Tout allait bien

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Il attendit la nuit ; quand enfin celle-ci tomba, il se leva discrètement, zigzagant entre les lits de ses compagnons de chambre.

Il arpenta de longs couloirs, traversera des pièces parfois aussi hautes que larges, parfois minuscules, et arriva enfin dans l'aile sécurisée de la base. Il emprunta ce chemin qu'il avait parcouru tant de fois ce mois-ci ; des corridors sombres, plusieurs portes de sécurité (qu'il ouvrait avec un badge), des escaliers, des virages, pour enfin déboucher sur un vestibule aux murs blancs. Au fond, juste en face des marches par lesquelles il arrivait, se trouvait une porte blindée, ne pouvant être ouverte qu'avec un badge et un code.

Avant, ledit code était changé toutes les semaines et deux soldats armés gardaient l'entrée de la pièce. Aujourd'hui, plus personne n'avait peur de ce qu'elle renfermait. Ou du moins, juste assez pour la garder fermée et secrète.

Lui, il n'avait jamais eu peur.

Il tapa le code à six chiffres ; passa son badge devant le scanner qui émit ce "bip" désormais si familier à ses oreilles.

La porte s'ouvrit, et il entra.

_____

Elle était assise au sol, contre le mur de gauche, ses bras pressés autour de ses jambes repliées contre sa poitrine. Ses courts cheveux noirs tombaient devant ses yeux, ces beaux yeux marrons qu'il aimait tant.

Elle leva la tête et le fixa, surprise, mais gardant toujours cet air triste qui était devenu habituel chez elle.

"-Tu es revenu, constata-t-elle.

-Je voulais pas te laisser comme ça, je me suis comporté comme un con tout à l'heure, et je pouvais juste pas passer la nuit avec ça dans la tête... Je suis tellement désolé, si tu savais, j'ai pas réfléchi à ce que j'ai dit ; j'étais impressionné et... Oh je suis tellement nul, excuse-moi, s'il-te-plaît."

Elle sourit légèrement et chuchota un léger "c'est pas grave". Il adorait sa voix, son sourire, aussi faux soit-il, ses yeux, ses cheveux, la façon dont elle le regardait... En fait, il lui aurait été difficile de dire ne serait-ce qu'une chose qu'il n'aimait pas chez elle.

"-Bon, du coup, j'ai ramené à boire !, lança-t-il fièrement en sortant une bouteille de la poche intérieur de sa veste.

-Ils t'ont laissé entrer avec ça ? Et laissé entrer tout court, d'ailleurs ?

-Tu sais, plus personne ne surveille maintenant.

-Je ne suis plus dangereuse ?

-J'en sais rien, en tout cas, ils pensent que tu ne représentes pas de risque dans l'immédiat."

Il s'installa à côté d'elle et dévissa le bouchon de la bouteille d'alcool. Alors qu'il lui jetait un bref coup d'il, il remarqua qu'elle se pinçait la lèvre.

"-Qu'est-ce qu'il y a ?

-En fait, j'ai quasiment jamais bu, et les quelques fois où ça m'est arrivé, j'ai extrêmement mal tenu l'alcool...

-T'inquiète, je te stopperai quand tu commenceras vraiment à dire n'importe quoi, rit-il"

Puis il vit qu'elle, elle ne riait pas.

En fait, elle avait à nouveau ramené ses jambes contre elle et avait baissé sa tête, ses cheveux formant un rideau pour cacher ses yeux.

Elle s'était renfermée ; il détestait ça.

"-Eh, tu me feras pas de mal.

-Qu'est-ce que tu en sais ?

-La seule chose que ça peut faire, c'est te changer les idées, pas te mettre dans la tête que je suis ton ennemi.

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