Chapitre 3 : Tom

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Tard cette même nuit, Tom réfléchissait à sa rencontre imprévue avec Francis plus tôt dans la journée. Il avait été surpris de trouver quelqu'un dans l'église, habituellement elle était complètement vide à l'exception de lui-même. Tom avait toujours été solitaire, sans amis. Les gens le fuyaient à cause de sa stature de grosse brute. Il avait le visage dur et les traits taillés dans le roc. De toutes les personnes vivant à St-Amable, il était certainement celui qu'on craignait le plus. À l'école, les professeurs le traitaient avec respect et les autres étudiants s'écartaient en le voyant. Il s'était peu à peu habitué à cette mise à l'écart, en fait il n'avait pas vraiment le choix. Lorsque le colosse avait invité Francis à venir chez lui, il était loin de se douter que celui-ci allait accepter. Dans la tête de Tom, Francis allait trouver une excuse pour décamper le plus rapidement possible. Et dans un sens il n'avait pas tort puisque ce dernier cherchait justement à s'en aller. Leurs conversations avaient étés intéressante sans pour autant être palpitante. Les deux adolescents en avaient appris beaucoup l'un sur l'autre, ainsi Tom savait maintenant presque tout du passé de Francis, et vice-versa.

Tom grogna soudainement en se pressant les côtes, le froid étrange avait refait surface. Il avait disparu pendant longtemps, pendant 5 ans à vrai dire. Mais avant qu'il ne puisse s'étonner de la présence de celui-ci, un éclair fulgurant le traversa de part en part. Il constatait de nouveau comment la souffrance lié à ce froid était intense. L'impression que ses organes étaient broyés à l'intérieur de son corps, les transformant en une sorte de bouillie innommable constitué de sang, d'os et de morceau de chairs déchirés était plus forte que jamais. Il se recroquevilla sur lui-même en gémissant péniblement. Au moins ses parents ne l'entendraient pas, leur chambre était à l'étage. Une grimace de douleur venant déformer son visage, Il priait n'importe qui et n'importe quoi pour que ca s'arrête. C'en était insoutenable, il était persuadé que la mort viendrait le cueillir d'ici peu si la douleur ne s'arrêtait pas. À ces pensées, le froid disparu aussi subitement qu'il était arrivé. Il s'envola ailleurs, laissant Tom inanimé sur le lit, frissonnant, des sueurs glaciales coulant sur son torse et son dos. Des mouvements spasmodiques faisaient bouger le corps du colosse, celui-ci ne se rappelant pas avoir déjà vécu un tel niveau de souffrance auparavant. Ou plutôt si, il s'en rappelait même trop bien. Le jour où sa petite sœur était morte avait été une terrible épreuve pour lui. Il n'avait que douze ans à l'époque mais il s'en souvenait comme si l'espace d'un jour s'était écoulé entre l'affreux décès et aujourd'hui. Lui et Amélie, sa sœur, se promenaient dans les rues du village comme ils avaient l'habitude de le faire lorsque la température était clémente. Quand ils se préparaient à revenir vers la maison, elle avait voulu faire un détour par l'église. Celle-ci était quasiment abandonnée déjà à l'époque, Tom avait donc dit oui à la condition que sa petite sœur fasse très attention aux clous et aux déchets coupants qui se trouvaient à l'intérieur. Tom n'était pas capable de refuser quoi que ce sois à Amélie, il l'aimait tellement. Il poussa donc les grandes portes qui s'ouvrirent en protestant et il laissa passer Amélie devant lui.

-N'oublies pas, dit-il. Tu fais attention à tout ce qui se trouve ici.

Il gardait un œil protecteur sur la jeune fille qui se promenait dans les allées en regardant d'un air ravis et intéressés tout ce qu'elle voyait. Lui-même s'assit sur un des bancs pour observer la grande salle. L'air sec rentrait tant bien que mal dans ses poumons, l'odeur de renfermée était insistante et lui faisait tourner la tête. Il se prit le visage entre ses mains pendant un court instant dans l'espoir de retrouver quelque peu son aplomb. Dès qu'il releva la tête, il vit sa sœur qui tournait les pages d'une bible, sur les bancs de la première rangée.

- Hé Amé, la réprimanda-t-il. Je t'avais dit de ne toucher à rien, écoute moi quand je te parle la prochaine fois. Maintenant viens, on rentre à la maison.

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