Sentiments Non-Assumés

Vingt-trois octobre

Logan

Vingt-trois octobre

C’était le week-end. Mes parents avaient finalement découvert mon escapade. Comme quoi nous n’échappons pas à la surveillance parentale, quoi qu’on fasse. Du coup, bonjour la grange, avec ma gratte, une Songbird acoustique. Je n’étais pas un grand joueur de musique. Je faisais ça simplement pour occuper les jours pluvieux et ceux où j’étais prisonnier de la grange. 

Quelques accords incertains. Je cherchais un air, pour écrire une nouvelle chanson. Pour essayer. C’était un des moyens de m’exprimer que j’utilisais le plus. L’un des plus clairs. Je pouvais faire ressentir subtilement ce que moi je ressentais, sans même que ceux qui l’écoutent ne se doutent de quoi mes chansons sont inspirées. 

Kirane. Elle qui adore en particulier ce que je fais. À cet instant, j’ai glissé une main dans ma poche pour en ressortir mon portefeuille. Une photo, légèrement égratignée. C’était chez moi. Je le sais très bien. Dans cette même grange, dans une botte de foins. Nous avions plein de foin dans les cheveux et on riait. L’un des moments qui, à chaque fois que j’y repense, me pincent le cœur. Cette fois, elle m’arracha une larme. Ces yeux, ces cheveux.. Cette odeur, si douce, de pêches, sans parler de sa peau.. Le grain tellement fin et doux de son épiderme. La chaleur de ses bras. Les choses auxquelles je devais renoncer, auxquelles je devais dire adieu. 

Mon passé que je cédais à Daryl.

Mes poings se serrèrent. Daryl. Ce connard. Tout ça c’est de sa faute. Pourquoi ne s’était-il pas tenu tranquille, au lieu de venir bouleverser mon univers ? Comme si j’avais besoin de ça. La seule chose dont j’avais besoin, en ce moment.. C’était difficile à admettre, mais j’avais envie de voir Kirane. Je sortis mon téléphone de ma poche et lui envoyai un message texte.

‘’ Tu veux bien venir chez moi un peu ? Suis dans la grange. ‘’

Rien. Pas de Kirane. Les larmes coulent de plus belle. M’avait-elle abandonné ? Probablement. Elle avait fait son choix. Daryl. À croire que les filles sont réellement stupides. Jeter en l’air l’amitié de toute une vie pour un mec qui ne durera pas plus d’un mois ? Je croyais mon amie différente d’eux. Je m’étais trompé, encore.

Je me disais qu’il me restait au moins les souvenirs. Tout n’était pas perdu. J’étais seul, à partir de cet instant. Avec mes souvenirs.

Mais un homme n’a pas besoin de gens, quand il a ses souvenirs. 

Une heure passa, puis deux, jusqu’à ce que j’entende la porte de la grange s’ouvrir sur cette personne. Sur Kirane. Je levai les yeux vers elle. J’avais l’air réellement amoché et je faisais pitié à voir. Mes yeux étaient encore rouges et bouffis à cause des larmes. Non. Elle ne devait pas me voir comme ça. Ma tête s’enfonça sous un tas de paille, à la recherche d’un coin où elle ne pourrait me voir, si ce n’était pas déjà fait.

Peine perdue. Je me retrouvais déjà étouffé par ses bras. Son odeur de pêche, sa peau si douce.. Comme si tout ça était mien de nouveau.

‘’ Because words are useless when it comes to feelings. ‘’

Pour Kirane. Cette chanson serait pour elle.

Elle ne me lâcha pas. Pas avant un bon dix minutes. On se regardait en silence. Je lui pris la main, juste pour sentir sa chaleur. Je voulais m’y accrocher. Croire qu’elle serait à moi de nouveau, que je n’aurais plus à la partager avec Daryl. 

- Kirane.. Fis-je doucement. Je suis désolé. Pour l’autre jour, pour tout ce que j’ai fait.. J’ai peur, tu sais.. Peur que Daryl m’empêche d’être avec toi. D’être ton ami. Ça m’a poussé à m’éloigner, car je ne voulais en aucun cas te nuire. Je sais que t’aimes beaucoup Daryl et que ce que je te dis peut paraître ridicule, mais j’ai l’impression qu’un choix s’impose. Que si je ne fais rien, que.. ( Ma lèvre inférieure se mit à trembler. ) Que je vais te perdre.. Mais tu sais.. Si je te perds, j’ai plus rien. Je suis seul...