Partie trois

32 8 2
                                    

J'entends d'insupportables murmures autour de moi et me réveille. J'aperçois mes parents discuter avec, je devine à la vue de sa blouse blanche, une infirmière.

Mon père remercie une dizaine de fois la femme aux longs cheveux bruns tandis que ma mère opine du menton à ses côtés. L'infirmière quitte la pièce après leur avoir offerts un sourire rayonnant, leur précisant que c'est tout à fait normal qu'elle remplisse son rôle. Quand mes parents se tournent à nouveau vers moi, leurs yeux s'illuminent.

Ma maman couine et accoure vers moi, prenant ma main dans la sienne tandis que mon père contourne le lit et se positionne à l'opposée de ma mère afin d'imiter ses gestes.

- Comment te sens-tu ? me demande mes parents à l'unisson.

J'ai l'étrange sensation d'avoir déjà vécu ce moment : ma mère prenant ma main, assise sur ce fauteuil à mes côtés et me demandant comment je me sens.

- Ça va, marmonné-je.

- Nous venons de parler avec l'infirmière, m'informe mon père, tu pourras rentrer à la maison demain soir.

Les cernes violâtres contournant les yeux de mes parents contrastent avec la pâleur de leur peau ; leurs visages ont perdu toute couleur. Je me demande combien de temps ils sont restés avec moi, à attendre que je me réveille. D'ailleurs, depuis quand suis-je ici ?

- Quelle heure est-il ? demandé-je avant de prendre conscience à quel point ma question est stupide sachant que j'ignore le jour que nous étions.

- Il est bientôt neuf heures, ma chérie.

- Quel jour sommes-nous ? me rattrapé-je.

- Nous sommes lundi. Tu as dormi deux journées entières.

- Comment ? n'en reviens-je pas.

- Il se trouve qu'un médecin ait fait une erreur et t'ait injectée une plus forte dose de morphine qu'il ne le devait.

Mon papa ajoute furieusement et sa rancune envers cet homme est clairement visible. Je hoche doucement la tête, n'ayant pas la volonté de répondre à cela. J'examine la chambre dans laquelle je me trouve et mon regard s'attarde sur une seringue posée sur la table dans un coin de la pièce ; des images du médecin m'injectant de la morphine me reviennent à l'esprit comme des flashs.

Je lève avec difficulté mon bras, mes membres complètement engourdis, et vois un point rouge au niveau de mon poignet. C'est l'endroit où il m'a piquée, seulement un détail m'échappe ; je ne me souviens pas d'un médecin... Mais d'un homme. Un homme qui ne travaillait certainement pas dans cet hôpital, étant donné qu'aucune blouse hors de celle de l'infirmière ne m'est familière.

Je ferme mes yeux, essayant de creuser au plus profond de mon esprit afin de me remémorer un visage ou un quelconque indice qui me permettrait de résoudre l'une des pièces de ce puzzle et j'y parviens finalement.

Harry.

Je me rappelle de lui, infiltrant ce liquide en moi juste après ce baiser mais je ne réussis pas à différencier mes rêves à la réalité. Je clos de nouveau mes paupières pour réunir le plus de souvenir que j'ai en débutant par : comment suis-je arrivée là ?
Mes souvenirs réapparaissent lentement et je parviens à reconstruire la totalité du puzzle. Il y a juste un seul et même problème : j'ignore s'il s'agit de réels faits ou pas, et étant de nature très rêveuse, cela n'arrange définitivement pas les choses.

- Maman, appelé-je pour attirer son attention mais ses pupilles sont déjà posées sur moi. Peux-tu me rappeler ce qu'il s'est passé ?

Hors de ce contexte, j'aurais probablement préféré ne pas rétablir la réalité dans mon esprit, souhaitant rester dans l'ignorance du moment que mes hallucinations ou rêveries, peu importe comment cela se nomme, me conviennent. Mais je suis dans une situation où la seule chose que je désire est être éclaircie.

- Oui... bien sûr, bégaie ma mère après avoir jeté un bref coup d'œil à mon père qui reste silencieux. Te souviens-tu du jour où nous t'avons trouvée devant la porte, inconsciente ?

J'ai beau cherché le rapport, établir une corrélation entre ces deux événements m'est impossible. Où veut-elle en venir ? J'hésite un moment à lui répéter ma question, pensant qu'elle ne l'a pas entendue correctement mais je finis tout de même par hocher la tête et elle poursuit.

- C'est pareil que ce jour là... Nous t'avons appelée samedi au déjeuner, mais tu n'as pas répondu... Alors nous nous sommes inquiétés, et avons essayé de te joindre toute l'après-midi mais tu ne décrochais toujours pas... Puis, le soir... Nous avons reçu un appel de l'hôpital nous prévenant que... et... tu..., sanglote-t-elle et je suis également émue de la voir ainsi.

- Nous prévenant que tu as eu un traumatisme crânien.

Mon père termine à la place de ma mère qui elle, couvre son visage de ses mains afin d'étouffer ses pleurs.

Je comprends mieux le rapprochement maintenant : dans les deux situations, mes parents sont dans l'ignorance absolue et une fois de plus, je me sens coupable de leur causer cette peine car comme toujours, je ne suis même pas en capacité de les rassurer en leur expliquant le comment du pourquoi.

Je me souviens d'être tombée dans une forêt et c'est bien la seule chose dont je suis certaine grâce aux informations que ma mère vient de me prodiguer. Mais la suite des événements est entièrement confuse pour moi. Tellement d'images restent floues dans ma tête et ces questions qui surgissent à chacune d'elle me rendent littéralement folle : rêve ou réel ?

- Merci.

Je termine notre discussion et même après deux journées entières de repos, je parviens à trouver sommeil, ne tardant pas à m'endormir.


Game for realOù les histoires vivent. Découvrez maintenant