A vrai dire Braum, ma fuite du pays avait pas si mal commencé. Je changeais d'apparence régulièrement, j'évitais les routes et passais par les bois, j'avais même changé de baguette pour être intraçable...
Et puis évidemment la faim et la soif m'ont rattrapés au bout de deux jours et trois nuits de marches en forêt.
C'était logique, mais effrayant à la fois, de se dire que je serai obligés de faire halte régulièrement dans des lieux fréquentés pour pouvoir me restaurer, prenant du même coup un risque considérable d'être identifié, découvert.
Il est vrai qu'en étant soupçonné d'avoir brûlé tout un village, j'aurais eu du mal à ne pas me faire arrêter en vitesse...
Enfin bref. J'étais donc quelques part entre mon village et Munich, d'où je savais que mon ancien précepteur pourrait me faire évacuer vers Viennes, ou Pragues.
Et donc, épuisé, je m'arrête dans cette auberge, et, dissimulé sous mon capuchon, commande au barman le plat le moins cher qu'il propose : une miche de pain, de la charcuterie, et un fromage, avec un cruchon d'eau.
Je reste à manger au comptoir, on était en début de soirée, le coucher de soleil, et là, j'aperçoit descendant des chambres de l'étages, une joyeuses compagnies d'hommes grand et épais, en tenue de cuir pour la plupart.
Ils s'installent en gueulant au comptoir, commandant une montagne de bouteilles, eau-de-vie, bière, hydromels et vins en tout genre, accompagnés de rôtis, de charcuterie, de viande d'oie, de cochon, de mouton...
Et tout ce beau monde au comptoir donc, se met à festoyer, dévorer, engloutir.
Moi dans mon coin, je me serre et me planque, mais rien à faire, je suis vite fait interpellés, et invité à descendre deux ou trois cruches.
Ces amis là sont bien sympathiques, et de fil en aiguille, me voila complètement saouls.
Je décide donc de sortir m'aérer, et l'un d'entre eux me suit. Dans mes souvenirs, je me rappelle que ce garçon était le centre d'attention.
Sur le moment j'ai cru qu'il s'agissait d'une banale fête de famille entres hommes : ils semblaient tous se ressembler, et avaient tous un âges différents, comme une seule et immense famille.
Je sors donc respirer avec ce jeune homme, au moment précis ou les derniers rayons du soleil s'éclipsent, nous laissant dans la nuit totale.
Et c'est là ou mon cerveau embrumés c'est éclaircit sèchement.
Depuis la mort de Martha, certains réflexes sont gravés en moi : mon inimité avec les blonds, ma Haine relative des clairières abandonnés... Et la Pleine Lune bien sur.
Et ce soir la, il c'est trouvé qu'un jeune homme blond m'a coincé dans les bois, un soir de Pleine Lune, lui et sa meute.Mes souvenir de ce soir là sont assez confus. Je me souviens vaguement d'avoir couru dans la forêt, jusqu'à une clairière, poursuivi par le clan de loup-garou.
Je me souviens aussi de leur mine réjouîte quand ils m'ont coincés, encerclés.
Mais étrangement, seul le blond est sortie des rangs, et m'a sauté dessus.
J'ai compris que plus tard qu'il devait s'agir d'un rite d'initiation : tue ton premier homme et rentre dans notre meute.
Le combat me laisse des souvenirs assez chaotiques. Je me rappelle avoir coincé sa gueule sous mon bras, et lui avoir crevé un oeil d'un violent coup de poing.
Je me rappelle aussi le craquement de ses côtes quand, à terre, il m'a bondi dessus, et que je l'ai repoussé à grand renfort de pieds.
Beaucoup de sang bien sur, je m'en suis pas tiré à bon compte.
Mais au final, il reposait là à mes pieds.
Et c'est depuis que j'ai compris que le meilleur moyen de survivre, c'est de laisser ces émotions au placard, et de laisser sa logique nous guidé.
Ce soir là, mon goût pour la boisson m'a mit dans le mal : je ne m'en suis tiré que grâce à mon corps en pilotage automatique.
Au matin, j'étais seul. Je me suis réveillé en sursaut, entouré de lambeaux de mes vêtements mêlés à des touffes de poils, l'animal ensanglantés reposant à mes pieds, sa dépouille lamentable.
J'ai rejoins Munich quelques jours plus tard : mais je n'ai pas pu me séparer tout le long de ce voyage sylvestre de cette impression d'avoir une paire d'yeux braqués sur ma nuque.
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Fragments et personnages : quand le jeu donne envie d'écrire.
FanfictionA toi lecteur, petite mise en contexte. Les quelques mois charnières entre l'année 2016 et 2017 ont été occupés par un jeu d'un genre assez peu connu du grand public, le roleplay, ou "rp". SI tu ne connais pas, je t'encourage, lecteur, à te rensei...