PROLOGUE

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20 décembre 2019, 20h17, Washington

La silhouette frémit en entendant les avions passer au-dessus de sa tête. Bouh, elle détestait ça. Elle n'était pas pour ce voyage, alors voilà qu'en plus, elle se retrouvait à se cacher derrière une poubelle pour échapper aux dirigeants de ce trou à rat. Elle se remémora comment elle en était arrivée là.

Voilà quatre ans que Duncan Reeper était arrivé à la tête du gouvernement de l'ancienne puissance mondiale. Personne n'y avait cru. Mais dès le lendemain, tout avait changé. Son adversaire, Humany Folse, avait préféré s'enfuir à l'autre bout du monde de peur d'être arrêtée. Dès le lendemain de son élection, Reeper avait fait arrêter ses opposants. Ceux qui avaient réussit à y échapper n'avaient pas fait long feu. Après son investiture le 20 janvier 2016, il avait entamé de sérieuses négociations (des discussions, car il ne négociait jamais) avec la Grande Patrie, comme l'avaient nommée les médias du monde entier.

Le résultat n'avait été connu de tous que de longs mois après, quand la GP avait atomisé l'Ukraine et la Syrie en deux coups. Le gouvernement américain avait choqué tout le monde quand on avait su qu'il avait cautionné ce massacre de masse. Les Américains avaient rétorqué qu'ils n'avaient pas honte de ça, car ils avaient éliminé ceux qui les menaçaient. On aurait pu croire qu'ils ouvriraient les yeux, mais non. Et elle ne préférait ne pas parler de la situation mexicaine, c'était déjà bien assez dur comme ça pour elle.

Le désagréable bruit de moteur s'éteignit enfin dans la nuit. La ronde était passée, et elle était toujours là. Elle rabattit sa capuche sur sa tête et sortit de l'ombre. Il n'y avait personne dans la rue mais elle savait que les murs de ce pays avaient des yeux et des oreilles. Sans attendre, elle remonta le trottoir sans même regarder autour d'elle. Elle se trouvait dans le quartier des ambassades de l'ancienne Washington. Autour d'elle, les bâtiments qui autrefois devaient briller par leur splendeur n'étaient désormais plus que ruines, débris et cendres. Elle arriva enfin au bout de cette rue. Elle releva la tête en s'arrêtant et contempla l'horizon, un reflet se jouant dans ses pupilles. 

Elle n'était même pas Américaine. Elle n'appartenait à aucun pays quel qu'il soit. Elle se battait pour elle, pour ses amis, sa famille. Et non pas pour un pays. Elle se battait pour que le monde dans lequel elle vivait ne s'effondre pas plus qu'il ne s'était déjà effondré. Elle eut un infime tremblement quand elle se rappela pourquoi elle s'était risquée à revenir dans ce pays. Puis elle serra les poings et son visage se ferma. Une lueur vengeresse s'était tapie au fond de ses yeux. L'orage couvait. Un grésillement retentit dans son oreille.

" Soldat. Projet Polemos activé... Vous savez ce qu'il vous reste à faire."

La personne tourna à droite et remonta jusqu'à une petite voiture noire qui se fondait parfaitement dans l'ombre décharnée des bâtiments aux allures de coquilles vides. Elle s'installa au volant et démarra le plus silencieusement possible. La nuit se referma sur elle. 

Tout serait bientôt fini.


PS : Le clip vidéo est aux créateurs des "Watchmen" et la chanson est "The times they are a changin'" de Bob Dylan

Polemos : Protocole Grand LargeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant