Intéressante discussion

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Quand le Poudlard Express entra en gare, un crissement retentit et la locomotive s'arrêta dans un nuage de vapeur. La nuit noire rendait l'intérieur des compartiments plus jaunes à cause de l'éclairage artificiel, et Draco Malfoy avait horreur de cela. Tout le long du trajet, il avait redouté l'heure de son arrivée : cette sixième année s'annonçait tendue.

Depuis un moment déjà, il sentait une présence en trop dans le compartiment. En prêtant plus d'attention, il parvint à distinguer nettement le bruit d'une respiration mal maîtrisée, qui semblait venir du filet réservé aux bagages, tout près de lui. Sauf que le filet en question était vide. Potter, si tu es venu foutre ton nez dans mes affaires... Ça ne pouvait être que lui, avec sa précieuse cape d'invisibilité. Mais qu'est-ce qu'il faisait là ? Il n'avait rien entendu d'important au moins ? Probablement pas.

Le temps que ses acolytes descendent à leur tour, Draco resta pour s'occuper de l'intrus, en commençant par lui arracher sa cape. Son geste resta suspendu dans l'air quand il découvrit un Harry...profondément endormi. La douceur de ses traits relâchés étonna fortement le jeune homme, le vidant de toute trace de colère, réduisant à néant toute la haine qu'il s'apprêtait à déverser.
Son souffle faisait se soulever et s'abaisser lentement sa poitrine, enfoncée entre deux épaules ramenées près du cou à cause de l'espace disponible très réduit du filet à bagages. Contorsionné dans cette position inconfortable, le jeune homme avait l'air étrangement vulnérable. Pour la première fois, Draco s'autorisa à envisager les choses sous un autre angle, et réalisa qu'Harry avait, tout compte fait, dû beaucoup subir pour quelqu'un de leur âge. Il éprouva même de la pitié.

Lorsqu'il s'en rendit compte, ses pensées l'effrayèrent soudain et, comme pour punir celui qui en était la cause, il saisit Harry à deux mains et le projeta brutalement au sol. Ceci eu pour effet de le réveiller et de l'aveugler momentanément de douleur. Il afficha alors une expression de surprise mêlée d'embarras face au fait de se retrouver, malgré lui, couché par terre aux pieds de son ennemi, sans aucune explication. Malfoy le foudroyait du regard et écumait de rage en silence. Sans laisser le temps à Harry de se remettre, il lui écrasa le nez du pied, avant de partir sans dire un mot.

Endolori pour la deuxième fois en deux minutes, celui-ci insulta mentalement Malfoy, bien qu'il se dit qu'il l'avait un peu mérité. Heureusement, il eu tout juste le temps de sortir du train, pour rattraper ses amis (qui se faisaient du soucis pour lui). Hermione hallucina en voyant son nez, ce qui eu le mérite de faire sourire Harry — un sourire plutôt sanglant, flippant, certes, mais un sourire.

• (À la veille des vacances de Pâques) •

Depuis la rentrée et tout le long de l'année, Draco avait été particulièrement seul. Tiraillé entre les deux camps, il avait pour habitude depuis peu de fuir près de la cabane hurlante de Pré-au-lard.
Rien qu'aujourd'hui, la journée avait été particulièrement pitoyable. Non seulement le changement de professeur de potions au profit de Horace Slughorn lui avait valu de se voir voler le statut de favori par Potter, mais la présence de Crabbe et Goyle avait été rendue encore plus agaçante que d'habitude par les fausses rumeurs qui couraient autour de lui et Pansy : toutes les conversations finissaient par tourner autour d'elle, du magnifique couple qu'ils formeraient, mais voilà : depuis que Draco se savait gay, il devait puiser dans des ressources très limitées de sa patience pour paraître aussi distant et non-affecté que possible.

Une des pensées qui lui prenait beaucoup d'énergie – et qui par conséquent contribuait à son humeur exécrable – était celle d'éprouver une indéniable attirance pour Potter. Comment cela était-il possible, ou même ne serait-ce que concevable, pour un digne Malfoy, d'aimer ce sang mêlé de Harry Potter, l'ennemi du Seigneur des Ténèbres de surcroît ? Non, Draco se sentait mal, comme dans la peau d'un traître, à la vue de ces sentiments sur lesquels il ne pouvait néanmoins pas fermer les yeux.
C'était un fait, et la vérité lui crevait les yeux : Draco Malfoy aimait Harry Potter.

Le Rouge et le VertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant