Chapitre 1 - Anna

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- Anna !

Ma mère m'appelle du rez-de-chaussée.

- Anna, dépêche-toi ! Reprit-elle sur un ton plus autoritaire. On va finir par être en retard !

- J'arrive ! J'ai presque fini, ronchonnais-je à mon tour.

Je fais attention à ne pas oublier ma collection de livres. Mes livres qui remplissent les trois-quarts des cartons pour mon déménagement, pensais-je.

Aujourd'hui, c'est le grand jour. Je vais enfin pourvoir vivre pleinement ma vie sans dépendre de rien ni personne. J'emménage en colocation à Boston afin de me rapprocher de l'université de Harvard. Mon but ultime. Enfin, celui de ma mère plutôt.

Depuis toute petite, ma mère ne cesse de me rabâcher de me comporter correctement, d'avoir une attitude exemplaire, afin que par la suite cela ne nuise pas à mon dossier scolaire. C'est une des raisons pour laquelle je ne suis pas comme les autres jeunes de mon âge, à sortir et boire comme des trous et faire d'autres choses tout aussi futiles. Pendant qu'eux étaient en train de faire la fête, moi j'étais là, travaillant jour et nuit sans relâche afin de satisfaire ma mère, qui se donnait aussi beaucoup de mal pour parvenir au but recherché.

Ce travail acharné a tout de même porté ses fruits. Puisque grâce à cela, j'ai pu obtenir une bourse d'étude. Après avoir postulé dans toutes les plus grandes universités des États-Unis, et être retenue dans plusieurs d'entre elles, mon choix s'est fixé que sur une seule de ces écoles. Bien sûr, vous savez de laquelle il s'agit, puisque cette année, je m'apprête à y entrer officiellement.

Le dernier carton rempli, je pars le déposer dans le coffre de la voiture avec les autres sous le regard réprobateur de ma mère. Cette dernière m'attend patiemment devant la voiture, les bras croisés sur sa poitrine. Elle semble tellement nerveuse.
Pourtant c'est pas elle qui va devoir vivre avec des gens qui me sont complètement inconnu. Et en plus de ça, pour une durée indéterminée. C'est vrai ça, à tout moment je peux me faire expulser de la fac. Oh non, il ne faut pas que je pense à ça maintenant
.Je sens l'angoisse s'emparer de plus en plus de mon corps. Mes membres se mettent à trembler tout à coup. L'adrénaline prend donc le dessus.

Cependant, je relâche la pression lorsque la porte d'entrée claque, m'annonçant que le départ est désormais inévitable.

Le trajet jusqu'à Boston se déroule dans un silence pesant. Ma mère semble aussi anxieuse que moi. Même plus. Elle tient fermement le volant de ses mains, enfonçant au passage ses ongles manucurés dans le cuir de ce dernier, le regard braqué sur la route. Elle a insisté pour m'accompagner. Je ne sais pour quelle raison d'ailleurs. Toutefois, ça m'arrange, ça m'aurait évité de prendre les transports en commun. Car oui, je n'ai toujours pas de voiture, n'en voyant pas l'utilité puisque je ne bougeais presque jamais de chez moi. Auparavant...

Lorsque ma mère s'aperçoit que je suis aussi mal en point et pour mettre fin à cet incommodant trajet se met à me raconter ses années où comme moi, elle a vécu en colocation.

Elle me raconte la fois où sa colocataire lui a organisé un anniversaire surprise, son premier baiser volé par celui qui se trouvait être son autre colocataire.
Elle a même commencé à me raconter sa première fois. Cependant, je l'ai stoppé avant qu'elle ne poursuive, jugeant cette partie de sa vie trop intime. De plus, je ne suis pas prête à parler de ça avec elle.

De plus, je n'ai pas été surprise quand j'ai appris que sa première fois ne fut pas avec mon père. Certes je l'aime bien mon père, cependant il n'est jamais là, il travaille beaucoup. Beaucoup trop à mon goût. Ma mère ne se plaint pas mais je vois bien qu'il lui manque. Mais à chaque fois qu'ils peuvent, ils en profitent au maximum pour rester le plus de temps possible ensemble. Et pour ça, je ne peux que les envier.

Une partie de moi est égoïste. Car c'est à cause de moi que leur vie a été chamboulée, après ma naissance. Afin de subvenir à mes besoins, mon père a été contraint de travailler.
Et pas qu'un peu ! C'est pourquoi j'ai décidé de leur rendre la pareille en décidant d'aller à cette université et donc de vivre ailleurs pour leur laisser un peu plus d'intimité.

- Ah enfin arrivées ! S'extasie ma mère au bout de quelques instants.

Arrivées à destination, mon regard se pose sur l'édifice qui s'élève à ma fenêtre. C'est un immeuble assez imposant, il paraît tout neuf. Après avoir reçu ce matin, toutes les informations nécessaires à ma venue dans ce nouveau lieu, je compose le code d'entrée sans aucun mal.

Lorsque les portes de l'ascenseur se referment, le seul bruit qui nous parvient est celui de ce dernier qui nous rappelle que nous nous approchons de plus en plus de l'étage souhaité. Nous appréhendons toutes les deux quelque chose. Cependant ce n'est pas la même chose.
A en deviner son expression, elle redoute l'appartement dans lequel j'allais passer une partie de mon existence. Bien sûr, toutes les mères veulent que leur enfant vivent dans un endroit confortable, respectueux de sa santé.
Alors que moi, ce que j'appréhende le plus, c'est de savoir avec qui j'allais la passée, cette partie de mon existence.

La petite tonalité de l'ascenseur nous annonçant que nous venions d'accéder à l'étage demandé retentît. Prenant une grande inspiration, j'entre la clé dans la serrure et je jete un dernier regard à ma mère. Celle-ci me le rend et un sourire se forme aux coins de ses lèvres. Dans un hélas de courage, je tourne la clé et la porte s'ouvre.

Lorsque je franchis le seuil de la porte, ma mère en retrait, je suis tout étonnée par le calme et la sérénité qui règne dans la pièce.

- Ils doivent sûrement faire connaissance autour d'un café, suggéra ma mère, faisant référence à mes colocataires.

A l'entente de cette supposition, mon visage laisse paraître une mine déçue. Je suis déçue et par dessus le marché, je m'en veux. Si je n'étais pas partie en retard, j'aurais pu...

Une silhouette et une voix qui parle au loin, interrompt mes divagations.

- Tu dois être Anna, s'adresse la personne qui déambule dans le hall dans ma direction.

La jeune fille vient se poster devant moi. Elle est grande, doit mesurer environ 1m70. Elle était très belle, ses cheveux blonds regroupés en une tresse, laisse entrevoir son visage d'ange qui met en évidence ses yeux bleu-océan.

Je lui réponds par un hochement de tête.

- Salut, moi c'est Emily. Je suis ta coloc' . Dit-elle une pointe d'enthousiasme dans la voix.

Et au moment même où elle a commencé à me parler, j'ai tout de suite su que nous allions bien nous entendre. Ais-je tord ?

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 16, 2023 ⏰

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