Un garçon pas comme les autres

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J'y étais. J'étais devant cet établissement de malheur. Combien de temps me restait-il à passer dans cette université déjà ? Un, deux, trois... Oui, c'est cela : trois ans. Je contracte la mâchoire tandis que certains souvenirs m'assaillent sans scrupules. Je reste ainsi, bloquée devant le grand portillon de l'université, jusqu'à ce qu'on me bouscule.

Je relève instantanément la tête vers l'auteur de ce geste et croise un regard vert émeraude. Marine. Je scelle mes poings entre eux et la regarde droit dans les yeux, rejetant sur elle tout le mépris et la haine accumulés envers sa personne. Et dire qu'avant Ça nous étions "amies". Je me demande comment j'ai pu être aussi bête. Je la vois baisser la tête puis se retourner pour sans doute aller rejoindre ses amis.

Moi je reste plantée là, devant l'enseigne de l'université, à me reposer les mêmes questions que les deux précédentes rentrées. Ont-ils oubliés ? Que va-t-il se passer ? Aurais-je encore et toujours cette mauvaise réputation ? Je soupire et commence à avancer d'un pas nonchalant vers le bâtiment neuf et moderne, on se demande d'ailleurs pourquoi ma mère m'y a inscrite, après tout ce n'est pas comme si c'était une maniaque, hein ? N'y croyez pas, c'est du sarcasme.

Je regarde ma montre furtivement et m'aperçois que le début des cours n'est que dans trois minutes, et que je ne suis toujours pas passée au secrétariat pour avoir ma classe et mon emploi du temps. Les regards tant redoutés ne se font pas attendre, dès mon entrée dans l'université, tout le monde se tourne vers moi et me regarde avec mépris. Je baisse la tête vers mes pieds, qui dés lors, accélèrent le pas. La sonnerie retentit et je suis toujours dans les couloirs, en direction du secrétariat.

Et ce qui devait arriver, arriva. Je trébuche à cause d'un croche pied et tombe à quatre pattes par terre. Je relève aussitôt la tête et croise un regard moqueur ainsi que deux autres regards dans le même ton, ce sont deux gars de la case "populaire" et une pouffiasse du nom de Laurine, que je ne connais que trop bien depuis L'accident. Ils rigolent en profitant pour me donner un coup violent dans la côte et partent en cours - sûrement -.

- Bonne année scolaire petite pute ! S'écrit Laurine sous les ricanements des deux autres abrutis.

Je suis toujours par terre, encore un peu choquée, je n'arrive pas à prendre l'habitude de ce genre de gestes, ou même de rester impassible face à ces mots. Mes yeux sont embués mais je ne pleure pas. J'ai cessée de pleurer il y a bien longtemps. Je ne verse plus de larmes, mais ce n'est pas pour autant que je ne suis pas triste ou que je ne ressens pas la douleur.

- Ca va ? me demande une voix dans mon dos.

Ca va ? Ca faisait longtemps que quelqu'un - autre que Janis et ma cousine - me posait cette question. Y aurait-il une pointe d'humanité dans cette université de bourges sans-cœur ? Je tourne la tête vers l'auteur de cette demande et vois un jeune garçon que je n'ai jamais vue auparavant : un nouveau, sans aucun doute. Ce qui peut expliquer son comportement envers moi... Voyons voir dans quelques jours.

Je me relève et lui fais à présent face. C'est un garçon, non, pas comme tout ces clichés ; Loin de la peau bronzé et saillante, elle ressemble à une peau de porcelaine : pâle et lisse, pas de cheveux blonds en bataille, mais des cheveux bruns coiffés au centimètre près, des yeux gris profonds et des taches de rousseur adorable. Malgré cette allure pour le moins, celle d'un enfant, il devait facilement atteindre le mètre quatre-vingt m'obligeant à relever la tête pour pouvoir voir son visage et avait une carrure athlétique assez impressionnante.

- Alors ? Reprend ce dernier.

- Ouais. Je souffle en détournant le regard.

J'allai partir pour le secrétariat mais le garçon m'interrompt.

- Au fait, je ne trouve pas le secrétariat, tu sais où il est ?

Je me tourne vers lui. Il me regarde de haut en bas, non sans gène, puis plante son regard dans le mien.

- Ouais, suis-moi. Mais après, un conseil, évite de me reparler et de m'approcher si tu ne veux pas avoir d'ennuis. Je le conseille irritée par ce début de journée.

Il me regarde étonné de mon ton - sûrement pas habitué à ce qu'on lui parle ainsi - et me questionne du regard, de toute manière il allait vite comprendre ; à tout les coups une nouvelle rumeur allait être relancée. Je chemine vers le secrétariat et lui marche à côté de moi, et le silence pesant devait faire son effet puisque Monsieur  le coupa.

- J'm'appelle Antoine et toi ?

- Tu vas très vite le savoir, ne t'inquiète pas pour ça. Je soupire en le fixant droit dans les yeux durant quelques secondes, jusqu'à ce qu'il lâche un rire moqueur.

- T'es genre la fille populaire que tout le monde connait et dont tout le monde parle, je suppose. Ricane Antoine

- En quelque sorte... Je marmonne.

Nous arrivons finalement devant le secrétariat, où je me fais réprimander par la pionne de mon retard, avant qu'elle ne me donne mon emploi du temps. Antoine eu le même traitement pendant que moi je pars à mon premier cours de l'année : Philosophie. Je marche dans le couloir et le gars de tout à l'heure me rattrape en arrivant à ma hauteur. Je serre les dents et le regarde énervée.

- Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans "ne m'approche pas" ? Je m'exclame à son attention. Si c'est pour te montrer la salle de cours, vas trouver un autre chien, c'est clair ?

J'accélère la cadence et arrive enfin devant porte de ma classe. Je tourne la tête et ne vois pas Antoine. Tant mieux ! Je souffle un grand coup et toquer, un "entrez !" rauque se fait entendre alors je pousse la porte pour me retrouver face à la salle pleine d'étudiants et au professeur plutôt mécontent.

- En retard dés son premier jour ! Je vous félicite mademoiselle Lordin. Allez vous asseoir, mais sachez que je ne passerais pas outre la prochaine fois.

- Lorin... Je chuchote agacée.

- Qu'est-ce que vous attendez ? Allez vous asseoir. Ordonne le professeur en indiquant une place libre dans l'amphithéâtre.

Sous les regards des nombreux élèves et les ricanements de certains d'entre eux, je  me dirige au fond de la salle de cours et m'avachis sur le siège. Et le cours débuta. Le prof parle et parle sans que personne ne l'écoute, à part les quelques étudiants qui veulent finir leur année scolaire avec une mention très bien, ce qui n'est malheureusement pas mon cas. Je n'ai aucune idée de mon futur, je laisse à ma mère le loisir de choisir, en fait.

Bad ReputationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant