Chapitre 1

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PDV Cameron

Mes yeux étaient rivés sur ma mère et Henry, le pitoyable lascar qui lui servait de mari. J'aspirai la fumée de ma cigarette une dernière fois avant de la jeter par terre. L'éphémère plaisir que me procura l'exhalaison du tabac s'estompa pour laisser place à la colère. Elle se laissait courir par ce porc. Comment pouvait-elle être aussi stupide? C'était tout ce dont à quoi je pensais.

Voilà pourquoi nous nous étions retrouvés là, au milieu de toute l'agitation que provoque un déménagement. Qui aurait cru qu'elle se déciderait à quitter Los Angeles, pour vivre dans une petite ville inconnue comme Hill Island ?

Après mes expulsions à répétitions, la plupart des lycées jugèrent qu'il était préférable de ne pas m'ouvrir leurs portes. Bien décidé à m'emmerder, Henry avait utilisé cet argument pour convaincre ma mère de me scolariser dans une école privé qui voudrait bien m'accepter, loin de notre ancienne vie.

Ma génitrice s'avança vers moi, le visage fade. Un court instant, je me remémorai la femme forte, belle et honorable qu'elle demeurait avant qu'il ne vienne tout gâcher. Mais ces merveilleux souvenirs s'estompaient avec les années. Cette mascarade durait depuis trop longtemps ; à force j'avais fini par oublier ce que ça faisait d'avoir une mère et j'avais abandonné l'espoir de la retrouver un jour.

Elle se tenait devant moi. Ma taille plutôt conséquente faisait que sa tête ne dépassait pas mon thorax. Ses yeux mornes fixaient les miens. Elle avait une très mauvaise mine. Je la dévisageai avec pitié sans dire un mot. Sa bouche étroite s'entrouvrit et laissa une voix enrouée s'exprimer :

« — Tu viens nous aider avec les derniers cartons? »

Sans répondre, je lui tournai le dos et partis plus loin, car son laisser aller me dégoûtait. De plus, je n'avais aucune envie de me retrouver dans cette ville et selon moi, participer au déménagement aurait été un signe d'adhésion à ce changement brutal, alors qu'il n'en était rien.

« — Cameron! aboya le mâle dominant, ta mère t'a demandé de nous aider. Quand on te dit de faire quelque chose, tu t'exécutes, un point c'est tout. »

Je grognai dans mon coin et pris entre mes mains le premier carton qui passait par là, tout en foudroyant mon belligérant du regard, ce qui lui déplut fortement. Il se mut en ma direction jusqu'à ce que nos visages fussent assez proches. Son haleine alcoolisée vint agresser mes narines.

De sa main droite, il empoigna mes cheveux et fit basculer ma tête en arrière jusqu'à ce qu'elle percute le mur.

« - Non, Henry, ne lui fais pas de mal, s'il te plaît! intervint ma mère.

Mais il n'y porta aucune attention.

— Écoute-moi bien, petit merdeux. On a traversé tout le pays pour sauver ton avenir, qui n'est franchement pas très prometteur. Alors, je te conseille de ne rien foutre en l'air cette fois, » me dit-il, d'un ton menaçant.

Je regardai ma mère et ne rétorquai rien, ne pouvant pas me permettre de provoquer un conflit avec lui et d'épuiser mon énergie pour si peu. J'avais appris à ne rien dire lorsqu'il s'attaquait à moi. Henry était un homme violent et ma mère avait déjà été victime, à plusieurs reprises, de son comportement agressif.

Au cas où l'envie lui reprendrait de lever la main sur elle, je me devais de rester fort pour la défendre, car elle en était incapable toute seule.

Pourquoi restait-elle avec lui ? Je n'en savais rien, et je la détestais pour ça. Ça me répugnait de la voir se laisser abattre, les yeux fermés par un homme qui n'était pas digne de son amour. Je haïssais toute la dépendance et l'obsession qu'elle éprouvait pour lui. Mais après tout, elle restait tout de même ma mère et je l'aimais.

TreacherousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant