La foule immense et bruyante remplie la salle de conférences, tandis que Lila et moi franchissons, bras dessus, bras dessous, la grande porte coulissante.
– Finalement, je préfère les remises de diplômes à la française, commenté-je en prenant peur.
Lila me regarde étrangement, puis finie par me prendre la main.
– Maud, tu as toujours voulu d'une remise de diplôme à l'américaine, et c'est très rare en France, alors profite.
Je lui lance un sourire tendu.
– Maintenant, c'est toi la fille angoissée, et moi la fille cool.
Mes yeux s'écarquillent.
– Non, surtout pas, ça va aller.
Je prends une grande respiration, et avale difficilement pour enlever la boule qui m'obstrue la gorge d'angoisse.
– Je suis prête, dis-je à voix haute pour me donner force et courage.
Lila me donne un léger coup de hanche, et me lâche la main.
– C'est parti !
Son engouement est contagieux, et je finis par me détendre. Ces coups d'angoisse sont susceptibles de m'arriver à tous moment. L'ancien moi refait surface, et me fait perdre toutes pensées correctes. Mais pas aujourd'hui. Je plaque un magnifique sourire sur mon visage, et lorsque le directeur de la promo cite le nom de l'élève qui me précède, je me prépare au bas des marches.
– Mademoiselle Maud Davis.
Je prends une bouffée d'air, et gravis les marches à une vitesse lente. Il manquerait plus que je m'étale devant tout le monde, et que ma robe remonte jusqu'à mon popotin flasque, et remplit de cellulite.
Oui, les femmes ont de la cellulite, ce n'est pas un secret !
Je reprends contenance, et arrive, saine et sauve (ouf!), en haut des quatre escaliers.
– Toutes mes félicitations Maud, prononce mon enseignant de marketing, le sourire aux lèvres.
Je le remercie chaleureusement pour tout ce qu'il m'a apporté durant ces quatre années, et pour ses gentilles félicitations.
– Mesdames, messieurs, reprend le président de mon école supérieure.
Tous les visages se tournent vers lui, et l'écoute.
– C'est également avec un grand plaisir que je vous annonce que Maud n'est pas seulement diplômée de notre école aujourd'hui, mais une auteure de romance qui sera prochainement publiée dans une de nos maisons d'éditions partenaires.
Quoi ? Depuis quand les maisons d'édition sont partenaires avant les écoles de commerce. La foule applaudit tandis que je reste dans l'incompréhension.
– Bravo Maud, nous sommes très fières de toi, me précise le président lorsque j'arrive vers lui.
– Mais, comment vous savez tout ça ? Demandé-je tout bas, et les sourcils froncés.
– Ma femme est l'éditrice qui a lu votre manuscrit, elle a tellement été touchée par votre histoire qu'un soir, elle m'en a parlé, et c'est pour ça que j'ai su.
Mon visage s'élargit d'étonnement.
– Le monde est petit, il sourit en me tendant mon diplôme.
– Minuscule, vous voulez dire.
Il pousse un petit rire, et me guide ensuite vers l'autre côté de l'estrade. Il est temps pour moi de reprendre ma place parmi les élèves, mon diplôme entre les mains.
– Mademoiselle la Star, reprend Lila lorsque j'arrive.
Je lui marmonne de se taire pour passer inaperçue bien que le président vienne de dire à voix haute que je suis désormais une auteure de romance. Mon projet était de passé incognito au début, je crois que c'est raté, surtout lorsque les autres élèves se retournent vers moi.
– C'est quoi le titre ?
– Il sort quand ?
– Ça fait quoi d'être auteur ?
– Tu as eu un coup de chance !
– Tu m'en donneras un gratuitement, n'est-ce pas Maud ?
Cet enchaînement de question, et de réplique des autres élèves me donne un fichu mal de crâne. Ils pensent vraiment tout ce qu'ils disent.
Ai-je eu un coup de chance, ou ai-je du talent ?
Je ne pourrai jamais répondre à ces questions, l'avenir et l'avis de mes lecteurs me le dira sûrement. Mais en ce qui concerne la réplique de Béca « Tu m'en donneras un gratuitement », je crois qu'ils n'ont pas ciblé l'importance de la chose. Je n'écris pas pour me faire de l'argent, oh ça non, c'est presque impossible à moins de vendre des millions d'exemplaires. J'écris pour moi, pour ma passion, et le besoin d'extérioriser. Mais mon travail ne se donne pas. Ce sont des heures d'écritures, de pensées, de longues nuits sans dormir pour que chaque phrase est un son parfait, et la correction, on en parle de cette période horrible où on ne perçoit plus les fautes. On devient une adepte du français, mais on le déteste. On confond les mots, et on s'embrouille l'esprit. Et après, on me réclame un livre gratuitement. Demandez au propriétaire des grands supermarchés s'ils veulent bien vous donner gratuitement ce que vous avez dans votre caddie, ou alors à un peintre, après tout, il n'a juste passé qu'une vie entière et à donner son âme à une œuvre...
Je laisse tomber tous les blablas de mes camarades, et me concentre sur la fin de la remise des diplômes. J'observe le monde autour de moi, et les exclamations de joie sont au rendez-vous. Soudain, des pensées, des images m'apparaissent. J'attrape mon carnet dans ma pochette, et commence à écrire.
« Lorsque je gravis les marches de l'estrade, ce que j'y découvris me foudroie sur place. Il était là, vêtu dans son pantalon, et sa veste grise de costume. Son regard brun me captivait autant qu'il agissait sur le bouton de plaisir entre mes jambes. Il était beau. Aussi incroyable qu'un soleil d'été en plein hiver. Il était celui qu'il me fallait, et je ne pouvais pas perdre une minute de plus avant de lui avouer ce que je ressentais vraiment. »
Les idées s'enchaînent, et ma main ne délaisse plus le stylo pendant quelques secondes. Je plonge toute mon imagination et mon âme sur ce carnet alors que je suis en train de vivre l'histoire de mes deux personnages. Léo et Rika sont enivrants, et m'obsède au point que je suis obligée de coucher mes écrits sur une feuille blanches désormais remplie de bleu, en pleine remise de diplôme. C'est comme ça qu'est ma vie depuis quelques mois. L'écriture a pris une place importante, et non négligeables. Je suis obligée de m'exprimer sur le papier n'importe où, où je me trouve. J'en ai besoin, cela m'est devenu vital...
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I don't believe in love
ChickLitLa vie est faite d'amour et de joie. Pas pour Maud. Cette jeune fille de 24 ans, tout juste diplômée d'une grande école de commerce, ne croit pas en l'amour. Et pourtant... Son roman vient d'être accepté par une maison d'édition spécialisée dans l...