Chapitre 3 :

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~ Média : Tyson

19 heures 30. Mes frères et sœurs et moi sommes tous les six assis dans le salon. Tyson, installé sur un fauteuil, extrêmement crispé. Il fixe l'horloge accrochée au dessus de la télévision, l'air tendu. Dylan et Mathilde, sont assis d'un côté du canapé et se tiennent la main, comme pour s'encourager mutuellement, geste qui a le don de m'attendrir. Ces deux là sont toujours fourrés ensemble. Inès et Timéo quant à eux, sont sur mes genoux. Contrairement aux autres, ils attendent impatiemment qu'il soit 19 heures 45. La petite sautille sur mes jambes, faisant voler ses boucles châtaines. Ses yeux alternent entre son jumeau et moi.

Elle ne comprend pas pourquoi tout le monde se tait. Pourquoi ce silence de mort. C'est une enfant. Inès et Timéo sont trop petits pour comprendre de toutes façons.

19 heures 45 est, pour nous tous, une heure des plus difficile. Car c'est l'heure à laquelle notre mère rentre du travail. Ou du bar. Tout dépend. Quoi qu'il en soit, elle rentre toujours titubante, une canette à la main et sentant l'alcool à des mètres à la ronde. Généralement, je l'aide à monter dans sa chambre pour qu'elle se repose et je redescend ensuite pour m'occuper des enfants. J'essaie de les gérer un maximum afin de ne pas réveiller maman. Si ça arrive...

Je laisse les marques sur mon corps en témoigner.

Tout en caressant les cheveux de mes petits anges, je jette un regard en coin à Tyson. Il n'a vraiment pas l'air bien. Son œil gonfle encore...Et sa lèvre tourne au rouge écarlate. Pour l'instant, personne ne semble avoir remarqué son visage. Heureusement. Connaissant Mathilde, elle commencerait à chercher des noises à son frère, et ça risquerait de partir en dispute. Chose que je voudrais éviter. Depuis que je suis assez grande pour leur expliquer, j'essaie de leur apprendre à se supporter, à ne pas se comporter comme des étrangers. Notre famille est assez brisée comme ça, je ne veux pas les voir se déchirer entre eux.

Soudain, une porte qui s'ouvre me tire de mes pensées. Mon cœur rate un battement‏. Comme connectés, nous nous levons tous d'un bond, les yeux rivés sur le couloir de l'entrée. J'essaie de paraître la plus détendue possible pour ne pas inquiéter mes cadets. Après tout, c'est juste notre mère qui rentre...

D'ailleurs, en parlant d'elle, la voilà qui arrive dans le salon. Une masse de boucles châtaines, une peau pâle, deux yeux bleus foncés. Voilà ce à quoi ressemble Eva Kaligan. Ma mère. Et comme tous les soirs, elle est saoul.

Je suis à au moins quatre mètres d'elle, pourtant je discerne parfaitement l'odeur de vodka mêlée au whisky et à la bière. Elle a dû encore trainer dans un de ces bars bizarres en sortant du travail... Maman a du mal à tenir debout, elle marche lentement, le regard vide et faisant machinalement tourner ses clés autour de son index gauche.

Les jumeaux se penchent en avant afin de se jeter à son cou. Je les rattrape avant qu'ils ne commettent l'irréparable. Timéo me lance une œillade curieuse. Je ne peux pas le regarder. Mon pauvre chéri...Je suis désolée, mais si je vous laisse y aller, vous risquez de vous retrouver confrontés à une facette de maman que vous ne devriez pas voir à votre âge..:

" - Dylan, Mathilde, je commence, tentant de maitriser les tremblements de ma voix, occupez vous des jumeaux. "

Mon frère et ma sœur se précipitent vers les deux plus jeunes et les emmènent dans la cuisine, histoire de les éloigner. Tyson et moi restons là, à regarder notre mère passer près de nous sans même nous adresser le moindre signe pouvant nous indiquer que nous existons en ce moment même. L'adolescent de quinze ans serre les poings. Discrètement, je pose une main sur son épaule, sans quitter la quarantenaire des yeux. La voyant presque trébucher contre le tapis du salon me fais bondir en avant. J'attrape un de ces bras le passe autour de mon cou et passe une main dans son dos :

Ma Démone IntérieureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant