28.Elisa

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Nous arrivons enfin à Washington, après plus de quatre heures de route. Je écouté chacune de ses recommandations, chacun de ses conseils et ses demandes. Il m'a répété au moins quinze fois d'être prudente, de ne pas oublier mon rendez-vous avec l'avocate et surtout de penser à lui. Il est seize-heures trente-huit et je ne sais pas ce qui est le plus dur là : est-ce de regarder ce flot de militaires dire au revoir à leur famille dans ce temps grisâtre ? Est-ce de retenir mes larmes le plus longtemps possible ? Ou est-ce simplement le fait qu'il nous reste exactement vingt-deux minutes pour être ensemble ? Je ne sais pas...

J'ai un cadeau pour lui mais j'ai la peur au ventre de lui donner. Pourtant, ce serait stupide de ne pas me lancer, et si je ne le faisais pas, je le regretterai. En plus, qu'y a-t-il de plus gros engagement qu'un enfant ? Rien, même pas ça.

Damien recule son siège au maximum en souriant.

—Viens près de moi, toi.

Je ne me fais pas prier, grimpe à califourchon sur ses genoux en tentant de cacher ma maladresse. Il glisse ses mains par-dessous ma jupe, caresse mes fesses. Nous ne sommes pas au centre du parking, et ainsi mis, personne ne peut nous apercevoir, encore heureux.

—J'ai un cadeau pour toi.

Il sourit de toutes ses dents et je l'imite. On dirait un enfant, beaucoup trop craquant.

—Donnes-le moi, Elisa.

Je me penche par-dessus la console centrale et ramasse mon sac. Mon cœur bat à cent à l'heure quand mes doigts effleurent l'écrin. Je le prends, et d'une main tremblante, je lui tends.

—Ce... N'est pas une demande en mariage, je te rassure. C'est...

Je m'arrête de parler à l'instant où il ouvre la boîte. Le coin de ses lèvres se retrousse, esquissant un léger sourire.

Il aime !

—Je t'attendrais, Damien. C'est un juste un truc pour que tu ne l'oublies pas.

Il prend la bague, la met à son annulaire et je ne peux plus m'empêcher de sourire.

—Merci, princesse. J'aime beaucoup.

Il observe sa main, la retourne comme s'il la voyait pour la première fois.

—En fait, tu l'as choisie comme ça, les autres pensent que nous sommes mariés.

Je rougis en riant de son idée. N'importe quoi !

—C'est toi qui a choisi le doigt, pas moi !

—Merci. T'as bien choisi.

Je craque encore un peu plus pour lui, même si je ne savais pas cela possible.

Il me serre dans ses bras et j'inspire le plus possible son parfum, pour en imprégner ma mémoire autant que possible. On y est, il va partir, je n'ai plus le choix.

—Je t'aime, Elisa. Je penserai à toi.

Et je craque. Je fonds en larmes dans son cou. C'est trop pour moi tout ça. Je n'ai jamais aimé les au revoir, je n'avais déjà pas adoré le voir partir la première fois mais là, c'est encore pire, encore plus dur. Je pourrais mourir pour lui tellement je l'aime.

Damien prend mon visage entre ses mains, essuie mes pleurs de ses pouces en souriant.

—Enfin les larmes, dit-il en souriant. Je croyais que t'allais te retenir jusqu'au bout.

—Je suis désolée, reniflé-je entre deux rires nerveux. Je ne voulais pas te miner le moral.

—Tu ne me mines rien du tout. Ça me prouve à quel point t'as envie que je reste.

—Tu vas me manquer, j'ai juste envie de t'attacher au siège et de te ramener à la maison.

—Je vais revenir. On se parlera aussi souvent que possible. Et tu n'es pas seule. Mélanie va être aussi déprimée, vous allez passer vos soirées à bouffer de la glace en chialant.

—T'es bête, pouffé-je.

—Et ma mère est là aussi. Je lui ai dit ce matin.

Je plisse des yeux, et attends qu'il développe.

—Pour le bébé.

—Hum... Et elle en pense quoi ?

Je crains le pire. Elle ne voyait déjà pas notre relation d'un bon œil, mais là, elle a dû tomber dans les vapes

—Que si j'étais content, elle le serait aussi.

Je relâche mon souffle et l'embrasse. Si elle a dit ça, c'est qu'il avait l'air un minimum heureux et c'est un petit progrès.

Sa bouche est gourmande avec la mienne, je prends ce qu'il me donne sans compter, seulement en savourant ces derniers instants où je l'ai pour moi.

Nos mains se rejoignent, nos doigts s'enlacent.

Nous sommes interrompus par Connor, qui hurle derrière la vitre, en sortant sa langue.

Je ne peux pas m'empêcher de rire même si Damien râle.

—Bordel, je vais le voir h vingt-quatre, lui.

—Ça doit être pour ça que tu l'aimes autant, réponds-je.

—Ouais, tu as probablement raison.

J'ouvre la portière et descends de la voiture tandis que Damien tire sur l'arrière de ma jupe. Je l'en remercie ou sinon tous ses collègues auraient eu une superbe vue sur mon cul.

—Et faut le laisser respirer, dit Connor en me claquant la bise.

Mélanie rit aussi alors que je la salue.

—T'aurais pu me laisser finir mon affaire, ajoute Damien en sortant.

—Fallait profiter avant, rit Connor.

Damien contourne sa voiture et ouvre son coffre, prend son sac et vient me rejoindre.

—C'est parti !

Je prends sa main dans la mienne, et y enlace mes doigts avant d'avancer avec lui vers le port d'embarquement sur lequel s'entasse déjà un bon groupe de militaires et leurs familles.

Il finit de saluer ses collègues, et reviens vers moi pour me serrer dans ses bras. Je clos les yeux et profite de la sensation de l'avoir contre moi, encore un peu.

—T'as un papier ?

Je me détache de lui en éclatant de rire.

—Un nouveau rituel, Commandant ?

—J'aime bien, répond-il en se passant une main dans ses cheveux.

Je me presse de fouiller dans mon sac, excitée de ce jeu entre nous.

—Tiens.

Il sourit et s'accroupit en rédigeant sa note sur mon ticket de caisse.

Je sors de mon sac l'enveloppe qui contient la lettre écrite un peu plus tôt. J'ai tellement hâte qu'il la lise. Quand il se relève, nous nous échangeons nos mots et je souris en le regardant glisser le mien dans la poche de son uniforme, contre son cœur.

Je lui bondis dessus, resserre mes bras autour de son cou.

—Je t'aime Dam, tu me manques déjà.

—Je t'aime aussi. Prends soin de toi et de notre bébé, Elisa.

Nous nous embrassons une dernière fois, puis nous nous lâchons quand il se fait rappeler à l'ordre par son Capitaine : il est l'heure d'embarquer.

Il s'éloigne vers le navire, accompagné de Connor et de tous les autres dont je ne connais pas les noms, et je m'empresse de lire son mot, même si je triche en attendant pas son départ.

« Sois ferme avec ton avocate... À mon retour, je te ferais mienne en t'épousant. Je t'aime »

Un jour trop tardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant