Chapitre 1

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Je me réveille avec un mal de tête horrible. Les événements de la veille reviennent en bloc dans mon cerveau. Malgré tout, je n'arrive plus à me souvenir du visage du fusilleur.

Je me souviens de la fusillade, c'est assez difficile à oublier, mais rien d'autre ne loge ma mémoire. Que faisais-je avant? Pourquoi étais-je là?Cherchant toujours un peu plus loin dans ma mémoire, je ne remarque pas l'entrée d'une infirmière. Lorsque je reviens sur Terre, je suis surprise de la trouver face à moi, me fixant intensément.

-Bonjour Zoe, me salue-t-elle gentiment.

-Appellez-moi Sierra ou ne m'appellez tout simplement pas, je lui réponds sèchement.

-Vous avez été victime d'un attentat. Vous étiez cachée derrière un banc lorsque l'on vous a retrouvée.

-Je crois qu'une c'est dûr à oublier, merci. J'étais là, au cas où vous ne le saviez pas.

À mon plus grand bonheur, elle se tait définitivement, à croire que le silence avait pris possession d'elle. Après avoir vérifié des trucs à l'allure insignifiante, elle part, me laissant seule. Livrée à moi-même, il ne me reste qu'une seule solution. Je dois me souvenir de ce qui s'est passé. Je n'ai pas vraiment le choix, à bien y penser.

Pourquoi le fusilleur aurait-il fait une chose pareille? C'est vrai, qui se dirait "j'ai rien à faire de ma vie, une fusillade ça a l'air cool. Je pourrai visiter la prison et toucher à des menottes!". Et puis, où étais-je avant l'incident? Pourquoi ne me souviens-je que de quelques événements? Que des questions sans réponse...

Les minutes s'écoulent lentement. Je retrouve quelques éléments de mon passé. Rien de surprenant. J'ai étudié en médecine pour devenir pharmacienne, mes parents sont partis vivre en Floride lorsque j'ai intégré l'université de Toronto.

On toque alors à ma porte, me ramenant brusquement à la réalité. Une infirmière entre. Une chance que celle-ci n'est pas très bavarde, car j'aurais sûrement pété un cable. Elle tente tout de même de m'approcher:

-Vous savez ce que vous avez?

-Non. Je devrais?

Elle ignore mon ton excessif, puis me répond avec le plus de sérieux possible:

-Perte de mémoire partielle et début de dissonance cognitive.

-En français s'il vous plait.

-Vous avez une légère perte de mémoire et un début de... folie.

-Je ne suis pas folle.

-Non, je suis d'accord mais...

-Je ne suis pas folle, c'est clair? Maintenant, vous allez m'enlever ces trucs qui m'énervent depuis mon réveil et me laisser partir.

-Je suis désolée, mais c'est contre les...

-Si vous ne le faites pas, je le fais moi-même.

-Vous ne pouvez p...

Sans me soucier davantage de cette conversation ridicule, je me libère de toutes ces conneries et franchis le seuil de la porte, sous le regard bouche-bée de l'infirmière qui divague entre le lit contre lequel j'étais allongée et ma personne. Après quelques secondes, elle se reprend et m'apprend:

-Vous ne serez en rien capable de franchir les portes de cet hôpital.

-En êtes-vous sûres?

-À 110%.

-Trop tard, dis-je en m'engouffrant dans les couloirs mats de cet hôpital.

Je prends mes jambes à mon cou, zigzaguant à travers différents couloirs digne d'un labyrinthe sans fin. Alors que mon essoufflement commence à se faire sentir, je fonce dans un docteur. Je suis dans la merde.

-Vous êtes la patiente nº 1713?

-Non.

-Alors vous êtes?

-Une visiteuse. Je visite ma sœur, qui est la patiente nº 1713. Vous devez nous confondre car on se ressemble beaucoup.

-Et qu'est-ce qui explique votre chemise d'hôpital?

Bordel.

-Écoutez, si je reste ne serait-ce qu'une seconde de plus dans cet hôpital suffoquante, je vais péter les plombs.

Et c'est alors qu'on entend des pas de course derrière moi. Je me retourne, et aperçois mon infirmière préférée venir à ma rescousse. Notez l'ironie. En vrai, elle avait l'air d'un chien victime de la passe du chien qui tousse.

Elle était essoufflée et courait difficilement. Le docteur nous regarde avec incrédulité, et je lui fais mon sourire d'innocente. Qui n'a pas marché, malheureusement.

-C'est assez. vous êtes la patiente nº 1713 et vous allez directement rejoindre votre chambre ou je serai dans le besoin d'utiliser les derniers moyens.

-Utilisez-les.

L'infirmière m'aggrippe le bras et me tire pour m'emmener au cœur de l'enfer. Je déteste les hôpitaux. Je ne sais pas si avant c'était ma phobie, mais je ne supporte pas d'être enfermée dans ce vaste espace clos. Arrivées à ma chambre, elle me laisse et quitte la chambre d'un pas rapide. Je crois qu'elle commence à me connaitre.

Je m'allonge sur mon lit et fixe le plafond. Je me mets alors à réfléchir, comme par réflexe. Des millions de questions trottent dans ma petite tête qui menace d'exploser à chaque minute qui passe. Et malgré le nombre incontestable de questions, pas une réponse ne me vient. Tout est clair.

Aurais-je vraiment perdu la mémoire? C'est impossible, je me souvenais de la fusillade à lon réveil. Quoique c'est une perte de mémoire partiel. Mais ça ne se peut pas! Elle m'a dit n'importe quoi. C'est une infirmière, pas un médecin. Elle ne s'y connait pas.

L'autre chose dont elle m'a informée revient en force dans ma mémoire. "Début de folie". Étais-je folle avant? Ou bien, se seraient-ils trompés avec le dossier d'une autre personne? Se serait bien probable, car vu le niveau d'intelligence de l'infirmière... Bref. Je ne peux pas être folle. Et je ne suis pas folle. Je ne peux pas bordel. Vous comprenez?

Mes yeux se posent ensuite sur la chaise réservée aux visiteurs. Elle n'est pas utilisée. Personne ne m'aime, c'est pour ça. Je ne suis qu'une pauvre folle qui ne veut pas le croire. Je prends la chaise et la balance violement contre le mur à ma gauche. Je m'écroule ensuite au sol, tentant de retrouver une respiration normale. La tête entre les mains, je ne vois rien d'autre que le sol. Il n'est pas intéressant, lui non plus.

HerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant