Prologue

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Sa conscience s'éveilla dans le noir, comme à chaque fois depuis ce qui lui semblait une éternité. Elle sentait au coin de ses lèvres le goût salé de ses larmes, le froid humide de sa geôle sur la peau nue de ses membres. Elle s'assit, passa ses bras autour de ses jambes et posa la tête sur ses genoux. Elle pleura, après tout ce temps les larmes ne s'étaient pas taries. Quand cette torture allait-elle cesser, elle n'avait rien fait pour mériter un tel châtiment.

Pourtant, cette fois quelque chose était différent. Grace à une faible lueur d'origine inconnue, elle contemplait sa peau d'ivoire... Sa peau ? Elle avait une peau ?... Elle observa son bras incrédule. Elle avait des bras ?... Sous ses mains tremblantes, elle sentit ses larmes séchées sur son visage, sa poitrine qui se soulevait et s'abaissait péniblement, ses jambes et ses pieds nus. Elle avait à nouveau un corps.

Pourquoi ? Quel nouveau supplice ses mystérieux geôliers avaient-ils encore inventé ? La douloureuse agonie qui déchirait son âme, toujours plus cruellement, chaque fois que celle de son bien-aimé s'enfonçait davantage dans les ténèbres ne leur suffisait-elle pas ?

Elle se leva difficilement et tituba vers la lueur, les mains en avant pour anticiper d'éventuels obstacles. Elle se retrouva face à une porte et tira sur la poignée. Il lui sembla qu'elle avait bougé, alors elle tira plus fort. Elle était faible, mais ses efforts furent récompenser, la porte céda. Épuisée par cet effort, chancelante à chacun de ses pas, elle avançait lentement, péniblement dans le tunnel obscur. Les racines dépassant des parois griffaient cruellement ses bras et ses jambes. Les cailloux qui roulaient sous ses pieds meurtris la firent chuter plusieurs fois. Elle respirait par saccades, son cœur battait si fort qu'elle avait l'impression qu'on devait l'entendre de l'Olympe. Elle était terrifiée mais elle devait continuer à avancer.

Elle déboucha enfin à l'extérieur et plaqua son bras sur ses yeux, la lumière du soleil lui était insupportable. Elle souleva légèrement son bras pour se protéger de l'astre cruel et ouvrir douloureusement les yeux. Elle était tellement fatiguée, elle avait tellement faim et soif. Elle aperçu une rivière où elle pu se désaltérer. Elle ne reconnu pas son reflet. Elle avait un nouveau corps. Elle avait été si belle autrefois. Elle l'était sans doute encore, mais elle avait l'air d'une mendiante. Elle était sale et couverte d'égratignures, sa robe blanche n'était plus qu'une loque crasseuse. Mais elle était libre...

Cette idée s'insinua lentement dans son esprit embrumé, elle était libre et allait revoir son bien-aimé, elle allait enfin pouvoir le sauver de lui-même. Dans un souffle, d'une voix rauque qui n'avait pas servit depuis des siècles, elle murmura.

- Hadès...

C'était trop beau... Trop beau pour être vrai. Elle s'effondra dans l'herbe humide et se mît à pleurer de façon incontrôlable.

À suivre....

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