⋅Chapitre 2⋅

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Mon amie avait passé son après-midi à m'expliquer que je ne devais pas avoir honte de ma maladie, avec tous les arguments qu'elle me sortait toujours lorsque l'on en parlait. Contrairement à ce qu'elle semblait encore penser, je n'avais pas honte. Je désirais juste pouvoir vivre de la même manière qu'un adolescent « classique » de mon âge, sans devoir faire attention à tout ce que je faisais. Ce qui, j'en étais certain, ne serait pas possible si tout le monde apprenait ma situation. Ils m'empêcheraient tous de faire beaucoup de choses que j'aime sous prétexte que c'est dangereux pour ma santé. Je l'avais déjà expérimenté en primaire. Je ne voulais plus recommencer cette erreur. Après tout, avoir une hémiparésie gauche, ce n'est pas comme avoir le cancer ou toutes autres maladies équivalentes, mais cela complique quand même bien la vie. Surtout dans notre société d'aujourd'hui.

En attendant l'heure du dîner, je passais dans la chambre de droite, laissant bien une note sur le tableau afin de ne pas trop inquiéter Céline ou une différente infirmière qui pourrait repasser avant de partir.

— Coucou le petit ! 

— Je ne suis pas petit ! contesta-t-il immédiatement. 

— Si tu es un petit garçon, insistai-je. Il fit semblant de bouder, je me décidai donc de le chatouiller, mais quelques secondes plus tard son rythme cardiaque s'accéléra.

— Désolé Alexis... 

— Ce n'est pas grave... Je commence à m'habituer à cet engin criant alerte dès que je pratique le moindre effort, me répondit-il. 

— Tu sais, ce n'est qu'une mauvaise passade, tu iras mieux ! 

— C'est bon. Arrête. Les médecins m'annoncent la même chose depuis un moment. Je suis au courant que ce ne sera pas le cas...

Je n'insistai pas plus. Il avait raison. Il venait de sauter la période du « déni », celle où tu crois, sur parole, tout ce que te dit le personnel hospitalier, pour te faire garder espoir, étant tout à fait certain que cela ne partira jamais réellement. Lorsque moi-même je l'avais compris, pendant plusieurs mois, j'en avais voulu à tous ceux qui me l'avait fait imaginer. Quel idiot !

— Tu n'aurais pas un nouveau livre ? J'ai terminé celui que tu m'as passé l'autre jour, me demanda-t-il en me tendant le bouquin en question. 

— Hum si, certainement, quel genre cette fois ? 

— Je ne sais pas vraiment, juste un qui me permet de « réfléchir », s'il te plaît. 

— D'accord, je regarderai dans le sac que ma mère m'a amené, si quelque chose pouvait te plaire. 

— C'est gentil de...

La porte s'ouvrit sur l'infirmière de nuit.

— Alexis, voici ton repas. Lucas va dans ta chambre, je t'apporte le tien dans quelques instants. — Bon appétit, lui dis-je en caressant sa chevelure blonde.

De nouveau dans le lit, j'allumai la télévision le temps que le journal de vingt heures arrive et tombai sur N'oubliez pas les paroles, avec Nagui. Ce soir, les participants chantaient bien, je ne connaissais pas toutes les chansons, cependant, j'aimais bien les textes.

— Nous avons remplacé les crevettes par des légumes, comme voulu. Tu es bien l'unique garçon depuis que je suis ici à demander systématiquement des légumes, tu m'étonneras toujours Lucas, me précisa-t-elle. 

— C'est l'une des seules choses correctes, alors j'en profite, répondis-je approchant déjà ma salade de tomates. 

— Je suis de ton avis. Bon appétit, je repasserai vers vingt heures pour te donner tes médicaments et reprendre le plateau.

Je lui fis un signe de la tête puisque j'avais dès lors la bouche pleine.

À la fin de l'émission, je reconnus deux-trois chansons que je fredonnai. La météo ne m'inspira rien de prometteur et le journal ne m'apprit rien de particulier.

J'éteignis la télévision, me changeai puis attendis patiemment l'infirmière, écrivant sur mon carnet :

"La vie est vraiment simple, mais nous insistons à la rendre compliquée." - Confucius.

Quand je rangeais celui-ci, elle arriva avec une nouvelle bouteille d'eau et les deux médicaments du soir que j'avalais devant elle.

— Tente de dormir. Si tu as un problème, tu sais quoi faire. Elle remplit la dernière case du tableau et l'émargea avant de le troquer par un vide. Sachant que la nuit risquait d'être courte, je fermai les yeux dès qu'elle éteignit la lumière.

Comme prévu, quelques heures plus tard j'étais éveillé. J'attendais une nuit complète depuis presque deux semaines, mais elle refusait de se présenter. J'étais épuisé, mais incapable de dormir plus de quatre heures d'affilée.

Certain que je ne pourrai vraiment plus sommeiller, j'allumai et ressortis mon carnet à la page où je l'avais clôturé la veille. Je me concentrais sur chaque mot de la phrase en essayant de comprendre le sens et pourquoi l'auteur l'avait écrite, dans quel contexte.

Vraisemblablement, j'y avais passé beaucoup de temps puisque c'est l'arrivée de Céline, à sept heures, qui m'interrompit.

— Nouvel extrait ? 

— Oui. 

— Je peux le voir ? 

— Oui, tu peux, répondis-je en continuant à écrire. Elle est de Confucius. Elle se plaça au bout du lit, de façon à être en face de moi et pouvoir lire le tableau que j'avais rempli.

— Tu t'es enfin décidé à rédiger sur cette feuille, c'est gentil de ta part, dit-elle ironiquement.

Je ne prêtai pas plus d'attention à sa critique, puis elle commença le « J'aime t'emmerder », qui était le questionnaire récapitulatif de la semaine précédente, mais que j'avais renommé ainsi.

Une fois terminée, Céline ressortit pour me laisser analyser un peu mes devoirs en attendant que mes parents et ma sœur arrivent.

Résumé du livre que Lucas a donné à Alexis, il est super je vous le conseille vivement 👌🏼:

« François pensa : si elle commande un déca, je me lève et je m'en vais. C'est la boisson la moins conviviale qui soit. Un thé, ce n'est guère mieux. On sent qu'on va passer des dimanches après-midi à regarder la télévision. Ou pire : chez les beaux-parents. Finalement, il se dit qu'un jus, ça serait bien. Oui, un jus, c'est sympathique. C'est convivial et pas trop agressif. On sent la fille douce et équilibrée. Mais quel jus ? Mieux vaut esquiver les grands classiques : évitons la pomme ou l'orange, trop vu. Il faut être un tout petit peu original, sans être toutefois excentrique. La papaye ou la goyave, ça fait peur. Le jus d'abricot, c'est parfait. Si elle choisi ça, je l'épouse...
— Je vais prendre un jus... Un jus d'abricot, je crois, répondit Nathalie.
Il la regarda comme si elle était une effraction de la réalité. »

Bonsoir/bonjour mes petits makis à la banane! j'espère que ce chapitre vous aura plus ! N'hésitez à voter et commenter !


Eden

Au Coeur des Convusions (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant