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Xerox fut pris d'un moment de panique. Comment cela avait-il pu arriver ? Elle avait pourtant été apte à le contrôler jusque-là... Tant pis, il devait la ranimer par tous les moyens. Il n'atteindrait jamais son but sans un cobaye aussi précieux. L'excellent druide qu'il était ne pouvait s'arrêter comme cela, à mi-chemin de sa plus grande œuvre.

D'une pression sur son poignet, il réalisa que son pouls était très faible, voire inexistant. Il semblait que le monstre de feu avait eu raison d'elle cette fois. Il ne lui restait plus qu'une solution : lui faire boire l'eau de la rivière sacrée ou elle mourrait, emportant le fruit de ses expériences avec elle.

Mais il y avait un obstacle à son plan. Plonger ne serait-ce qu'un doigt dans la rivière était interdit. Il s'agissait en effet du territoire des Orgades, créatures aquatiques qui en étaient les impitoyables gardiennes. Les conséquences pouvaient donc s'avérer lourdes, voire fatales. Pourtant, il n'avait pas d'autre choix. Vu l'origine du mal, aucune magie de soin ne la sauverait. Cette rivière en était la seule capable, et perdre Aluna était exclu. Elle avait été si utile à ses recherches... Le druide réfléchit de longues secondes et finit par décider qu'il tenterait le tout pour le tout. Son travail était au-dessus de cette foutue loi et, si en plus des Orgades il existait un quelconque dispositif visant à tuer ceux qui brisaient l'interdit, il se défendrait ou s'enfuirait, d'autant plus qu'il serait accompagné d'Attila. Il devait essayer.

Déterminé, Xerox prit deux masex — des pierres magiques — qu'il attacha aux emplacements prévus sur sa ceinture, et tenta de porter son cobaye hors de la cave. La force de ses bras s'avéra insuffisante, alors il opta pour d'autres ressources. Il toucha l'un de ses masex, qui s'illumina aussitôt. Le corps d'Aluna décolla du sol. Sur sa lancée, il en effleura un second, et le mur qui lui faisait face devint trouble. Un trou noir naquit au milieu des pierres du sous-sol, suivi d'un bruit sourd. Il s'agissait du cri de la bête qui venait d'y faire apparition.

— Te voilà, dit-il. Je vais avoir besoin que tu me mènes quelque part.

Le nouvel arrivant poussa un grondement et baissa sa crinière, autorisant son maître à y monter. Xerox fit léviter le corps d'Aluna qui se posa doucement sur son dos.

L'animal avait la stature d'un dragon. Ses yeux étaient d'un rouge perçant et sa peau reptilienne luisait de mille feux au travers de ses poils dorés. Deux énormes crocs débordaient des coins de sa gueule, qui contenaient plusieurs rangées de dents acérées. Seuls sa tête et son échine dépassaient du trou noir, mais il était aisé d'imaginer qu'il était immense.

Xerox s'installa à son tour sur l'animal, qui s'engouffra dans le passage juste avant que celui-ci ne se referme derrière lui.

La traversée prit quelques secondes qui parurent durer une éternité au vieil homme. Lorsqu'il ne sentit plus le pouls d'Aluna, il ordonna à Attila d'accélérer. La bête grogna et battit encore plus vite des ailes. Sa vitesse devint telle que Xerox dut faire des efforts supplémentaires pour empêcher le corps de son cobaye de basculer. Ils finirent par sortir du passage et atteignirent les hauteurs d'un ciel crépusculaire.

Pendant quelques heures, Xerox indiqua à Attila la direction à suivre, non sans jeter de temps à autre un coup d'œil au fardeau qu'il transportait. Il ne tarda pas à voir une immense étendue verte. Il intima à Attila de se rapprocher du niveau des arbres et de ralentir. L'animal espaça ses battements d'ailes et survola gracieusement la forêt, en direction de l'est.

Au sol, un des soldats de la garde royale de Goran aperçut dans sa longue-vue un objet volant qui s'approchait de la forêt sacrée. Il quitta son poste et courut vers son officier supérieur pour rapporter l'évènement.

Coeur de Flammes, T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant