien.

Elle lui tendit un bout de papier sur lequel était imprimée une suite de chiffres et de lettres ; le numéro du compte en question. Il s'en saisit et le fourra dans sa poche avant d'ouvrir son sac à dos et d'en sortir une pile de feuilles, qu'il lui tendit. Si elle fut surprise par leur quantité, elle n'en montra rien, se contentant de les glisser sous son sweat.

- Considérez que c'est fait.

Himchan hocha la tête.


Hyuna tourna les talons sans rien ajouter. En marchant, elle remonta sa manche pour regarder sa montre. Six heures dix. Il lui restait plus de deux heures avant l'ouverture de son club de tir. Quelques rues plus loin, elle retira son masque et sa casquette et, bientôt, fut arrivée devant le rideau métallique de son établissement. Sans passer par le rez-de-chaussée, elle monta directement dans son appartement pour passer une tenue la mettant un peu plus en valeur et prendre un petit-déjeuner digne de ce nom avant de se plonger dans la lecture du dossier qu'elle avait obtenu plus tôt, qui s'avéra assez intéressante, et à neuf heures c'est avec son ordinateur portable qu'elle descendit ouvrir le club, histoire de faire des recherches complémentaires. Elle était installée derrière son comptoir depuis une petite demi-heure lorsqu'une voix près d'elle la surprit.

- On dit plus bonjour ?

Hyuna sursauta et ferma précipitamment son ordinateur. Absorbée dans ses recherches, elle n'avait pas entendu le carillon de la porte. Brun, joli à regarder, ne paraissant absolument pas ses vingt-cinq ans, Kim Jonghyun venait de faire son entrée. Hyuna se reprit bien vite et lui adressa un demi-sourire amusé.

- Bonjour à toi aussi, répondit-elle tranquillement.

- Réveil difficile ? tenta-t-il de deviner. T'as l'air fatiguée.

- Pas du tout. Pourquoi n'es-tu pas déjà en train de tirer ?

- Aish, excuse-moi de vouloir faire la conversation, c'est bon, j'y vais, grogna-t-il, faussement boudeur.

Et il passa la porte de la salle de tir, disparaissant du champ de vision de la propriétaire des lieux, qui décida qu'il était plus sûr d'arrêter ses recherches pour le moment et entreprit de nettoyer la dernière arme qu'elle avait utilisée. Elle avait tellement répété ces gestes qu'elle les faisait de manière automatique, sans avoir besoin d'y penser.
Une heure plus tard, Jonghyun reparut et vint s'accouder au comptoir, la fixant sans rien dire mais avec un grand sourire imbécile. Hyuna remonta le pistolet qu'elle avait entre les mains en quelques gestes rapides et leva les yeux vers lui, se retenant de rire.

- Oui ?

- Je te trouve extrêmement froide aujourd'hui, geignit-il avec exagération.

N'y tenant plus, la blonde pouffa de rire. Son interlocuteur rit avec elle puis reprit son sérieux.

- Tu ferais quelque chose pour moi ?

- Bien sûr, tout pour tes beaux yeux, ironisa-t-elle. Tu veux quoi ?

- J'ai vu une annonce disant que tu cherchais à employer quelqu'un hier.

- Effectivement, pourquoi, ton travail ne te convient plus ?

- Tu n'as pas l'air débordée pourtant... tu cherches quoi, un mannequin de décoration ?

- Oui, en fait je m'ennuie tellement que je serais prête à employer quelqu'un pour me tenir compagnie... Non, sérieusement, depuis un moment ça marche plutôt bien le club et j'aimerais bien quelqu'un pour ranger, accueillir les gens quand je suis déjà occupée avec quelqu'un d'autre, les tâches un peu ingrates... enfin bref, où tu veux en venir ?

- J'ai une personne à te proposer... elle n'a aucune qualification et pas vraiment d'expérience professionnelle mais je crois qu'avoir quelque chose d'un peu stable, comme un boulot, lui ferait le plus grand bien. Et je suis sûr qu'elle peut se rendre utile, tu y gagnerais autant qu'elle.

Hyuna hésita un instant. Elle n'avait pas besoin de grand-chose de compliqué, c'était à la portée du premier venu, mais un paquet d'armes de tir parfaitement fonctionnelles se trouveraient aussi à la portée de la personne en question. Enfin... Jonghyun savait ce qu'il faisait, il ne lui proposerait rien de dangereux.

- Bon, OK.

Le brun la gratifia d'un adorable sourire.

- Je ne te garantis rien ! prévint Hyuna avant qu'il n'ait eu le temps d'ouvrir la bouche. Envoie-la-moi demain, je verrai.

- Merci beaucoup, répondit-il d'un air sincère.

Il s'interrompit quelques secondes puis reprit.

- Tu fais quelque chose ce soir ?

- Oui, répondit simplement la jeune femme sans donner plus de précision.

- Et demain ?

- Aussi, désolée.

- Aiiish. Bah, on verra pour une autre fois alors.

Il sortit son téléphone portable de sa poche, le déverrouilla et y jeta un rapide coup d'œil.

- Bon, il faut que je file, j'ai du travail qui m'attend.

Il se redressa et remit son mobile dans sa poche.

- A bientôt ! lança-t-il joyeusement avant de passer la porte.

Lorsque Kim Jonghyun sortit du club de tir, il se précipita vers sa voiture. Il se mit au volant et démarra, soupirant au passage. Il avait reçu un sms, interrompant sa séance de tir, qu'il chérissait tant, lui disant de rappliquer au bureau car il y avait du travail pour lui. Le jeune homme n'avait pas eu besoin de plus pour comprendre que ce travail était certainement une blonde à l'air rebelle, se prénommant Chaerin. C'était toujours lui qu'on appelait quand elle se faisait arrêter, tout le monde avait conscience qu'elle était sous sa protection et qu'il essayait tant bien que mal de la remettre dans le droit chemin. Personne n'osait réellement lui dire que c'était surtout en mal. Il s'arrêta devant son commissariat et sortit du véhicule en se demandant ce qu'elle avait pu bien faire cette fois-ci. Il entra à l'intérieur, en saluant ses collègues, tandis que l'un d'entre eux lui indiqua la première salle d'interrogatoire. Sans plus attendre, il y pénétra. Chaerin était assise sur une chaise, le bras menotté à la table. Il eut un nouveau soupir et sortit des clés de sa poche, en se penchant au-dessus d'elle pour la détacher. Une fois que cela fut fait, il contourna la table et s'assit en face d'elle. Quelqu'un avait déposé son dossier sur la table.

- Qu'est-ce que tu as foutu encore ?

Chaerin regarda son flic habituel la détacher puis s'asseoir, un petit sourire aux lèvres. Sourire qui disparut très vite quand elle se rendit compte que sa lèvre blessée lui faisait souffrir.
Elle avait émergé d'une soirée peut-être un peu trop arrosée, bien après midi, la veille. Lorsqu'elle s'était rendu compte qu'elle était dans un endroit qui lui était absolument inconnu, entourée de personnes qui ne lui inspirait rien de plus familier, elle s'était rapidement éclipser sans chercher la raison du comment. Vêtue d'une robe de soirée noire extrêmement courte et des lunettes de soleil sur les yeux, histoire que personne ne remarque sa gueule de bois, elle avait déambulé dans les rues de Séoul. Sur le coup, elle n'avait pas tellement eu de but, elle était simplement à la recherche d'action ainsi qu'un peu de divertissement. Elle avait passé plusieurs heures à voir quelques amis, c'était un bien grand mot pour ces gens mais elle ne voyait pas comment définir autrement ceux avec qui elle passait le plus de temps, à ingurgiter plusieurs substances plus ou moins légales. Finalement, ils s'étaient retrouvés dans une espèce de boîte de nuit, et si Chaerin avait douté encore une fois de la légalité de ce qu'elle faisait, elle avait été bien trop raide pour s'en souvenir. Tout aurait pu se dérouler comme d'habitude, une bonne soirée ainsi qu'un réveil difficile, si elle n'avait pas oublié un léger détail.

" Chaerin, putain, je t'avais dit que je ne voulais plus te voir ici !"

Deux hommes l'avait encadré en lui maintenant les bras. Sans qu'elle ne comprenne réellement ce qu'il se passait, ils l'avaient tiré dehors. Elle avait eu une poussée d'adrénaline, certainement causée par l'alcool, et elle avait frappé le tibia d'un des gars avec son pied. Surpris, il l'avait lâché et elle en avait profité pour donner un coup à l'autre. Elle avait levé les yeux vers la personne qui était à l'origine de cette expulsion et s'était souvenu des quelques altercations qu'elle avait eu avec lui plus tôt dans le mois ainsi que cela lui avait fortement déplu, surtout qu'elle l'avait battu, et qu'il était le propriétaire de la boîte dans laquelle elle s'était retrouvé. La jeune femme avait eu un petit sourire, elle qui avait voulu de l'action, elle avait été servie. Et, alors qu'il s'était s'apprêté à la frapper, elle l'avait pris de court. Elle n'aurait pas pu dire pendant combien de temps ils se battirent, elle sut juste que la police intervint et que on l'avait embarqué.
Ce fut ainsi que Chaerin se retrouva dans cette pièce, en face de ce flic, qu'elle avait l'impression de voir plutôt régulièrement, la lèvre ouverte ainsi qu'avec certainement d'autres blessures qu'elle n'avait pas encore eu l'occasion de remarquer.

- Pour moi aussi c'est un plaisir de te voir, dit-elle d'un ton faussement joyeux.

Elle le vit lever les yeux au ciel.

- Je t'avais pourtant dit d'essayer de rester hors des embrouilles.

- Désolée, papa.

Il ne prit pas en compte sa remarque ni son ton sarcastique et continua :

- T'es salement amochée, tu sais ?

- Le responsable de ça l'est beaucoup plus.

Elle afficha un air fier, et elle le vit réprimer une sorte de sourire.

- Bon allez, c'est bon, dégage de là, et je ne veux plus te revoir.

Elle se leva et se précipita vers la porte.

- Attends ! S'exclama-t-il alors qu'elle s'apprêtait à sortir, je t'ai trouvé un job, faut juste que tu t'y pointes demain matin.

Elle se retourna, surprise, tandis qu'il attrapait un bout de papier et gribouillait quelque chose dessus. Chaerin se rapprocha de lui.

- Qu'est-ce qui te fais dire que j'en aurai besoin ? Je n'ai pas demandé d'aide.

- Tu ne serais pas là devant moi, après avoir fait la fête toute la nuit, voir toute la journée, si tu avais un travail, répondit-il sans même lever les yeux.

La jeune femme ne sut quoi répondre et attrapa le papier qu'il lui tendait et, sans demander son reste, quitta la salle.


Zero For Conduct [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant