1. Cassydie

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Six heures du matin, et c'est avec fracas que j'abats ma main sur le réveil. Aujourd'hui est mon premier jour de cours dans mon nouveau lycée. Comme sans doute des milliers d'adolescents, mais pour moi c'est un peu particulier. Je quitte le prestigieux établissement Norman Dorm pour intégrer celui des quartiers populaires. Plus d'uniforme, plus de cours de latin, seulement la banalité d'une vie de lycéenne comme je ne la connais pas.

Je me lève à contre coeur, et me demande ce que je vais bien pouvoir mettre. La veille j'ai fait des recherches sur google pour voir ce qu'une fille de mon âge dans ce genre de lycée pouvait bien porter, mais rien de ce que je n'ai vu ne ressemble de près ou de loin à ce que ma garde-robe contient. J'opte donc pour la tenue la plus approchante que je possède et la pose soigneusement sur mon lit avant d'aller me préparer dans la salle de bain.

J'ai une mine de déterrée. Je n'ai pas réussi à m'endormir aussi tôt que ce que j'avais prévu et en voilà la conséquence. Même un bon anticerne ne pourra cacher les poches que j'ai sous les yeux. Je fais de mon mieux et me lisse les cheveux que je coiffe en un chignon. Le résultat est plus que médiocre, mais il est temps de descendre pour le petit déjeuné.

Mon frère me bouscule devant les escaliers et dévale les marches.

- Surtout ne t'excuse pas !

- Excuse, me lance-t-il à la volée.

Il a l'air beaucoup plus enthousiaste que moi. Rien d'étonnant, il a toujours été beaucoup plus à l'aise que moi avec le changement.

Ma mère est déjà assise devant son thé et feuillète le journal avant de me remarquer. Elle me sourit en regardant ma tenue.

- Tu es ravissante ma chérie.

Je la remercie timidement et m'installe à mon tour à la table. Je dévisage mon frère qui se jette sur ses céréales comme si c'était les dernières qu'il mangerait avant un moment. Il se fige quand il me voit en haussant les épaules.

- Quoi, j'ai faim !

Je souffle et me blotti contre le dossier de ma chaise.

- Tu devrais te dépêcher chérie, la voiture sera là d'une minute à l'autre.

Je suis heureuse que nous soyons dispenser du bus. Trop de changement se traduit par une montée de stress chez moi, et de ce côté-là je suis déjà bien servi.

- Je n'ai pas faim, vraiment.

Elle boit une gorgée et prend son air réprobateur.

- Tu sais bien que je n'aime pas que tu partes le ventre vide.

- Je suis incapable d'avaler quoi que ce soit. Pourquoi devons-nous changer de lycée ?

Mon ton plaintif la fait lever les yeux au ciel.

- Nous te l'avons déjà expliqué. Avec ton père qui se présente à la Mairie de Charlotte, il est important que les futurs électeurs puissent se reconnaître en lui. Il faut qu'il montre qu'il n'est pas comme tout le monde, et qu'il n'hésite pas à côtoyer toute sorte de classe sociale.

- Sauf que c'est nous qui allons les côtoyer.

- Je t'ai connu plus ouverte Cassydie.

- Et vous plus ambitieux pour notre avenir.

- Ca suffit, dit-elle en s'essuyant la bouche. Vous êtes suffisamment brillants pour vous en sortir, peu importe le lycée dans lequel vous vous trouverez.

- Là n'est pas la question.

- Il n'y a pas d'autre question. Va chercher ton sac, la voiture est là.

Elle se lève, embrasse mon frère et dépose un rapide baiser sur mon front. Je me suis toujours bien entendu avec mes parents, mais je dois dire que sur ce point-là, nous ne sommes pas du tout d'accord. J'ai quitté mes amis, mes habitudes et ma vie pour la campagne de mon père, et malgré leurs arguments je ne parviens à comprendre la nécessité de tout ça.

Quand ils nous ont appris la nouvelle je m'attendais à recevoir le soutien de mon frère, mais c'est tout juste si il n'a pas sauté de joie à cette annonce.

Une fois dans la voiture, j'essaie de le ralier à ma cause.

- Ca ne te fait rien à toi d'avoir tout quitté ?

- Qu'est-ce que j'ai quitté ? Un lycée chiant à mourrir remplis de robot avec un uniforme à vomir ?

Je lève les yeux au ciel. J'aurai du me douter de sa réponse. Tyler n'a jamais aimé Norman Dorm, et ne s'en était pas caché. Moi je m'y sentais comme chez moi, et maintenant les rôles allaient être inversés. Il place ses écouteurs dans les oreilles et remut la tête en tapant de la main sur son genou, le tout en fredonnant. Comment fait-il pour être détendu à ce point ?

Le trajet passe plus vite que je ne l'aurai souhaité, et la voiture s'arrête juste devant l'établissement. Sa façade est entièrement recouverte de briques rouges et de larges escaliers mènent à l'entrée. Il y a des lycéens partout. Certains chahutent et se bousculent, d'autres dansent au milieu de groupe qui tape dans les mains pour battre la mesure, et d'autre encore sont juste assis sur toutes les surfaces possibles, attendant que le temps passe.

Je commence à paniquer, je le sens. Tyler ouvre la portière et me jette un coup d'oeil en voyant que je ne bouge pas d'un millimètre.

- Alors, tu viens ?

- Une minute. Mais vas-y toi.

Il se replonge dans sa musique et claque la portière. Je le regarde s'éloigner, son sac à dos pendouillant sur seulement une épaule. Il n'a pas encore passé une seule journée ici qu'il a déjà tout l'air d'y avoir grandi. Rien qu'à voir sa tenue, beaucoup plus décontracté que la mienne, je comprends que ma journée va être difficile.

Jusqu'à présent personne ne nous avait encore remarqués, mais maintenant je distingue plusieurs regards scruter la voiture dans laquelle je me trouve.

- Ca va aller mademoiselle ?

Le chauffeur me dévisage, sans doute inquiet.

- Oui merci, j'ai seulement besoin d'une minute.




La couleur de l'amour : De L'inconnu Naît L'amour《Sous Contrat D'édition》Où les histoires vivent. Découvrez maintenant