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        Un petit corps inerte,  étendu sur une vaste prairie verdoyante. De fines et très petites jambes pâles, des bras minuscules et égratignés, un simple morceau de tissus violet autours de la fine taille du petit être. Ses cheveux noirs dansait au rythme des légères brises de vent. Du pollen virevoltait dans tous les sens tel des paillettes. Les oiseaux chantaient de leur douce voix mélodieusement apaisante. Un chaleureux rayon de soleil se fit apercevoir au loin offrant un spectacle de couleur à travers les quelques nuages présents.

        Tout était paisible, rien ne pouvait laisser présager un désastre. Cependant, au loin, des cris et des rires d'enfants au sourire malicieux résonnaient. L'atterrissage violent d'une balle de cuir produisit un envole spectaculaire de plusieurs oiseaux colorés. C'est avec une admiration débordante qu'ils suivirent la course folle du petit objet rond sans se préoccuper les uns des autres. Le premier à attraper le ballon gagnerait la reconnaissance des autres. Car pour eux, afin d'être accepté il faut pouvoir montrer sa force et son agilité et les mettre à profit dans n'importe qu'elle situation. Une course folle se jouait donc non loin du petit être.

        Le bruit mécanique d'une jambe métallisée vint briser la douceur des chants naturels. Un tissu blanchâtre dissimulait légèrement la couleur grisâtre du bout métallique. Les rires semblaient à présent moqueurs et peu chaleureux.

- Eh! Regardez! C'est le robot! Railla un des enfants aux joues rougies par la chaleur.

       Des rires et des cris suivirent la remarque et en une fraction de seconde les enfants étaient tous partis. La plaine pu retrouver sa douceur habituelle laissant le calme retrouver sa place pour le bien de la jeune fille, une nouvelle fois blessée par la remarque de ses camarades. Ses yeux fixaient l'étendue d'herbe afin de ne pas laisser ses larmes fausser le sentiment de joie qu'elle imitait à la perfection. Elle se forçait à se montrer forte et souriante pour ne pas sembler faible dans un monde où le paraître remporte face au réel. Dans un long souffle, elle leva les yeux au ciel et tendit ses bras parallèlement au sol. Un courant d'air fit envoler sa chevelure sombre et créa un réel sourire sur ses fines lèvres claires.

         Le vole imprécis d'un papillon attira son attention et c'est avec un rire angélique qu'elle se mit à le suivre imitant le battement des ailes avec ses bras. L'insecte vola quelques minutes avant de se poser au sommet d'une pierre où reposait le petit être. La petite fille la prit dans ses petites main et l'examina.

- Tu respires! s'exclama l'enfant qui d'un geste maladroit lâcha le corps figé de l'être.

Elle s'approcha de la créature aux oreilles pointues et la regarda de plus près en levant ses bras. Sa respiration semblait coupée et le corps plus durci. Mais comment cela était-il possible? Cela ne pouvait pas être réel, il s'agissait d'un rêve, rien de plus. Les fées n'existaient pas après tout.

       De fines gouttes tombées du ciel tapotaient contre les feuilles des arbres environnants, obligeant la jeune fille à prendre le corps afin de s'abriter en forêt. La créature contre son cœur au creux de ses mains, elle s'en alla rapidement brisant une nouvelle fois la douceur naturelle de la plaine avec sa jambe. Elle se réfugia sous un arbre non loin d'un ruisseau à la couleur tellement claire qu'on pouvait y voir nettement les pierres noyées. L'odeur des arbres la transporta dans un monde sans homme, un monde entièrement différent du siens, un monde idyllique où la tristesse et la méchanceté ne sont que des mots exilés. Mais surtout, un monde gouverné par la mélodie et renforcé par la douceur. Un monde généreux et agréable.

- Qui es-tu?

La délicatesse de la voix ramena Mélina à la réalité. Elle regarda longuement la créature debout face à elle sans pouvoir aligner le moindre mot.

- J-Je... Euh.. tenta la jeune fille.

L'être sourit et prit la parole.

- Je suis Elerinna et toi?

- Euh...  J-Je suis Mélina...  bégaya la petite fille.

- N'aies pas peur s'il te plaît... Je ne suis pas méchante.

C'était un piège, elle en était persuadée. Une fée, ici, une heure avant elle semblait avoir perdue la vie, mais elle se trouvait maintenant debout, face à elle, et pleine de vie. Où pouvait bien se trouver la caméra cachée? Elle paraissait pourtant si réelle...

        D'un saut précis la petite fée déplia ses longues ailes transparentes cachées sous le tissus violet, et se posa sur l'épaule de l'enfant. Celle-ci recula dans un sursaut déclenchant le grincement de sa jambe. Le regard d'Elerinna  se tourna vers le visage désolé de l'enfant aux yeux baissés. D'un mouvement de main, une poussière brillante scintillait en direction de sa jambe grisâtre. C'est avec un sourire qu'elle rassura la jeune fille, heureuse de pouvoir bouger sans subir le bruit désagréable du frottement des deux parties métalliques. Le sourire de Mélina suffit à la petite fée pour comprendre que cette rencontre sera inoubliable.

Emmène moi...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant