Le pouvoir des fleurs.

1.

champ de soleils.

J'ouvre les yeux et remarque que je suis dans mon lit, une petite lumière blanche clignote de mon ordi. Je me suis endormie en regardant des photos de ce fameux été, je ne me rappelle même plus avoir ouvert le dossier. Il est encore très tôt et malgré l'approche de l'été, la lune est encore visible. Une idée me vient et je m'empare de mon sac à dos, en renverse le contenu sur mon lit et y enfourne mon appareil photo. En plus de mon gros sweat, j'enfile mon pantalon de la veille et une paire de chaussettes . Le sac sur les épaules je descends les escaliers à tâtons, ne voulant pas rompre la sérénité de la nuit. Mes pieds froids glissent sur le gros tapis de l'entrée jusqu'à mes baskets. L'appartement est silencieux, on entend seulement le grondement léger du réfrigérateur. J'attrape les clés et sors.

L'air doux de la nuit caresse mon visage et je prends rapidement goût à cette sensation de liberté. Quelques pas plus tard j'arrive aux bords d'une petite rivière sur laquelle les jeunes arbres forment des ombres étranges s'entrelaçant les unes aux autres. Au bout du petit sentier, je découvre un magnifique et immense champ de soleils. De véritables soleils, jaunes, à la lumière du jour naissant. Je reste là pendant plus d'une heure, admirant et capturant une infime partie du spectacle qui se joue devant mes yeux.

Les chevilles engourdies, je repart en quête d'une deuxième beauté reposante et revient cette fois dans le centre-ville. C'est alors; qu'en passant devant un vieux bâtiment en briques rouges, je remarque une étincelle jaune, le champ de soleils, là devant mes yeux, une immense toile prenant tout un mur à gauche. C'est une photo en noir et blanc, où en son centre, un seul tournesol déroge à cette règle dichromatique et illumine le reste de la toile d'un jaune incandescent.

- C'est beau n'est-ce pas?

Encore en plein état de béatitude je sursaute et me retourne vers mon interlocuteur. Il m'a l'air plutôt jeune, et son léger sourire me mets étonnement en confiance.

- Ce pouvoir qu'ont les fleurs.

- De quoi? Oh oui pardon, je voulais dire, oui c'est magnifique.

- Je pense que de toute la galerie, ce doit être mon préféré.

- Tu travailles ici?
demandais-je à la fois admirative et impressionnée.

- On peut dire ça, mais rentre, je vais te raconter si tu veux.

Normalement j'aurai refusé, mais, j'étais venue ici pour découvrir d'autres horizons. Bien sûr l'envie de visiter cette galerie avec ce garçon, qui m'ont l'air tout aussi fascinant l'un que l'autre, me poussa à le suivre. En entrant, j'ouvris de grands yeux fascinée par le lieu. Je ne savais pas où placer mon regard et tout ce que je découvrais m'emportait dans des univers différents qui me plaisaient tous tellement.

-Au fait, comment t'appelles-tu, inconnue-qui-a-plutôt-l'-air-d'-apprécier-la-galerie?
Il me demandait ça d'un ton tellement calme, comme si tous les matins à 7h il avait pour habitude de faire entrer une fille ici. Après tout peut-être que oui, je ne le connais pas. Je l'avais parfaitement entendu mais je préférais ne rien dire et continuer de visiter le reste de la galerie du regard.

- un café?
Tenta-t-il quelques minutes plus tard, me faisant sortir de mes pensées.

- oui pourquoi pas, j'en ai bien besoin. Bon alors tu ne m'a toujours pas dit ce que tu fais ici.
L'odeur de café commençait doucement à envahir la pièce, pendant qu'il s'installait sur un grand tabouret dont le dossier était composé d'un patchwork de capsules de bouteilles vintages.

- oh et bien je cherche l'inspiration et je travaille à mes heures perdues.
Cette galerie appartient à un ami de mon grand-père, je suis entré plusieurs nuits ici, en douce, puis je repartais à l'aube avant l'ouverture. Tu prendra un sucre?
Je fis oui de la tête et je pris la tasse fumante qu'il me tendais.
Mais, il a vite repéré mon petit manège et un matin il s'est pointé plus tôt que prévu à la galerie et m'a balancé un double des clés. Depuis on a fait un pacte, je peut venir ici quand je veux, si en contrepartie je le remplace de temps en temps pour tenir le commerce. J'expose aussi des œuvres de temps à autres ça m'offre une certaine visibilité. Et toi, qu'est-ce que tu viens faire ici?

- je squatte l'appartement d'un pote pendant qu'il est en vacances, histoire de prendre l'air.

- tu es un peu une sorte de vacancière fauchée qui ne veut pas se l'avouer?

- c'est ça.
Je lui sourie et bu mon café.
Le premier client venait d'entrer, faisant tinter la clochette du magasin. Je devais partir, je ne suis pas sûre que ma présence soit vraiment la bienvenue sans l'accord du gérant.
Merci encore pour m'avoir fait entrer ici mais je dois y aller, j'espère te revoir avant mon départ, lançais-je. Je repris mon sac, posa ma tasse à moitié vide et me dirigea vers la sortie.

- bien sûr, à plus alors. Son sourire me surpris une fois de plus, est-ce réellement possible de montrer autant ses dents à la minute?

- c'est ça, à plus. Et je reparti en direction de l'appart.