Nue sous un frêne

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Nue, sous les branches du vieux frêne, au cœur de la forêt, elle était debout, immobile.
Elle se sentait bien, apaisée comme jamais elle ne l'avait été. Elle sentait la caresse du vent sous son sein. L'herbe et les aiguilles des quelques bogues abandonnées de l'an passé, venaient chatouiller ses pieds déchaussés.

Elle souriait en apercevant un écureuil la regarder depuis l'ombre du vieux chêne en face d'elle. Ses cheveux, coupés ras, ne la protégeaient pas du courant d'air qui faisait virevolter les branches du frêne qui la couvrait.

Une feuille se laissa glisser sur l'air jusqu'à percuter son épaule, la fin de l'été annonçait un automne rigoureux. Peut-être, le vieil arbre, n'y survivrait il pas.

Elle ne faisait rien, nue sous son arbre. Elle ne faisait rien d'autre que de suivre, immobile, les mouvement de l'air.

L'odeur de l'eau lui parvenait parfois, intermittente, s'immisçant jusqu'à elle, depuis la source fraiche située plus en bas dans le vallon.

Au bout d'un temps, le soir arriva et elle s'assit. Nue sous le frêne de la forêt. Elle sentait sur sa peau mordre la fraîcheur de la nuit venante.

Ses fesses étaient en contact avec les éparses feuilles froides de l'année passée. La nuit tomba vite et elle s'endormit, s'allongeant sur les feuilles mortes, le plantain et les fougères naissantes.

La fraîcheur de la nuit la réveilla, sans brusqueries. Elle vit, entre les branches du frêne, luire la lune et la splendeur des étoiles.
Elle glorifiait intérieurement le bonheur d'une vie libérée du joug des cultures normées.

Elle pris conscience d'une chose essentielle, elle était nue sous le frêne qui lui même était nu sous la lune. Elle se sentit soudain, comme une infime partie d'un quelque chose de perpétuel et d'infiniment plus grand qu'elle.

Elle se rendormie, allongée, son dos sur les feuilles séchées, ses mains sous sa tête et son pubis, imberbe, caressé par le passage d'une aile de papillon de nuit.

Quand elle se releva, aux premières lueurs de l'aube du premier jour de septembre, elle se mis à siffler, répondant à l'oiseau moqueur, qui n'avait vu de femmes nues, depuis longtemps déjà.
Elle senti de nouveau le poids du vent sur son ventre et l'odeur du bois qui la couvrait d'une robe forestière.

Elle ferma les yeux.
Bien sûr, elle savait qu'elle était folle, que rien de tout ce qu'elle voyait n'était vrai. Elle savait qu'elle aurait dû prendre les gélules que la femme en blanc lui avait données la veille.

Mais quand elle réouvrit les yeux, toujours nue, elle ne pu que pleurer, en voyant l'aube se lever depuis la fenêtre de l'hôpital.

Nue sous un frêneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant