Episode 01 - 1/2

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Episode 1 - ARTEMIS

[Liyanne] 

Mon sac de cours passé en bandoulière, je m'aventure dans les allées de Place Laurier.
Petit point géographique, Place Laurier est le centre commercial qui se trouve à l'entrée de Québec, lorsqu'on passe par la rive Sud. Ouais, un peu trop complexe pour les personnes qui ne vivent pas ici. En bref, c'est l'endroit où tout le monde va faire ses courses. Et comme j'habite juste à côté, je ne fais pas exception. Je soupire pour essayer de me calmer, mais le nombre incroyable de personnes me met mal-à-l'aise. De mon mieux, je tente de ne pas regarder autour de moi et me dirige vers le Forever 21. En essayant de me faire la plus petite, je me faufile vers le rayon des robes. J'aimerais trouver un petit quelque chose pour la fête d'anniversaire que m'ont organisés mes nouveaux "parents". J'aimerais qu'ils ne me trouvent pas trop bizarre, comme les derniers. Et comme tous ceux d'avant. Avec un petit soupir, j'attrape le cintre d'une tenue qui semble plutôt jolie.

 - Bonjour Mademoiselle ! Je peux faire quelque chose pour vous ? 

Je me force à sourire en entendant la vendeuse et relève lentement la tête vers elle. Lorsque je croise son regard, tous mes muscles se détendent. Elle est seule. 

 - Non, c'est bon, je vais trouver. Merci quand même. 

Elle me fait un sourire et part s'occuper des autres clients, qui ne sont pas dans mon champ de vision. Je soupire de soulagement. En fait, j'aime bien les vendeuse du Forcever 21, parce qu'elles sont plutôt jeunes, alors pour elles, une fille aux yeux violets et avec une mèche, ça ne les surprend pas. Avec un sourire détendu, j'attrape la robe et file vers les cabines d'essayages. Pile poile la bonne taille ! Quelques minutes plus tard, à peine, je sors victorieusement de la boutique et me dirige en vitesse vers la sortie. Rien de bizarre ne s'est produit ! C'est étrange de le dire comme ça, mais c'est assez rare pour que je le souligne. 
En sortant du grand centre commercial, je réalise que j'ai parlé trop vite. Mon regard croise les yeux verts d'une fillette de onze ans qui marche avec sa mère. Mon corps se fige, tandis qu'un long frisson me parcoure la colonne vertébrale. Non ! Je ferme les yeux, mais la sensation de froid qui se répand en moi me force à les rouvrir. Je tremble d'appréhension. A côté de la petite se tient un garçon. Un étrange garçon emmitouflé dans une longue cape noire. Il me fait dos, mais ne tarde pas à se retourner. Son regard glacé vient immanquablement se planter dans le mien, comme une provocation. J'entendrais presque les mots qu'il m'a adressé quelques années auparavant. 

" Tu ne peux pas la sauver, elle est à moi, désormais. "

J'essaie de détourner le regard, mais j'en suis incapable. Le regard bleu de l'étrange garçon me garde prisonnière. Lentement, pourtant, il détourne la tête et recentre son attention sur l'enfant. Elle a lâché la main de sa mère. Elle s'aventure sur la route. Je ferme les yeux et les cris retentissent. Tout autour de moi, les gens commencent à courir vers le corps de l'enfant, étendu au milieu de la chaussée. Je n'ai pas besoin d'ouvrir les yeux pour savoir qu'elle est morte. Pourtant, le même froid que plus tôt m'incite à regarder la scène. Devant moi, sur la route, le garçon s'est penché sur le cadavre. D'un geste tendre, il balaie l'air au-dessus d'elle et récupère la forme bleutée qui se libère de son entrave physique. Seule, au milieu de la foule, je vois la Mort emporter l'âme de l'enfant. 

Les frissons de culpabilité et de chagrin qui me parcourent me figent sur place. J'essaie de lever un pied pour bouger, rentrer chez moi, ou juste changer de position, mais j'en suis incapable. C'est toujours comme ça lorsque j'assiste à une mort. Au bout de longues secondes, je finis par inspirer un grand coup et je récupère enfin l'usage de mes muscles. Lentement, je mets le cap sur mon chez-moi. Mes nouveaux parents adoptifs doivent m'attendre. Je soupire et chasse vivement l'image de l'enfant de ma tête. Vous vous direz sans doute que je suis affreuse et que je ne compatis pas pour cette petite, mais de un, je ne la connaissais pas, et de deux, j'ai tendance à attirer la Mort alors des scènes comme celle-là, j'en ai vu des dizaines. En arrivant devant chez moi, j'essaie de chasser tout résidu de la peur et de la culpabilité qui m'ont parcourus lorsque j'ai vu la Mort. J'aimerais que mes nouveaux parents adoptifs ne prennent pas peur au bout de seulement deux mois. Pour le moment, je m'entends assez bien avec eux, et j'aimerais que ça reste le cas jusqu'à ce que je puisse emménager seule. Alors lorsque je passe la porte, j'affiche mon plus beau sourire. 

P.A.C.S. - Celle qui voyait la MortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant