C h a p i t r e I

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Le piano ressent tout. Il peut crier ou pleurer à notre place sans verser une seule larme.

Eddy
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Je m'appelle Eddy. J'ai 14 ans et je vis avec mes parents dans un trou paumé de l'Île-de-France : Villeneuve Saint Georges.

Je me lève de mon lit après avoir passé une horrible nuit blanche. A peine avais-je posé le pied au sol que je trébuche sur je ne sais quoi et tombe en avant la tête la première contre ma table de chevet. Je ne suis pas surpris sur le fait que des tâches rouges apparaissent sur le parquet et qu'un liquide chaud se fait sentir couler sur mon visage.

La porte de ma chambre s'ouvre brusquement, ne manquant pas de me faire sursauter. Ma mère accourt vers moi dès qu'elle aperçoit mon front saignant.

"Qu'est-ce que tu t'es fait mon chou !? Me demande-t-elle, affolée.

- C'est rien... Je me suis juste cogné... Répliquais-je avant de bailler.

- C'est rien ? Me dit-elle avec un regard qui signifiait "tu te fous de moi?". Tu saignes chéri.

- Je vais me doucher. Je nettoirai la plaie, t'en fais pas..."

Elle finit par sortir de la chambre tandis que je file dans la salle de bain me laver le visage. En face du miroir au dessus du lavabo, je me regarde longuement jusqu'à ce que quelque chose de doux se pose sur ma blessure. C'est enfaite Ash qui désinfecte ma plaie.

Qui est Ash ? C'est mon meilleur ami imaginaire. Mais j'ai beau dire "imaginaire", il peut toucher tout et n'importe quoi, me parler et m'écouter. Je suis le seul qui puisse le voir mais je n'en connais pas la raison.

Je lui souris et il m'ébouriffe les cheveux avec sa main libre. Plus grand que moi d'une tête avec ses cheveux noirs lisses et ses yeux profondément bleus foncés, il a tout d'un grand frère parfait autant physiquement que mentalement.

"Merci Ash. Lui dis-je gentiment.

- De rien."

Il diparaît et je me dirige vers ma chambre pour piocher des habits dans mon armoire et revenir dans la salle d'eau. Sous l'eau presque brûlante, je soupire. C'est chaud, c'est agréable. Mais ce temps ne dura pas plus de vingt minutes. C'est déjà beaucoup mais bon... J'enroule une serviette autour de ma taille et sort de la salle d'eau, pénétrant dans ma chambre pour m'habiller avec les vêtements que j'ai sorti il y a quelques minutes : un t-shirt ample noir avec de longues manches couvrant mes mains, laissant découvrir mon épaule droite et la bretelle de mon débardeur blanc et un slim noir. Oui, je sais que mon look est un peu effeminé mais j'aime ça ! Je me trouve adorable dans ce genre de tenue !

Je recoiffe les quelques mèches noires qui retombent sur mon visage de façon à ce qu'elles partent sur le côté. Je jette un regard sur mon horloge. 8h45. Je suis pile à l'heure sauf que j'ai pas le temps de manger mon petit déjeuner. Tant pis.

J'ajuste la bandouillère de mon sac sur mon épaule et sors de ma chambre pour descendre les escaliers. Je croise ma mère qui me dépose un léger baiser sur le front et sort de la maison. Je traverse les rues silencieusement et rapidement.

Il faisait chaud et beau alors que l'hiver approchait à grand pas. Ash marchait près de moi, me souriant avec tendresse. Une fois arrivés devant le collège, je pénètre dans le bâtiment et jette un oeil sur mon emploi du temps. J'ai cours de musique.

J'adore la musique. Je fais du piano depuis quoi... 6-7 ans ? Ouai. Le piano c'est le seul moyen que j'ai pour transmettre mes sentiments. Le piano peut pleurer à ma place, rire à ma place et se mettre en colère à ma place. Pour moi le piano c'est comme parler. Ça fait du bien et ça relaxe. Ça me fait oublier tout ce qui m'entoure.

Alors que je traversais les couloirs pour rejoindre la bonne salle, je tombe nez-à-nez avec le prof d'histoire lors d'un croisement. Heureusement qu'il ne m'a pas heurté sinon je pense que j'aurais fait une crise. Car je suis atteint de phobie sociale suite à ce traumatisme... Je n'ai pas envie de repenser à ça...

"Eddy ? Me dit-il avec un regard interrogatif.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Lui demandais-je en arquant un sourcil.

- Que fais-tu ici ?

- J'ai cours de musique... Pourquoi cette question ?

- Mr Escudier a dû être absent pour des raisons que j'ignore. J'écarquille les yeux à l'entente de ses mots. Je suis venu une heure trop tôt !?

- A-ah je vois... Je vais aller en permanence alors..."

Je le contourne et me dirige tout de même vers la salle de musique. Oui, je lui ai menti. Enfaite, mes doigts s'agitent d'impatience. Je toque à la porte de la salle, priant pour que personne ne s'y trouve. N'entendant pas de réponse, je pose ma main sur la poignée et la tourne. La porte s'ouvre. Je vois qu'il n'y a personne à l'intérieur et entre, fermant derrière moi.

Je m'assois sur le long tabouret noir et ballade ma main droite sur les touches blanches. Les notes sont lègèrent mais n'ont aucun rapport les unes aux autres, formant une mélodie atroce. On ne peut même pas appeler ça une mélodie. Je finis par poser ma main gauche sur le clavier et joue mon morceau préféré, River Flow in You de Yiruma.

Lorsque mes doigts se séparèrent finalement du clavier, des applaudissements se font entendre. C'est...

"Qu-Qu'est-ce que tu fais là...? Lui demandais-je, me levant brusquement du tabouret.

- Ça fait longtemps que je ne t'ai pas entendu jouer... Trois ans... Il s'approche peu à peu de moi tandis que je recule, apeuré.

- L-Laisse-moi tranquille..." Je finis plaqué contre un des murs de la pièce. Il est beaucoup trop proche...

Ses mains sont placée de chaque côté de ma tête. Je la tourne sur le côté et ferme les yeux, redoutant une mauvaise action de sa part. Mon coeur fait un sprint et ma respiration se fait saccadée. Tout mon être tremble à l'intérieur de moi.

"Calme-toi..." Susurre-t-il au creux de mon oreille, me faisant trembler.

Je me sens pas bien... J'ai la tête qui tourne et des nausées se font sentir en moi. Alors qu'il rapprochait peu à peu son visage du mien, je vois Ash en train de me secouer doucement dans mon lit, l'air inquiet. Était-ce un rêve...?

"Ça va ? T'es tout en sueur... Un cauchemar ? Me dit-il en me caressant tendrement la joue.

- Oui je crois..." Dis-je en m'asseyant doucement en tailleur. Je pose par réflexe ma main sur ma tempe droite. J'ai une énorme mi-graine...

Il me rallonge immédiatement et me conseille de rester à la maison me reposer mais pour une fois je ne l'écoute pas et démarre ma routine du matin, tout de même un peu sonné. Mais c'est bizarre, ma blessure de ce matin est toujours là...

Touches Noires [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant