Chapitre 1

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Rapport n°1 :

Cela fait maintenant 17 ans que nous avons exfiltré l'expérience numéro 93. Durant ces années d'observation, nous avons pu constater une nette amélioration de son état physique.

L'élément semblant apte à la suite des opérations, j'ordonne dès maintenant la poursuite du traitement.

La phase B du projet Lazarus est lancée.

Votre dévoué,

Dr. Aragon.

PS : Le nouvel assistant qui m'a été assigné me semble très prometteur.

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Faites que ça s'arrête.

Retentissant dans mes oreilles, la sonnerie stridente de l'université me força à émerger de la léthargie dans laquelle j'étais plongée depuis deux heures.

Hagarde, j'attendais l'énonciation de mon nom par le professeur de psychologie qui distribuait nos partiels.

« Azarel, Ellen ?

─ C'est moi, marmonnais-je en levant la main.

─ Vous êtes en-dessous de la moyenne. Ressaisissez-vous.

─ Oui, bien sûr. »

Bien sûr...je mentais. La psychologie était mon cours favori, mais l'université avait un prix que mon semblant de famille ne parvenait pas à payer. Pour cela, je m'étais trouvée un travail de femme de ménage à l'hôtel Oasis. Endroit qui, contrairement à ce qu'indiquait son nom, n'était pas des plus agréables, mais qui me permettait de finir mes études.

Tant que j'accepte de passer l'éponge sur les ordures qu'on trouve dans les chambres.

Malheureusement, c'était un travail de nuit, ce qui me laissait très peu de temps pour réviser et m'obligeait parfois à rattraper un peu de sommeil en cours...

Ma contrefaçon d'Eastpak sur le dos, je partis. Je n'avais besoin de dire au revoir à personne, ne m'étant fait ni amis ni ennemis. A l'époque, j'estimais les relations sociales comme une perte de temps.

A peine sortie de l'université, je fus frappée par une forte odeur de fumée. Prise d'une quinte de toux irrépressible, j'aperçus néanmoins une magnifique Mustang noire filer. La petite étudiante que j'étais s'engouffra alors dans l'une des grandes artères de sa ville, Las Vegas.

Vegas la grande, la lumineuse. Le temple des casinos et hôtels démesurés, capitale du divertissement facile où d'heureux couples pouvaient chaque jour venir se marier sans même descendre de leur voiture. Le rêve américain.

Je vivais plutôt dans la face cachée de Vegas, celle qu'on ne voit jamais sur les cartes postales. La ville sans horloge. Piège lumineux où des milliers d'Icare se sont trop approchés du soleil et ont brûlé leurs ailes de moustiques.

Je pénétrai dans le petit appartement que j'occupais avec ma mère, le temps de récupérer l'uniforme de l'Oasis. Alors que je me changeais dans la salle de bain, j'aperçus une forme affalée dans l'ombre, derrière la porte.

Maman.

Elle leva ses yeux vitreux vers mon visage avant de partir dan un grand éclat de rire entrecoupé de sanglots. Je savais ce que j'avais à faire.

Je la traînai jusqu'à la baignoire en tâchant d'ignorer ses cris, puis activai le jet d'eau jusqu'à calmer son hystérie. Ensuite, fuyant son regard, je l'enveloppai dans une serviette éponge.

J'avais beau avoir effectué ces gestes beaucoup trop souvent, cela ne devenait jamais plus facile.

Ma mère avait été une Icare parmi tant d'autres, prisonnière d'un monstre appelé héroïne. Mais il fallait que j'aille travailler.

Je parcourus d'un pas empressé les rues agitées par la foule venue passer une soirée inoubliable. Après avoir quitté les grands boulevards, je manquai soudainement de me faire renverser par une voiture qui fit une embardée sur le trottoir. Tombée à terre, je m'apprêtais à incendier le conducteur lorsque je réalisai qu'il s'agissait de la même voiture qui se trouvait à la sortie de mon université. Et j'étais trop paranoïaque pour croire à une coïncidence.

Tendue, j'observai la Mustang s'arrêter. Deux hommes athlétiques en descendirent, puis se dirigèrent vers moi.

Sans réfléchir, j'abandonnai mon sac et détalai. Les bruits de pas des hommes s'intensifièrent.

Les battements de mon cœur s'accélérèrent alors que je prenais conscience que j'étais bien visée. Mes jambes, peu habituées à la course, me faisaient mal et mes poumons me brûlaient. Telle une maladie, la peur me contaminait.

Il faut que je m'arrête.

Dans l'espoir de me cacher ou de trouver de l'aide, je m'engouffrai dans une petite ruelle, qui s'avéra être une impasse, avec pour seul résident un SDF qui paraissait endormi.

Ça ne peut pas finir comme ça !

Cédant à la panique, je sanglotai et tentai d'escalader les murs, tandis que les bruits de pas se rapprochaient. Puis plus rien. Ils étaient là.

Je fis volte-face, juste à temps pour voir le plus grand des deux hommes dégainer un revolver et tirer sur le SDF . Un cri s'étrangla dans ma gorge alors que le second m'assommait.

Encore une journée normale à Las Vegas.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 31, 2016 ⏰

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Numéro 93Où les histoires vivent. Découvrez maintenant