~3 : "Chacun choisit sa manière de s'échapper du monde."

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La fille regardait sa blessure en séchant ses larmes. Elle n'en avait pas l'air dégoûtée. Il n'y avait qu'une lueur de curiosité qui brillait dans ses yeux sombres.
Après plusieurs secondes, elle décrocha son regard de la cicatrice.

Louis se sentait différent. Et pour lui, différent n'était pas forcément une qualité. Le garçon se sentait trop à part. Trop rejeté. Trop... trop... Différent, il n'y avait pas d'autre mots.

Cependant, il n'avait pu s'empêcher de reculer lorsque la fille approcha sa main. Il y avait des limites. Le fille comprit rapidement son erreur. Elle recula à son tour, baissant les yeux. Louis s'en voulu presque, car le jeune homme ne voulait pas la faire fuir. 

Pendant le mois qui avait passé, Louis avait souvent penser à la fille. Souvent, mais avec beaucoup de rancœur. Il l'a considérait comme une de ces personnes qui avait peur de lui. Il était normal qu'il ait cette conviction : elle l'avait fui à la vue de sa vilaine cicatrice. 

Lorsqu'il l'avait aperçu sur le toit, sa rancœur était ressorti, et il avait employé un temps froid qui ne lui ressemblait pas. Il s'était cependant calmé, jusqu'à ce que la fille essaie de le toucher. Personne n'avait jamais essayé auparavant, et Louis avait été surpris qu'elle se permette cette familiarité.

Voyant le malaise s'installer, il prit l'initiative de se présenter. Il tendit sa main.

"Louis.
-Barbara, répondit la fille en serrant sa main tendue."

Puis les adolescents s'assirent sur le rebord du toit, les jambes ballottant dans le vide, comme s'ils eût été de bons amis. Louis pensa qu'il était trop solitaire, et que par conséquent, engager la conversation était une rude épreuve. Il lança un regard discret à la fille, Barbara. Ses yeux noirs scrutaient le bas du bâtiment, et elle ne cessait de gesticuler. L'adolescent haussa les sourcils, perplexe. Comment une fille qui semblait avoir peur du vide pouvait être prête à se jeter du haut d'un immeuble pour en finir ? C'était pour lui un paradoxe incroyable.

D'ailleurs, il avait réfléchi et s'était imaginé mille raisons qui pourraient avoir pousser la jeune fille à se suicider. Barbara était une énigme. Mais Louis avait déjà était cruel lorsqu'il avait dit qu'elle ne voulait pas être sauvé et il n'évoquerait pas le sujet à nouveau à moins qu'elle ne le fasse.

Il la fixait toujours quand la jeune fille releva la tête. Elle parût un instant perturbée de se retrouver nez à nez avec Louis, mais son visage reprit une expression neutre.

"C'est beau, cette vue."

Louis acquiesa, en pensant qu'elle ne devait pas vraiment en profiter, puisqu'elle ne regardait pas l'horizon.

"T'as peur du vide ?"

Cette question lui brûlait la langue, il n'avait pu la retenir. Il voulait savoir si son intuition était juste.

Barbara hocha la tête timidement.

"Un peu."

Elle laissa une pause, avant d'ajouter :

"Tu viens souvent ici ?
-Dès que je peux. Je n'y ai jamais vu personne. À part toi, cela va sans dire, répondit - Louis.
-Pourquoi ?"

Les yeux de Barbara pétillaient. Elle ne se moquait pas de moi, et manifestait un réel intérêt.
Louid fit mine de regarder le ciel un instant. Pourquoi venait il toujours ici ? Il se posa la question, et la réponse apparut sans difficultés.  Pour fuir les autres de toute évidence. Mieux vaux être seul que mal accompagné, comme aurait dit son père, s'il avait encore été là.
Il ferma les yeux un instant, avant de les rouvrir sur l'horizon. Le soleil se couchait et le ciel prenait des teintes rosées. Les derniers rayons venaient effleurer la peau des deux adolescents.

"Chacun choisit sa manière de s'échapper du monde, même si ce n'est qu'éphemère, déclara le jeune homme.
-Et... Tu..."

Le garçon attendit que l'adolescente continue sa phrase. Elle semblait hésiter, cherchait ses mots. Louis l'encouragea à parler, il avait envie d'entendre ce que Barbara avait à dire.
Elle était tendue, Louis pouvait le voir.

"T'as jamais pensé... à une solution plus... définitive ? Pour s'échapper du monde je veux dire, le questionna - t-elle. "

Pour le coup, Louis ne pouvait pas lui dire qu'il voyait le suicide comme un acte lâche, car cela aurait directement eu une répercussion sur elle. Et encore une fois, il aimait bien l'avoir à ses côtés et elle s'en irait si il dénigrait "la solution définitive" trop ouvertement. 

"J'essaie d'être optimiste. Si j'ai touché le fond aujourd'hui, je ne peux pas aller plus bas, et ça ira forcément mieux demain, commença Louis, passant sa main dans ses méches bouclées. D'autre fois, j'en ai marre. Mais je me bats. C'est ce que mon père aurait voulu."

Le jeune homme appréciable que Barbera ait le tact de ne pas poser de questions.

Ils restèrent silencieux jusqu'à ce que le soleil ait totalement disparu.

Le calme fut rompu seulement quand Barbara lança un coup d'oeil furtif à sa montre, et se rappela qu'elle devait rentrer sans quoi ses parents la laisseraient à la porte. Elle se releva précipitemment, lançant un rapide au revoir. Elle était presque à l'escalier lorsque Louis l'interpella :

"Tu reviendras ?"

Louis la vit hocher la tête en souriant avant de disparaître.

Look At My Soul (SHORT STORY/NON CORRIGÉE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant