Héritage empoisonné

Chapitre 7

Pendant les heures de route qui suivirent, j'essayais de dormir un peu mais mon sommeil était bien trop tourmenté. En effet, malgré le soulagement éprouvé après la discussion avec Stéphane auparavant, mon instinct me criait de ne pas lui faire confiance. Je me réveillais alors sans cesse, en sueur, désemparée et tremblante. Lorsque j'ouvrais les yeux, paniquée, Stéphane arrêtait la voiture, me prenait dans ses bras, et me berçait en espérant me calmer. Il ne se rendait cependant pas compte que cela ne faisait qu'empirer les choses.

Chaque soir, dans mes cauchemars, c'était lui que je voyais. Je voyais un Stéphane à la fois très beau mais en même temps effrayant et machiavélique. Nous nous trouvions dans un parking qui s'étendait à perte de vue, Stéphane me regardait avec l'un de ses sourires en coin qui me donnaient des papillons dans le ventre et s'avançait doucement vers une voiture. Là, il me tournait le dos de manière à ce que je sois incapable de voir ce qu'il faisait. J'étais incapable de bouger, coincée dans mon corps et spectatrice de ce qui se déroulait toujours de la même façon. Le corps d'un homme se trouvait à l'endroit où se trouvait Stéphane quelques secondes plus tôt, c'était celui du touriste que j'avais retrouvé derrière le temple, à Mulhouse. Celui-ci se vidait de son sang, puis soudain, ouvrait les yeux, tournait la tête pour planter son regard dans le mien et se redressait comme un pantin désarticulé. Assis de cette façon, sa tête faisait un angle inhabituel et anormal. Alors, il se mettait à rouler des yeux en me prononçant, à chaque fois, les mêmes mots, d'une voix rauque et cassée : "C'est de sa faute, il m'a fait ça", en pointant son doigt vers Stéphane, qui tenait dans sa main un pavé ensanglanté.

Je me réveillai à chaque fois en sursaut, ayant toujours en mémoire cette dernière image terrifiante. Je faisais ce cauchemar toutes les nuits, parfois plusieurs fois, et, chaque fois, je tremblais et pleurais en silence. Cela n'échappait cependant pas à Stéphane qui arrêtait la voiture, et m'attirait dans ses bras. Je n'émettais alors aucune résistance, dans un état de traumatisme et comme privée de toute volonté propre.

Un matin, après avoir fait ce cauchemar une énième fois, je demandai à Stéphane d'arrêter la voiture près d'un champs. Incapable de réfléchir, je sorti en tombant de la voiture et couru à travers ce dernier jusqu'à être complètement essoufflée. Alors, en me retournant, je trébuchais et, alors que ma vision se troublait, j'entendis Stéphane crier mon nom et le vit courir vers moi avant de m'évanouir.

En ouvrant les yeux, le soleil, déjà bien haut dans le ciel, me brûla les yeux. Stéphane stoppa alors le véhicule et se pencha sur moi en me regardant avec de grands yeux inquiets. L'esprit embrumé, je pris à peine conscience qu'il me fit avaler un peu d'eau avant de me laisser bercer par la douce conduite de Stéphane et de me rendormir.

Lorsque j'ouvrai les yeux pour la seconde fois, la première chose que je remarquai était la voiture à l'arrêt et l'absence de Stéphane à mes côtés. Je me redressai sur mon siège, attrapai une bouteille d'eau à mes pieds et la vida d'une traite. Je me rendis ensuite compte que j'étais affamée mais ma seule préoccupation pour le moment était de trouver mon compagnon de route. J'avalai tout de même une barre de céréale pour être sûre de ne pas flancher de nouveau et sorti de la voiture. J'avais les jambes tremblantes, et après plusieurs pas chancelants, je me hâtais vers la station service auprès de laquelle nous étions garés. Je ne pus retenir un soupir de soulagement en apercevant Stéphane à la caisse en train de payer plusieurs articles et je me rendis compte que malgré les cauchemars, je m'attachai de plus en plus à lui au point d'être terrifiée à l'idée de voyager seule.

En passant la porte, un grand sourire illumina le visage harmonieux de Stéphane et il pressa le pas pour venir me rejoindre. Il déposa ses achats dans le coffre et me pris dans ses bras en s'écriant: