Vie sauvage

3.

Je ne bouge pas car pour ne pas mentir, j'ai peur que le lion, le tigre ou le loup me mordent. J'ai peur et mon frère aussi. Mon papa vient à mon secours en s'approchant et en donnant un coup de patte dans les airs pour leur faire comprendre de s'écarter.
La meute commence à partir dans un chemin déjà formé vers la droite. Tous les animaux sont coordonnés entre eux, c'est assez magique à regarder. La marche reprend et comme précédemment, je suis incapable de dire où nous sommes et quelle heure il est.

...

Je marche la tête baissée quand un détail m'interpelle. Une lumière bleue magnifique vient de s'allumer. Au départ je me dit que ça doit être des humains mais mon instinct me dit que je les aurais sentie. Dans ce cas ça doit probablement être la lune.
Quand je lève la tête, un spectacle incroyable s'offre à mes yeux. Devant moi chaque animal est illuminé, mais seulement une partie de leur corps. Le tigre, ce sont ces rayures noirs qui deviennent bleues, le lion sa crinière, ma mère ses yeux, mon père ses griffes, le rat sa moustache, le serpent ses tâches noirs, .... Quant à mon frère derrière moi ses bois sont devenus bleus, comme les miens j'imagine. Le plus beau de tous reste le loup. Il me paraît très jeune, et lui, la moitié de son pelage est bleu. Naturellement il est noir et blanc mais là il est clairement noir et bleu. Je n'arrête pas de le fixer et il s'en rend compte. Je le vois gratter sa patte au sol, signe qu'il n'est pas très content que je le dévisage de cette manière.
Je baisse la tête de nouveau et je réfléchis.

Il doit forcément se passer quelque chose.
Nous continuons de marcher quand la réponse me vient instantanément. Une petite tempête 🌬 se prépare. Elle commence à 3 km par rapport où nous sommes. Mon instinct me dicte mes pensées, c'est incroyable.
Mes parents commencent à ralentir pour se mettre au niveau de Maël et moi qui sommes un peu en arrière. Le rythme est soutenue mais étonnamment ça ne me dérange pas. 

Mon instinct se développe au fur et à mesure que nous marchons et c'est très étrange. Je redécouvre la vie et particulièrement la nature. L'odeur des fleurs s'est intensifié. J'entends les lièvres qui courent. Le frottement des feuilles sous le glissement du serpent au sol. L'énervement de ce loup qui n'a pas l'air content d'avoir des nouveaux camarades. La fatigue du rat. Je sens tout. TOUT. 

C'est à la fois très excitant mais aussi très effrayant. 

Je sais que nous avons une mission en tant qu'animaux mais qu'elle est elle ? Nous ne sommes pas là que pour faire des petites balades nocturnes. Trop de questions pour une soirée.

Nous marchons en direction de cette tempête. Une partie de mon instinct me force à suivre le reste de la meute. Une autres partie de mon instinct me dit de courir dans le sens inverse de la tempête.  Plus nous approchons plus le bleu sur la peau de tout les animaux est intense. 

...

Le vent souffle de plus en plus fort. Des gouttes d'eau commencent à couler le long de ma tête. Mes sabots commencent à me faire mal. Je regarde mon frère et lui aussi en a marre. Le loup se retourne et me regarde avec un regard noir. Apparemment je ne suis pas la seule à tout ressentir. Il a bien compris que j'en avais marre. Mon papa vient m'épauler pour me prévenir qu'on est bientôt arrivé. 

Le ciel est maintenant recouvert d'une épaisse couche de nuage. Il n'y a pas d'orage mais la pluie est très dense.

Nous finissons pas arriver devant un grillage. J'entends des petits cliquetis, signe que ce grillage est électrifié. Nous longeons ce grillage jusqu'à trouver la source de l'électricité. C'est un petit local ou doit sûrement se cacher un générateur. 

Mon papa s'approche du rat, le prend dans ses mains et le soulève à hauteur du cadenas. De ces toutes petites pattes il compose un code et le cadenas de déverrouille. Je suis curieuse de savoir comment il connaît la combinaison. 

A l'intérieur se trouve un générateur que le rat éteint. Ensuite nous reprenons notre chemin le long du grillage jusqu'à un trou à même le sol qui nous permet de passer de l'autre côté. 

Je sens la présence d'humain dans cette zone. 

Quelque chose me dit que je connais cet endroit. Ca me dit quelque chose. Je suis déjà venu ici c'est sûr. Plus nous approchons plus je comprend : nous sommes au zoo. Je suis en effet déjà venue quand j'étais toute petite. J'avais peut-être 4 ans. Les présences humaines que je sens sont les gardiens. Les gardiens endormis. 

J'hume les environs pour m'approprier ce lieu. Des centaines et des centaines d'animaux sont élevés en captivité ici. Ca me donne la chair de poule de savoir que ça pourrait m'arriver à moi aussi maintenant que je suis un animal.

Je pousse un cri désespéré. J'aimerai beaucoup les sauver mais quelque chose me dit que ce n'est pas ce que je suis venu faire.

Nous traversons un enclos vide qui devait autrefois abriter des ânes. Nous passons au delà de la clôture pour prendre le chemin des visiteurs. 

Apparemment tout le monde sait ce qu'il a à faire car nous nous dispersons en trois groupes. Nous partons dans des directions différentes et je suis seulement avec ma maman et Maël. Elle nous emmène vers l'entrée du parc animalier. Nous traversons la moitié du parc puis nous nous plaçons dans des buissons à côté de l'enclos des éléphants. Puis nous attendons.

Nous attendons encore et encore puis enfin je comprends. 

Je les sens je les vois, ils sont là. Je m'apprête à me lever et à courir mais ma mère me donne un coup de griffe. Heureusement pour moi, ma peau est très solide et je n'ai même pas une égratignure.

Je retourne au fond de la haie et j'attend même si je bouillonne d'impatience de les tuer.

Devant moi ce tient trois braconniers armés prêt à tuer ces pauvres éléphants et récupérer leurs défenses. Ma mission est de les arrêter.