Poussière

Céleste

  « Cette femme, ça a l'air d'être un poème. »  

Elle n'aurait pas pu mieux dire, cette amie, quand je lui en ai parlé.

Ses cheveux courts, son sourire indétrônable, elle est grosse, elle rayonne.

Elle va et vient partout, elle est infatigable malgré sa corpulence.

Elle déborde d'amour, pour mes frères et moi, elle déborde d'amour pour les enfants. Elle est juste et droite sans être rigide. Elle a de la patience. Elle fait le meilleur riz du monde.

Céleste, elle est portugaise, elle mastique son chewing-gum fort. Elle sent bon la Céleste. Elle a un sac en bandoulière auquel pendent des tas et des tas de portes-clés. Elle raconte des histoires sur les gens, parce qu'elle est concierge et des histoires et des gens elle en a vus pleins.

Elle nous gratte la tête, nous prend sur ses genoux. On rigole avec elle, on fait des trucs que papa et maman n'auraient pas permis, on se couche plus tard, on a nos petits secrets.

Céleste elle nous transmet ses valeurs, elle avait pas eu une vie facile et c'est une femme forte et honnête. Elle s'énerve face aux injustices dont elle a été victime, dont nous sommes victimes. Elle veut pas qu'on s'dispute.

Céleste elle y connaît rien en informatique, alors on lui montre des trucs sur l'ordinateur. 

Elle nous a dit qu'avant elle avait une longue tresse, longue jusqu'aux fesses, une tresse brune. Et un jour elle a décidé de tout couper, toute la tresse. Maintenant elle a les cheveux courts et blonds.

Céleste, elle adore chanter, et elle chante bien, quand j'étais petite et que je savais jouer du piano, je jouais et elle chantait. 

Elle chante la musique du Parrain, celle avec les paroles de Dalida.

  « Parle plus bas, car on pourrait bien nous surprendre, tu sais très bien, qu'il ne voudrait jamais comprendre, que dans nos cœurs, moi j'ai trouvé, ce que le monde refusait, de nous donner. »  

Céleste ça fait maintenant 5 ans qu'on ne la voit plus, enfin plus vraiment, que de temps en temps.

Elle nous a donné énormément. Maintenant elle est au Portugal, avec son mari, elle s'occupe de sa fille qui a perdu le sien, et de ses petits enfants, avec lesquels on jouait.

Elle m'a toujours dit qu'un jour, elle m'emmènerait avec elle au Portugal.

J'irai la voir au Portugal.