C h a p i t r e 2

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Je déteste le mardi, et ce depuis ma seconde. Avant, je considérais ce deuxième jour de la semaine comme étant absolument semblable aux autres mais après un moment, mes professeurs semblaient s'être donnés le mot pour que j'aie le pire horaire qui existe tous les mardis de chaque année. Enfin, c'est inhumain de demander à quiconque de rester concentré durant trois heures de mathématiques et deux de chimie. Avec seulement vingt minutes d'interruption.

Néanmoins, en ce beau mardi de début d'avril, Monsieur Aglobia, l'unique chimiste du lycée, était aux abonnés absents, ce qui signifiait que j'ai pu rentrer chez moi à quatorze heures et m'y retrouver seul. 

Mes parents étaient chacun au boulot et mes cinq sœurs avaient encore cours. Leur absence rend la grande maison familiale plutôt silencieuse mais ça ne me dérange nullement. J'aime le fait de me retrouver seul avec moi-même au moins une fois par mois. 

A peine ai-je ouvert la porte d'entrée que je lance mes chaussures à l'autre coin du salon; j'ai envie de me détendre et il faut que ça commence par un bien-être physique. J'ôte mon jeans, enfile mon short que j'ai laissé sur le divan avant de partir au lycée le matin même, avant de m'allonger de tout mon long. 

Mes yeux se ferment automatiquement, sans que je ne parvienne à le gérer; chose qui me rend fou car j'aurais préféré me mater un bon film ou partir à la recherche du maquillage que Hyacinthe a tendance à cacher depuis qu'elle a remarqué que je l'utilisais dans son dos. Néanmoins, mon métabolisme, ou corps, ou je ne sais quoi, ne semble pas d'accord avec mes projets. Je me suis donc contenté d'allumer la télévision, je suis tombé sur une émission plus souvent regardée par les grand-parents âgés entre 60 et 80 ans mais je m'en fout. 

Alors que le présentateur tentait une millionième blague à deux balles, je me suis endormi comme une masse. Peut-être était-ce ce dont j'avais le plus besoin, dans le fond. 

Au milieu d'un rêve étrange, un énorme bruit s'est fait entendre. Premièrement, je n'ai pas réagi parce que j'étais persuadé que ce n'était que Heath Ledger qui essayait de me sauver alors que je me battais héroïquement contre un monstre atroce. 

Le bruit s'est répété une seconde fois mais après quatre fois, j'ai bien dû réaliser que personne ne venait me sauver et que je ne suis absolument pas le héro de mon rêve. Il y a simplement quelque chose d'étrange qui se passe dans la véranda, dans la réalité. 

Je ne sais pas vraiment quoi faire car disons que mon physique ne m'offre pas la possibilité de me battre avec un quelconque voleur et puis, sans mentir, je ne suis pas le garçon le plus courageux qui existe: j'ai été éduqué entre cinq filles, merde !

J'ai pensé que téléphoner à mon père et attendre son arrivée en boule sous la table de la cuisine était une solution pas trop mal mais je sais que si je fait ça, ça reviendrait à brûler ma dignité et ensuite la déchiqueter. Non, j'ai plus de courage que ce que ma famille pense. J'attrape donc une lampe, une bête lampe de chevet- ça serait assez pour assommer celui qui essaie de rentrer chez moi par effraction- et me suis doucement approché de l'endroit d'où le bruit se fait entendre. 

À pas de loup, je débarque dans la véranda. Ma respiration est vachement saccadée et quelques gouttes de sueur perlent sur mon front. En temps normal, je me serais énervé car je prends tellement de temps à mettre mon fond de teint le matin que je ne peux rester calme lorsque mon minutieux travail se voit détruit, mais ce n'est certainement pas le moment de me prendre la tête avec ce genre de détail: je vais peut-être mourir durant la minute suivante. 

Je trouve le peu de courage dont mon âme fait part et saute dans la véranda, pas de la manière la plus héroïque mais je suis prêt à essayer de faire perdre les esprits à ce con à l'aide de la lampe préférée de Maman, quitte à devoir la lui racheter plus tard. 

Je me suis retrouvé face à face avec Diane, une névrosée de mon âge qui essaie de chevaucher l'une des fenêtres ouvertes de la véranda. Je ne la quitte pas du regard durant plus de deux minutes et je ne peux pas m'empêcher de la trouver vraiment étrange. 

-Qu'est-ce que tu fous ici, Diane?, l'ai-je questionné, les jambes toujours flageolantes. 

La lampe toujours bien agrippée, j'attends une explication valable avant de la mettre dehors. Diane est une gentille fille, vraiment, mais je n'ai aucune envie de passer mon temps libre avec elle, encore moins après la frousse qu'elle vient de me faire vivre. 

-J'ai appris par Valentin que tu avais fini plus tôt et j'avais vraiment envie de venir te dire bonjour, s'est-elle contentée d'expliquer. 

-Je ne sais pas si tu es au courant mais la porte d'entrée est un concept vachement cool, surtout que l'on a la chance d'avoir une sonnette, me suis-je moqué. Tu devrais essayer dans le futur, c'est hyper bien fait. 

Elle m'envoie un regard qui aurait pu me tuer si seulement elle avait des revolvers dans les yeux; c'est quand même fou à quel point les filles peuvent parfois faire des choses irréfléchies et parvenir à mettre la faute sur vous. Mais ce qu'elle ne sait pas est le fait que je vis avec cinq- six en comptant Maman- filles et que je sais comment réagir face à ce genre de choses. 

Cependant, alors que je m'apprête à lui clouer le bec avec une phrase toute prête, je me rend compte qu'en plus d'avoir tenté de passer par la fenêtre, elle n'est pas venue toute seule. Je trouve cela vachement culottée de sa part, et je compte bien le lui faire comprendre: 

-Désolé, aucune fête n'est organisée chez les Vulkain, vous pouvez rentrer chez vous, ai-je lancé. 

-Vous? De qui tu parles?, a-t-elle semblé ne pas comprendre ce que je disais. 

-Ne me prends pas pour un con. 

Je perds patience. J'attrape Diane par les épaules, la dirige vers la porte d'entrée et la fait sortir de la grande maison familiale. S'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est bien le fait qu'on essaie de me prendre pour plus con que je ne le suis déjà. Cette fois, ça n'a pas fonctionné et j'ai gagné la partie. 

Une fois débarrassé de la lycéenne, je suis retourné au salon. Je me suis installé dans le divan, dans le but de retourner où j'ai laissé mon rêve. 

- Je dois considérer que Diane est la personne avec qui je dois espérer que tu sortes, a dit la personne de la véranda. Ou alors, justement, vous allez cacher votre relation jusqu'au septième chapitre ?  

Je te voisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant