Un petit quart d'heure plus tard, toute la famille était prête et l'on a enfin put tous sortir de notre Brik. La Brik était l'endroit où l'on mangeait, dormait... C'était notre chez nous. La porte qui menait à la sortit de notre Brik, nous plongeaient directement dans notre allée. Ma famille habitait la 13 ème allée du Niveau 1. C'était assez facile à retenir. J'ai toujours vécu ici, dans cette partie du Niveau 1. D'autant plus que le chiffre "13" avait été marqué sur le flanc droit de l'allée. Impossible de se perdre. Toutes les allées étaient classées dans l'ordre. Et comme la comparaison de couleur des couettes de mon lit à celle des murs de notre Brik, chaque repère à sa place. Toutes les similitudes de notre monde font ressortir toutes les différences comme un rempart entre les gens et la folie. Quand j'étais petit, je me perdais souvent d'après ma mère. Le labyrinthe que constituait le NOBOCIT et l'une des choses qui pourrait rendre malade ses habitants. Psychologiquement parlant bien entendu.
Ce que j'aime bien chez l'allée 13, c'est que l'on est au milieu de tout l'univers du Niveau 1. Il me semble qu'il y a environ... 30 allées en tout. Je ne suis pas sûr, mais à l'allée 13, ma famille et moi ne sommes qu'à quelques allées du Hall-Des-Fécondations. Comme l'indique son nom, c'est dans cette assez grande partie du Niveau 1 que l'on met en marche le système de fécondation et que l'on concevoit des enfants (en revanche, pas plus de deux. Pour éviter la surpopulation de notre monde bien évidemment. C'est le règlement). Eh oui! C'est dans cette partie du Niveau 1 que je suis né, que ma soeur est née, que mes parents sont nés et que tous mes ancêtres sont nés également.
Nous étions justement en train de longer les portes qui y mènent. Je les regarde. Du sol jusqu'au plafond du Niveau 1. Il a deux portes qui sont liés au Hall-Des-Fécondations. Celles qui permettent d'y entrer et celle qui permettent d'en sortir. Les gens y entre sont ceux qui souhaitent faire des enfants et ceux qui vont les mettre au monde. Je ne sais pas exactement ce qui s'y passe à l'intérieur mais mes parents me disent de ne pas m'en faire pour ça et que j'aurais tout le loisir de l'apprendre lorsque je serais soumis à L'Élevage.
Ah! J'oubliais aussi de préciser que seul ceux qui ont passés L'Élevage peuvent décider d'avoir accès au Hall-Des-Fécondations. Si l'on dispose pas du Savoir qu'est censé nous procurer L'Élevage, il nous sera donc apparemment impossible de faire quoi que se soit à l'intérieur. C'est d'ailleurs le dicton que nos ancêtres ont appliqué au NOBOCIT: "Le Pouvoir implique Le Savoir". Après tout ce que Le Savoir que L'Élevage m'héritera, je compterais bien continuer de faire vivre le système du NOBOCIT comme mes aïeux l'ont fait pour moi, pour mes futurs enfants et tous les enfants qu'ils engendreront par la suite. C'est le principe du NOBOCIT. Le règlement l'impose et c'est comme un devoir qui doit être accompli par chacun d'entre nous.
J'ai regardé l'une des horloges publiques qui était fixé à chaque recoin du Niveau 1. Il était 10h30. Il ne restait que une heure et trente minutes avant de partir pour un nouveau départ.Je me sentais réellement mal de quitter cet univers, dans lequel j'ai vécu tant de choses. Il faut se mettre à ma place. Tout votre mode de vie remis à zéro pour un autre. Quitter le côcon familial pour partir vivre en solitaire. "C'est l'oiseau qui prend son envole" comme dirait mon père... mais j'ai juste peur de ne pas savoir voler.
Cela faisait un peu de temps maintenant que Lor traînait les pieds. On venait pratiquement de traverser toutes les allées du Niveau 1 et elle commençait à fatiguer. Cette marche l'énervait beaucoup. Une petite fille de 12 ans se lasse vite de ce genre de chose. Elle voulait aller dans l'allée 3. Il y a un espace spécialement conçu pour les enfants là bas. J'y allais moi même très souvent quand j'étais petit. Mes parents avaient dit que aujourd'hui c'était ma journée et que c'était moi qui avait le contrôle du programme de cette matinée. J'ai accordé à ma soeur d'aller au parc. Ça lui fera plaisir. Et puis, je n'ai pas envie de garder, en image d'elle, une fille épuisée par une marche forcée. Je n'avais également aucun intérêt à faire le tour du Niveau 1. C'est juste que je pensais que si je ne le faisais pas, je risquerais de le regretter. C'était une des façons que j'avais de dire au revoir à mon Niveau natale.
Quand nous sommes arrivés à l'allée 3, Lor a retrouvée un regain d'énergie et a couru avec ses autres camarades qui s'amusaient déjà à dévaler les toboggans sous la surveillance de leurs parents. Moi, je me suis assis dans un coin et je n'ai pas bougé. Moi, je suis resté là, au calme, à réfléchir.
Les cris de joie et les ricanements des enfants du Niveau 1 (c'est logique, les enfants ont toujours été au Niveau 1)
berçaient mes pensées qui tournoyaient au sein de mon esprit.
"Toutes personnes ayant été soumis à L'Élevage ne devait en aucun cas parler des informations acquises durant la formation à ses proches, ni à ses amis. Tout enfrain de cette règle, sera punit par Le Niveau 3".
C'était l'une des centaines de règles du NOBOCIT et mon père et maa mère y étaient, comme tout le monde, fidèles. Ils n'ont donc pas put me donner plus de détails sur ce qui se trouvait juste sous nos pieds. Le Niveau 2 allait être comme un nouveau monde à explorer pour moi. Je suis à la fois terrorisé et curieux d'y être. Je n'étais sûrement pas le seul dans ce cas là. Beaucoup était sans aucun doute, dans mon état avant de s'enterrer dans Le Niveau 2. Ils ont pourtant tous réussi à avoir le courage d'y aller. Si eux le peuvent, je le pourrais. Je savais ce qui allait se passer ensuite. Tous les habitants du NOBOCIT quittaient un jour leur famille pour partir dans Le Niveau 2. Ils passaient L'Élevage puis revenaient au Niveau 1 pour construire leurs propres vies. Fonder une famille et vivre heureux. Mais cela ne s'arrêtait pas là malheureusement...
Quand les gamins du Niveau 2 remonte au 1, c'est au tour de leurs parents, de se rendre directement au Niveau 3. Tous les deux. L'on a bien le droit à des retrouvailles bien sûr. Il y avait intérêt. Tout le monde aurait pété un câble si après avoir été enterré 4 ans au Niveau 2, on aurait pas le droit de revoir ceux que l'on aime le plus. Le Niveau 3 a attribué cette faveur au Niveau 1.
J'ai regardé l'immense mur de métal qui se dressait devant moi. Ils devaient faire plusieurs mètres de long. Une quarantaine environ avant qu'ils ne se fondent au plafond qui était le seul rempart entre nous et Le Niveau 3 dans lequel tout le monde finira un jour. Ma mère et mon père y seront. J'y serais. Ma soeur y sera. Et nous pourrons enfin vivre heureux tous ensemble pour l'éternité. Et moi pour l'instant, je suis ici et je contemple. Je contemple les dizaines d'années qui nous séparent de cette éternel bonheur. Je compterais chaque jour que le temps tuera avant d'arriver à ce résultat et je ne cesserais d'attendre.
C'est toujours cette vision du paradis qui enchante mes journées à travers des pensées et mes nuits à travers des rêves, à chaque fois que j'observe l'hypnothisant plafond du Niveau 1 ; ou plutôt, le sol de mon futur chez moi. Mon véritable chez moi.
Je devais sûrement avoir l'air idiot en étant assis sur un banc publique la tête en l'air à regarder le plafond. C'est un sentiment de ridicule en tout cas qui m'a arraché à mes rêveries et aussi la main de ma mère qui s'est posée sur mon épaule. Elle m'a esquissée un léger sourire rassurant que je fus incapable de renvoyer.
Incapable parce que je savais sa morbide et exitante signification.
Mon heure viens de sonner.
Il est temps.