Le nice guy

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A la base, j'étais censée travailler un texte sur la friendzone et ça a franchement dérivé sur une idée de CerberusXt. Je n'ai pas cherché à lutter.

Lyra


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Nous étions dans un bar. C'était une de ces nombreuses soirées que je passais avec mes potes. Un groupe de fille passa devant notre table en riant et l'une d'entre elles me regarda un peu plus longuement. C'était une petite rousse avec le visage couvert de taches de rousseur. Jolie, sans plus. Passant une main dans mes cheveux, je lui adressais un sourire en coin et la vis rougir avant de continuer son chemin jusqu'à leur table. Bon sang, sur sa peau pâle et avec cette couleur de cheveux, l'effet était saisissant. Cela ne la mettait pas forcément en valeur mais ça restait mignon. Peut-être irais-je lui parler plus tard.


« Et sinon, avec Claire ? »


Ça venait de Clément. Il avait sûrement dû me voir loucher sur la chute de reins de la demoiselle. Je reportais mon regard sur lui. Oui, j'étais grillé. Je retins alors un soupir. Les soupirs, ça n'était pas viril et mes potes n'auraient pas manqué de s'en moquer.


« Elle a quitté son mec il y a deux jours. Ne me dis pas que tu n'as rien tenté ? »


Je retins de nouveau un soupir. Je n'allais clairement pas me présenter à la rousse maintenant qu'il m'avait mis Claire en tête. Claire qui avait quitté son mec il y a deux jours en effet. Ça faisait tellement longtemps que j'attendais ça. Enfin, elle était à portée de main. J'avais bien envie de tenter ma chance. Officiellement du moins. Mais, si proche de la rupture, les chances qu'elle accepte étaient minimes. Je ne voyais que deux possibilités à un « oui » de sa part : elle se servait de moi pour passer à autre chose ou elle se servait de moi pour rendre jaloux son ex. Ce n'était clairement pas dans mon intérêt de me lancer maintenant. D'une parce que j'avais mis trop de moyens pour me contenter d'être juste un plan-cul et de deux parce que j'avais de l'orgueil. Faire le bouche-trou, non merci. Je préférais la rousse dans ce cas-là. Claire serait ma copine ou ne serait rien.


Cela faisait quatre ans que Claire m'avait tapé dans l'œil. Quand je vous disais que ça faisait longtemps. A l'époque, elle était déjà en couple et vraiment pas sur le point de rompre. J'avais donc eu plusieurs options : l'oublier, me comporter comme un amoureux transi sans jamais rien dire ou travailler à briser son couple sans qu'elle ne s'en doute. Je n'étais pas du genre « amoureux transi » et j'avais envie d'un peu de challenge.

J'avais cependant continué à rencontrer d'autres filles, à avoir des histoires à droite et à gauche. Avec le recul, je crois qu'une part de moi se disait que, si je rencontrais quelqu'un d'autre, ça serait tout aussi bénéfique mais l'autre part, majoritaire, voulait clairement la rendre jalouse. Mon plan était simple : vivre ma vie, me rapprocher d'elle, foutre discrètement la merde tout en passant pour un mec gentil. Ce n'était pas simple et ça n'avait aucune garantie d'être efficace. Mais je voulais un challenge et j'étais servi. Vivre ma vie ? Réussi. Se rapprocher d'elle ? J'étais, en quelque sorte, devenu son confident. Je détestais cette position mais le but était atteint. A la seconde où Clément l'avait su, j'avais eu droit au fameux « t'es dans la friendzone, mec. » Je ne suis pas quelqu'un qu'on met dans la friendzone. Je suis un séducteur, j'ai ce que je veux. Cela faisait partie du plan. Sauf que je me suis retrouvé dans l'impasse.

Ma position m'offrait clairement un avantage de taille : elle se confiait à moi donc elle avait confiance en moi donc je pouvais l'influencer. Cependant, elle ne me parlait pas vraiment de son copain au début. On parlait de beaucoup de choses qui entraient clairement dans le cadre de l'intime, mais pas de son copain. J'avais besoin qu'elle en parle pour ce que j'avais prévu. Alors que je galérais à trouver une solution à mon problème, celui-ci s'est résolu tout seul. Elle m'a un jour entendu parler de Lucie avec mes potes et en a déduit que j'étais en couple. Lucie n'a jamais été ma copine mais ça marchait bien au lit alors on s'est vu pendant un temps. Je n'ai cependant pas cherché à modifier la perception que Claire avait de cet épisode : ça m'arrangeait. Elle s'est mis à considérer que j'étais assez posé pour qu'elle me parle de son copain, je suppose. Peut-être parce qu'elle avait peur que je tente quelque chose avant ? Encore une fois, ça m'arrangeait de le penser car cela signifiait qu'elle me voyait comme un homme qui avait des chances de la séduire.


J'avais donc commencé à noter les trucs qui l'agaçaient chez son copain. C'était des petites choses dont on s'accommode quand on est très amoureux mais dont on peut également se plaindre si tout n'est pas rose. Comme je le disais, leur couple marchait bien mais je connaissais les femmes. Un jour, je l'avais vu arriver avec une moue un peu contrariée. Elle n'avait pas voulu m'en parler au début et puis je l'avais convaincu, jouant sur sa culpabilité (« Tu ne me fais pas confiance ? »). Elle m'avait parlé de leur dispute du jour. Totalement bénigne, cette dispute. Sans compter qu'il s'agissait de la première dont j'entendais parler. Alors je l'ai rassuré et je l'ai convaincu que ce n'était rien. Et elle a continué à me parler de ses petits désagréments du quotidien dans son couple. J'ai d'abord poursuivi dans la même ligne de conduite puis, quand elle s'y est habituée, j'ai changé. A chaque dispute qui revenait, je ponctuais mes phrases pleines de sollicitude d'un « encore ? » J'insinuais le doute, lui montrant qu'il la disputait pour des trucs qui n'étaient pas si graves, que je lui aurais passé, moi. J'essayais de la pousser à considérer les défauts de son homme comme insupportables. Je voulais que cela la mette hors d'elle. Et j'y arrivais, lentement.

Et nous voilà, quatre ans plus tard. Elle l'avait plaqué suite à une dispute plus importante que les autres.

Elle était d'abord venue vers moi pour se loger en attendant de retrouver un appartement. J'avais refusé, lui conseillant de demander à l'une de ses amies. Au féminin. Je voulais qu'elle commence vraiment à me considérer comme amant potentiel.

Oh, j'allais sécher ses larmes comme le gentil garçon qu'elle pensait que j'étais. Mais je l'aurais. J'avais trop donné pour elle.


J'adressais alors un sourire moqueur à Clément.


« T'inquiète, je gère. Elle sera bientôt dans mon lit. »


Il n'avait pas besoin de savoir que je la voulais un peu plus que dans mon lit pour l'instant. J'avais une réputation à tenir. Au cas où.    

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