- Mélina, mon ange réveilles toi ou tu vas finir par être en retard.
Mélina tira l'épaisse couette violette posée sur son visage encore endormi, en grommelant. Des pas gênèrent le silence matinale suivi rapidement du bruit désagréable des tringles à rideaux.
- Mamaaaaan! Combien de fois faut que je te dise que ça tue les yeux cette lumière! Grogna l'adolescente.
Le doux rire de la femme fit sourire Mélina, d'un bond sûr elle sortie de son lit en embrassant sa mère.
- Aller dépêches toi petit singe, tu vas finir par être en retard, répliqua la mère.
Mélina fixa sa mère d'un regard désespéré et saisit les vêtements posés la veille sur sa chaise de bureau. Elle n'aimait pas ce surnom, mais elle le devait à son enfance mouvementée où elle grimpait sur le moindre rebord sans peur ni conscience du danger. Elle aimait la hauteur, sentir le monde rétrécir au moindre centimètre acquit. "Quand je serais grande, je serais inventrice et je construirais une machine capable de me faire voler! " répétait-elle pleine de volonté, cela faisait beaucoup rire ses proches mais son habileté à grimper et sauter fut de courte durée. En effet, à l'âge de huit ans elle se retrouva victime d'une terrible infection causée par une chute non contrôlée dans un buisson épineux. La plaie n'étant pas traitée correctement, sa jambe fut irrécupérable et elle se la fit sectionner, son enfer prit naissance.
La chambre enfin débarrassée de l'adolescente, la mère pu enfin faire le lit avant de préparer le reste de la grande maison. De longs murs blancs, décorés de cadres photos et de diverses petites décorations florales, offraient un sentiment des plus chaleureux. Le long escalier donnait directement sur l'entrée où dormait un jeune labrador noir, du nom de Ralphy. Cette petite boule de poils noirs protégeait avec perfection la maison du haut de ses 3 ans et il faisait le bonheur des jeunes enfants présents le midi et à la sortie de l'école.
La sonnette de la porte retenti, suivie très rapidement des aboiements de Ralphy. Anne descendit ouvrir et deux petits jumeaux lui sautèrent au cou criant de joie son prénom.
Mélina soupira en levant les yeux au ciel suite au cris des deux enfants.- Super encore une journée à les supporter après les cours... Souffla-t-elle en ajustant le flot de sa robe couleur bordeaux, rien de tel qu'une petite ceinture noire pour affiner ma taille, poursuivit l'adolescente.
Son regard fixé sur le miroir elle s'entraîna, comme chaque matin, à dessiner son plus beau sourire sur ses fines lèvres. Un trait d'eyelineur, puis deux, un coup de mascara puis un deuxième suivit d'un léger passage de rouge à lèvres clair et elle fut enfin prête à descendre. En réalité elle n'aimait pas l'image qu'elle reflétait mais avec une jambe en silicone elle ne pouvait pas se permettre d'être mal habillée, ou de venir non maquillée au lycée. L'image est bien trop importante à cet âge.
Un dernier soupire et la voilà partie récupérer son sac afin d'aller dans cet endroit qui la repoussait tant. Au moins, elle n'avait pas à supporter les disputes des deux frères, du moins pas avant 18h.
- Maman j'y vais, annonça rapidement la jeune adolescente.
Anne n'eut pas le temps de prononcer quoi que ce soit que sa fille s'était déjà volatilisée. Plutôt rapide pour quelqu'un qui ne souhaitait pas se lever il y a de ça 30 minutes, pensa la mère de famille le sourire aux lèvres.
Dehors tout était fait de sorte à ce que la vie de l'Homme soit facilitée et protégée. Les routes étaient refaites entièrement afin d'éviter le moindre nid de poule, les trottoirs bien haut limitaient l'accès aux voitures pouvant blesser les piétons, de grands panneaux de signalisation permettaient aux conducteurs d'être très prudents. Certes toutes ces améliorations avaient permises de diminuer grandement le nombre d'accidents mais Mélina trouvait cela superficiel. Pourquoi l'homme souhaitait se protéger alors qu'il n'est pas capable de le faire sur une longue période? Là était son plus grand questionnement. Elle se demandait souvent si un jour elle pourrait comprendre cet être. Ces longues réflexions lui permettaient d'arriver au collège sans prendre conscience du monde qui l'entourait, ni même de devoir prêter attention aux différentes personnes qu'elle jugeait hypocrites.
Après une longue inspiration, elle se dirigea dans la cour de son collège pour entamer sa dernière année. Elle marchait droit, le regard plongé sur le bitume sale, refusant toute confrontation avec les autres. La solitude, là était son petit bout de paradis. Elle n'était pas très friande des relations sociales. Elle avait trop peur que ses camarades jouent avec elle et la blessent.
Petite, elle avait eu une amie. Elle passaient leur journées ensembles à rire et chanter comme deux fillettes de 6 ans. Chaque jour elles se retrouvaient au jardin d'enfants, non loin de sa maison, après l'école. Leurs mères s'entendaient particulièrement bien, pour le plus grand bonheur des deux petites filles pouvant ainsi partir en vacances ensembles.
La sonnerie retentit laissant un frisson désagréable parcourir le corps fin de Mélina. "ça va passer vite..." se répétait-elle inlassablement, comme si elle souhaitait s'en persuader. Seulement personne ne dupe le maître du temps, et les minutes devinrent des heures auxquelles Mélina s'accrochait difficilement. A bout de force, elle sortit une feuille vierge et gribouilla quelques lignes.
"Emmènes moi.. Je t'attends, je ne te vois pas. Mais où es-tu passé? Il se fait tard.. Rentres je t'en supplie.. Non. Il est trop tard. La lune brille de mille feu à présent. Ils t'attendent.. C'est fini."
- Salut, dit une voix curieuse.
Mélina leva les yeux en direction du bruit. Une jeune adolescente de son âge au large sourire se tenait devant elle, attendant une réponse. Les yeux de la jeune brune se posèrent sur le papier à carreaux. Mélina ne mit pas longtemps pour le cacher de sa main délicate ornée d'une bague en argent. Le regard des deux adolescentes se confronta dans une lutte où les yeux perçants de Mélina sortirent vainqueurs.
- Tu n'es pas obligée de rester seule dans ta bulle tu sais.. prononcèrent les fines lèvres rosées de la jeune brune aux yeux baissés.
- Je sais... Murmura doucement Mélina avant de se lever.
Elle rangea ses affaires et quitta la pièce aussi rapidement qu'elle y était entrée une heure avant. La petite brune, la tête baissée et les poings serrés, essuya avec difficulté le sentiment de rejet dont elle fut la victime. Un rire provenant du fond de la salle la fit fuir. Ses pas s'accéléraient tant la honte ravageait son cœur. Elle ne voulait rien de plus qu'aider Mélina à sortir de la solitude.. Là était peut être le problème, fallait-il arrêter de vouloir être serviable? A quoi bon aider si c'est pour ne pas être acceptée? Tellement de questions apparaissaient dans sa tête. Ne pouvant pas les faire taire, elle s'arrêta dans un couloir peu fréquenté aux murs tagués d'insultes grossières. Elle s'agenouilla contre un mur, les mains sur les oreilles et les yeux fermés aussi fort que possible. Elles se mit à murmurer quelques paroles de musique, s'efforçant de calmer la haine présente dans les entrailles de sa chair. Elle faisait partie d'elle à présent. Non. Il ne fallait pas. Elle, adolescente au cœur pleins d'amour il y a encore peu de temps, était devenue une jeune fille à l'espoir dévasté et au cœur ravagé par le rejet. Elle faisait tout pour plaire pourtant.. Mais cela ne suffisait pas... Mélina était-elle consciente du mal que son indifférence procurait à cette jeune brune? Bien évidemment que ce n'était pas le cas. Elle voulait juste rester seule, rester loin de cet être qu'elle n'arrivait pas à comprendre.
Une larme coula délicatement sur les joues rougies par la honte de la petite brune. Elle ne mit pas longtemps à s'effacer sous la délicatesse d'un geste précis. Les yeux de l'adolescente s'ouvrirent rapidement suite à la surprise présente par le toucher d'un membre étranger à son corps.
- Excuse moi...
Ces quelques mots eurent l'effet d'une bombe détruisant toutes formes de haine et de tristesse dans le cœur de la jeune fille. Aucun mot ne pu sortir tant la surprise la paralysait. Elle se contentait de fixer son interlocutrice un peu gênée par l'attitude de la petite brune. Elle choisit de tendre sa main à la jeune fille encore agenouillée au milieu des tagues peu accueillants. C'est avec le sourire aux lèvres que les deux mains s'enlacèrent délicatement.
- Je m'appelle Mélina..
- Je.. Je m'appelle Helena... Annonça timidement la jeune brune.
Leur sourire faisait du couloir un endroit plus accueillant. C'est fou à quel point un sourire sincère peut embellir un lieu aussi froid qu'il puisse paraître. Paraître, là est l'essentiel, un simple détail peut changer une vision sans que l'être ne soit modifié.
"Helena... J'ai peur..."
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Emmène moi...
FantasyUne jeune fille rêveuse et passionnée souhaite un changement radical. Mais à quel prix? Sera-t-elle prête à tout pour y parvenir?