| TROUILLARD |

5 juillet

Je crois que c'est une des premières fois que vous m'entendrez prononcer des excuses et je sais même pas pourquoi je le fais, c'est ridicule, je ne vous dois rien, mais je me sens comme obligé.
Je suis désolé d'avoir mis du temps à répondre, vous êtes tellement nombreux maintenant.
On est le cinq juillet, j'ai reçu une lettre il y a deux jours, c'était d'un ami, il me demandait ce que je devenais. Je sais pas quoi lui répondre. Il voudrait qu'on se revoit. Mais j'ai peur. Je ne suis pas intéressant, j'ai des cernes jusqu'aux joues et une gueule de bois. Je parle pas beaucoup, ça fait longtemps que je n'ai pas tenu une conversation, jsais pas ce que je pourrais lui raconter et ce que je ne pourrais pas. Pas envie de l'engueuler mais j'ai peur de m'emporter. Je suis imprévisible, je suis sauvage. J'ai pas envie de tenir avec lui des conversations vides, boire un café en riant, marcher dans les rues bruyantes, sourire d'une fille bien gaulée.
On va faire un sondage:
1-je jette sa lettre au feu
2-j'appelle le numéro qu'il a laissé sur la lettre et prévoit un rendez-vous
Je deviens presque niais en fait, bref je vous réponds.

fzekoo t'es curieuse hein. Il était une heure ou deux du mat'. J'étais un peu bourré au milieu d'autres gens bourrés. Les soirées et l'alcool. On dit que c'est pour s'éclater mais à part jouer les superficiels et essayer dse peindre une image cool, jsais pas vraiment à quoi ça sert. Noyer son chagrin, mater des meufs, rire. Un gars vomissait devant moi, glamour hein ? Mais il était mal, genre vraiment, du coup je l'ai aidé, j'ai déboutonné les premiers boutons de sa chemise comme il s'étouffait à moitié, puis je l'ai soutenu pendant qu'il vomissait ses tripes, après il était tout blanc, genre tellement blanc que j'ai flippé quelques secondes. Je flippe pas souvent. Du coup je l'ai soulevé et allongé sur un canapé. Des gars se sont approchés et ont commencé à mtraiter de pédé. J'ai ignoré, ils m'ont insulté, de plus en plus fort. Mais jréponds pas, jréponds jamais aux gens comme ça. Alors y'en a un il s'est approché de moi, il a commencé à me caresser le torse, il me demandait si ça m'excitait et je vais pas tout traconter parce que t'es jeune et ça risque de te choquer, pauvre enfant. Mais c'est pour ça qu'jai une cicatrice parce que ça s'est fini contre le carrelage, mauve.
Pourquoi tu veux savoir mon nom ? Je m'appelle Till, ça vient de tielo, les gens du peuple quoi. Jsais pas si ça me correspond mais on dit que les Till sont des personnes impulsives, autoritaires, hypersensibles, orgueilleuses, impatientes, que soit elles réussissent soit elles subissent un échec cuisant. J'aurais un côté tout ou rien, mais dis moi t'es superstitieuse ? Tu vas msortir ta boule de cristal et tes formules magique ? Ou tirer des cartes peut-être ? Je sais pas qui est Till, pour moi jsuis juste le trouillard. Le trouillard qui vous regarde ridicules avec vos petites mains potelées et vos yeux brillants. On est des fous. Selon toi qui est le plus fou entre le gouverneur et le citoyen ?

Lapoulettedarkvador Tu sais jveux pas que les gens s'occupent de moi, je m'en fous moi de votre aide, depuis le début je dis clairement que vous me faites tous crever tellement vous êtes fatiguants. Défoncer des meubles ça me fait pas aller mieux effectivement, mais faut bien que j'abatte ma colère, tu l'abats comment la tienne ?

Uriegasmic pourquoi j'ai fait ça ? Pour me défouler et pas empaler le mur sur mes poings. Ton sarcasme il est faible. Les décès ça fait super mal. Moi à côté de toi j'ai pas vraiment draisons. La solitude, les paroles blessantes, les coups, nos pays mercantiles p'tite fourmi. Non laisse moi me noyer et par loin avec ta barque pourrie, p'tite fourmi. Ton papelard des toubis qui dit que t'es bipolaire, il est aussi écrit que t'es psychologue et devin agrée ? Tu mfais rire, je suis pas toi, j'ai pas une aversion au bonheur, à la niaiserie peut-être mais pas au bonheur. J'ai une aversion pour les gens vides qui s'trimballent l'air de rien dans les rues et suivent toujours le sens de la foule, j'ai une aversion pour ces gens qui bousillent ma vie, ils savent toujours t'expliquer c'est quoi ton problème et eux combien leur vie est dingue, combien ils sont intelligents, combien ils ont de la chance, mais c'est quoi ça ? Ils se rassurent comme ils peuvent, ils crachent sur tout ce qu'ils trouvent de déviants, tout ce qu'ils ne comprennent pas. Ils font de moi le problème alors que s'ils levaient le nez de leur nombril ils verraient que le problème c'est autant eux que moi, jsuis peut-être une branche, la branche la plus pourrie mais jsuis pas les racines t'entends p'tite fourmi ? Je ne suis pas les racines. Adieu p'tite fourmi.