La Salle D'attente

L'homme seul

Lui, il observe tout. Dans le coin opposé à la femme seule, il calcule et écoute.
Tout est rangé minutieusement dans sa tête. Tout est en ordre.
Il sait que la mère et la fille ne s'aiment pas véritablement car la mère reproche à sa fille de trop ressembler à son père.
Il sait aussi que le père et le fils s'aiment plus que tout et que le blondinet à de la chance d'avoir un tel père. Avoir une mère suicidaire n'aurait pas été la meilleure des choses.
Il a en revanche un peu de mal à comprendre le jeune petit couple. Leur timidité l'intrigue, mais cela se voit à des kilomètres que ces deux tourtereaux s'aiment à la folie. Le mariage est d'ailleurs pour bientôt.
En ce qui concerne le vieux couple, il pressent un amour inconditionnel et une sorte d'addiction. Il est évident que l'un ne peut pas vivre sans l'autre. Ils sont le bras droit de l'autre. Mais la maladie pèse sur l'un d'eux, et c'est regrettable qu'ils veuillent tous les deux essayer de l'oublier.

Et puis il y a la femme seule, au fond de la salle qui est la seule à rester parfaitement immobile. Son air impassible reflette sûrement sa peur, et la fatalité qu'elle porte à la situation.
Elle paraît calme, mais c'est une tempête. Un tel écart entre être et paraître trouve sa seule explication dans le lac noir de la tristesse.
Cette femme est triste, cette femme est en deuil et cette femme va mourir.

Comme tous ceux de cette pièce, tout comme cet homme qui ne vit que par les projections éphémères du vécu d'autrui.